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Les masques de Saint-Marc

Les masques de Saint-Marc

Titel: Les masques de Saint-Marc
Autoren: Nicolas Remin
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billet a dû lui échapper. Et comme il devait savoir qu’un voyageur aurait très bien pu monter dans le train à Fusina, il n’a pu commettre son crime que sur le pont ferroviaire au-dessus de la lagune.
    — Vous partez donc de l’hypothèse d’un crime ?
    — L’absence de toute résistance prouve qu’il a été tué de sang-froid . Ce meurtre va faire du bruit ! prédit l’inspecteur sans se laisser troubler. Une occasion idéale de démontrer que nous employons les méthodes les plus modernes !
    — Je ne crois pas que nous ayons intérêt à nous vanter de meurtres. Surtout à la veille d’une visite officielle de l’empereur. En outre, il n’est pas sûr que nous ayons affaire à un crime. Il est rare que les assassins brisent la nuque de leurs victimes. Ils les abattent, les étranglent ou les frappent à mort. Mais ils ne leur brisent pas la nuque.
    — Un tueur professionnel, si !
    — Puis-je vous demander ce que vous lisez en ce moment, Bossi ?
    L’inspecteur rougit.
    — L’Agent du tsar .
    — De Paul de Kock ? demanda Tron dans un éclat de rire.
    Le malheureux hocha la tête.
    — Ce sont des romans de gare, Bossi ! Mal écrits et cousus de fil blanc. Il n’y a que dans les romans à trois sous qu’on rencontre des tueurs professionnels ! Rien que le titre est à se tordre de rire.
    Bossi s’éclaircit la gorge.
    — Dans ce cas, quelle est votre version des faits, commissaire ?
    — Je n’en ai pas. Du moins pas avant d’avoir lu le rapport d’autopsie.
    — Mais que conclurez-vous s’il apparaît que l’homme était déjà mort au moment où il est tombé dans la lagune ?
    — Il reste d’autres explications possibles. Les portières s’ouvrent quand on les déverrouille. Notre homme peut très bien avoir regardé par la fenêtre et appuyé sur la poignée par inadvertance. C’est arrivé l’année dernière sur la ligne Sud.
    — Vous voulez parler du général d’état-major ivre mort ?
    Tron acquiesça d’un mouvement de la tête.
    — Tout le monde a aussitôt pensé à un meurtre. En fait, il s’agissait d’un accident. Notre homme peut très bien s’être brisé la nuque en se cognant contre le pont et être ensuite tombé à l’eau.
    — Comment expliquez-vous, alors, qu’il n’avait ni argent ni papiers d’identité sur lui ?
    — Peut-être les avait-il rangés dans son sac de voyage, suggéra le commissaire. Ce n’est pas fréquent, mais on ne saurait l’exclure.
    — On aurait retrouvé le sac dans le train, remarqua l’inspecteur, les sourcils froncés. Que fait-on des objets oubliés ?
    — Le contrôleur les met à l’abri et en informe le chef de gare, à l’aide d’un formulaire prévu à cet effet. Si des indices font croire à un délit, le chef de gare prévient la police ferroviaire qui, à son tour, nous informe par écrit. Ce qui ne s’est pas produit, me semble-t-il. À moins que le rapport ne soit resté bloqué quelque part.
    — Et maintenant, que faire ?
    — Nous allons passer à Santa Lucia, décida Tron, et parler au chef de gare, Valmarana.
    — Votre camarade de classe ? Le contrôleur ? Le comte Valmarana ?
    — Il a obtenu une promotion, expliqua le commissaire. Ce qui doit l’arranger car, dans ces conditions, il peut mieux s’occuper de son hôtel.
    — Il a ouvert un hôtel ?
    Tron hocha la tête.
    — La pension Valmarana . Un établissement typique, paraît-il.
    — Vous voulez dire avec des draps humides, des repas immangeables et des chambres toutes petites ?
    — Sans oublier les prix exorbitants ! s’esclaffa le commissaire.

5
    Sissi, vêtue d’une tenue de sport et chaussée de ballerines en lin, laissa retomber par terre les haltères qu’elle venait de soulever et se dressa sur son séant. La pluie qui battait contre les fenêtres de la Hofburg depuis le petit matin avait faibli. Quand elle fermait les yeux, elle n’entendait plus qu’un léger martèlement, un bruit consolant qui lui rappelait les averses d’été à Possenhofen et lui donnait pendant un instant l’illusion d’être revenue au lac de Starnberg.
    Elle se releva dans un mouvement aérien, s’avança vers l’un des deux immenses miroirs fixés au mur de son gymnase, croisa les mains sur sa nuque et se tourna de côté avec lenteur. Dans ses habits moulants – une courte tunique et un pantalon en cachemire d’une extrême finesse –, on aurait presque dit qu’elle était nue. Elle constata avec satisfaction que son corps restait sans
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