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Les larmes du diable

Les larmes du diable

Titel: Les larmes du diable
Autoren: Christopher John Sansom
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votre clerc.
    — Skelly ? Il y met un désordre invraisemblable. Jamais vous n’avez vu un nigaud pareil. »
    Guy sourit. « Eh bien, montrez-moi donc ce dos, si vous voulez bien. » Il se leva, alluma une bougie odorante et ferma les volets pendant que j’ôtais mon pourpoint et ma chemise. Guy était la seule personne à qui je laissais voir mon dos contrefait. Il me fit mettre debout, bouger les épaules et les bras, puis, passant derrière moi, il palpa doucement mes muscles. « Bien, dit-il. Il n’y a guère de raideur. Rhabillez-vous. Continuez vos exercices. Je suis content d’avoir un patient consciencieux.
    — Je n’aimerais pas que revienne l’époque où je sentais la douleur s’aggraver chaque jour. »
    Il me jeta encore un regard perçant. « Êtes-vous toujours mélancolique ? On le dirait, à voir votre mine.
    — C’est ma nature, Guy. Ma tristesse est profondément ancrée en moi. » Je regardai le schéma sur le mur. « Tout dans le monde est une combinaison des quatre éléments. Il y a chez moi un excès de terre, ce qui engendre un déséquilibre permanent. »
    Il baissa la tête. « Il n’est rien sous le soleil qui ne soit susceptible de changer.
    — Je m’intéresse de moins en moins aux remous de la politique et de la loi, bien qu’ils aient jadis occupé la place centrale dans ma vie. Il en est ainsi depuis Scarnsea.
    — Cette période a été abominable. Vous ne regrettez pas de ne plus vous trouver dans la sphère du pouvoir ? » Il hésita. « Auprès de lord Thomas Cromwell, comte d’Essex ?
    — Non. J’aspire à une vie tranquille à la campagne, peut-être à côté de la ferme de mon père. Il se pourrait que je recommence alors à peindre.
    — Je me demande pourtant si c’est la vie qui vous conviendrait, mon ami. Ne vous ennuieriez-vous pas sans affaires sur lesquelles exercer votre esprit, sans mystères à élucider ?
    — Autrefois, peut-être. Mais Londres aujourd’hui… Fanatiques et fourbes s’y font plus nombreux chaque année. Et ma profession en a son lot. »
    Il hocha la tête. « Il est vrai qu’en matière de religion les opinions deviennent de plus en plus extrêmes. Je ne souffle mot de mon passé à personne, vous vous en doutez. Comme dit le proverbe, prudence est mère de sûreté, et qui ne veut pas d’ennuis doit éviter de se faire remarquer.
    — Je suis las de tout cela. Je me dis souvent que tout ce qui compte, c’est la foi dans le Christ et que tout le reste n’est que vain bavardage.
    — Jamais vous n’auriez parlé ainsi autrefois, lança-t-il avec un sourire en coin.
    — En effet. Pourtant, parfois, même cette foi essentielle me fuit et je ne crois plus que ceci, à savoir que l’homme est une créature déchue. De cela au moins, je suis sûr, ajoutai-je en sortant de ma poche la feuille froissée que je posai sur la table. Voyez ce qui est écrit ici. L’oncle de cette fille est un de mes clients de longue date, qui me demande mon aide. Sa nièce comparaît en jugement samedi. Si je suis venu si tôt, c’est que je dois le retrouver à Newgate à neuf heures. » Je lui racontai mon entrevue de la veille avec Joseph. C’était une entorse au secret professionnel, mais je savais que Guy ne dirait rien.
    « Elle refuse de parler ? demanda-t-il en se caressant pensivement le menton.
    — Obstinément. On aurait pu croire que la peur l’aurait poussée à changer d’avis en apprenant qu’elle subirait le supplice de la presse, mais non. J’en arrive à croire qu’elle doit avoir l’esprit dérangé. » Je regardai Guy d’un air sérieux. « Son oncle commence à craindre qu’elle ne soit possédée. »
    Il pencha la tête. « Il est facile de crier à la possession. Je me suis souvent demandé si le malheureux que Notre-Seigneur avait exorcisé n’était pas simplement un pauvre fou. »
    Je lui jetai un regard de biais : « La Bible est claire sur ce point : il était possédé par le démon.
    — Et aujourd’hui, nous devons croire tout ce que dit la Bible,et seulement ce que dit la Bible. Enfin, dans la traduction de messire Coverdale. » Il grimaça un sourire, puis son visage redevint grave et il se mit à arpenter la pièce, faisant bruire les joncs qui recouvraient le sol. « Vous ne pouvez pas la présumer folle, reprit-il. Pas encore. Les gens se taisent pour de multiples raisons. Il se peut qu’ils aient trop honte ou trop peur pour révéler certaines choses. Ou qu’ils souhaitent protéger
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