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Les héritiers

Les héritiers

Titel: Les héritiers
Autoren: Jean-Pierre Charland
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chaises placées devant un massif bureau en chêne. La femme examina la pièce avec de grands yeux. Les boiseries sombres, les lourds rideaux aux fenêtres rappelaient le presbytère de la paroisse Saint-Charles. Ce luxe très sobre la convainquait de réclamer son « dû » avec la plus grande énergie. Voilà où des études universitaires conduiraient Jacques!

    *****
Fernand reprit sa place dans la salle à manger. Ses yeux se posèrent un bref moment sur Eugénie. Butée, la jeune femme mangeait du bout des lèvres, économe de ses paroles, résolue à ignorer les autres membres de la maisonnée.

    — Ce sont les Létourneau, murmura-t-il bientôt, à l’intention de son père.
    — Oui. Je les avais totalement oubliés. Cela m’arrive de plus en plus souvent. L’âge. .
    — Voyons, mon vieux, tu es au meilleur de ta forme, protesta son épouse.
    Elle disait cela depuis vingt ans.
    — Tu l’entends ? ricana le père { l’intention de son fils.
    Dans la même phrase, elle m’offre «mon vieux» et elle vante mes capacités.
    Des yeux, Fernand chercha Jeanne debout contre le mur, mais il n’osa pas sourire. Après plus de trente ans de mariage, ses parents s’entendaient encore si bien. Il n’avait jamais connu cela depuis le jour de la célébration de sa propre union.

    *****
Les Létourneau patientèrent en silence pendant quarante minutes. En gagnant son bureau, le vieux notaire faisait encore tomber de la main des miettes de pain sur le devant de sa veste.
    — Madame, monsieur, que puis-je faire pour vous ?
    Le tabellion oubliait déjà la raison de leur présence.
    — Nous n’avons rien reçu au début de mai, commença la visiteuse un peu impatiente.
    — Ah oui ! C’est vrai.
    Le vieux professionnel chercha un moment une explication plausible. Il ne pouvait tout de même pas dire à cette femme que la mort récente du patron de son mari tarissait la source de la pension versée depuis plus de dix ans avec une régularité rassurante.

    — Monsieur Létourneau, commença-t-il, vous savez que dans cet arrangement, je sers d’intermédiaire. Cela a été clair dès le début.
    — . . Oui, je sais.
    L’épouse lui jetait un regard sévère, comme si cet aveu lui paraissait être une faiblesse.
    — Si j’ai signé les chèques pendant tout ce temps, l’argent n’est jamais venu de moi.
    Le couple gardait les yeux fixés sur lui, soudainement inquiet.
    — Nous avons un contrat, glapit la femme.
    — Depuis mai, le. . le bienfaiteur se trouve en voyage.
    Je ne peux rien faire avant son retour.
    Le qualificatif lui parut convenir. Evoquer le grand-père de l’enfant leur mettrait la puce { l’oreille. Quant { attribuer la cause du retard à un décès, cela aurait poussé cette dame vindicative { mener son enquête. Elle n’aurait plus qu’{
    chercher dans les rubriques nécrologiques le nom d’un notable disparu en avril. Thérèse répéta :
    — Mais notre contrat ? Nous respectons notre part de l’entente, nous donnons les meilleurs soins { notre enfant.
    — Je suis absolument certain de cela, madame. Mais comprenez-moi bien : le bienfaiteur est présentement absent de la ville. A son retour, je ne doute pas qu’il voudra régler les arrérages.
    — Vous pouvez nous payer, et récupérer votre argent ensuite.
    Cette femme ne devait jamais abandonner la partie. Sa détermination un peu hargneuse ne la rendait guère sympathique.
    — Ce genre de chose ne se fait pas. Je suis simplement le lien entre les parties, dans cette histoire. Ne vous inquiétez pas, dès son retour, je m’occuperai de vous.

    — S’il ne revient pas? maugréa Thérèse.
    — Tout le monde revient à la maison.
    Le notaire s’appuya sur son bureau pour s’aider { se relever. Les visiteurs devaient interpréter son geste comme un congédiement. Fulgence quitta sa chaise avec empressement, heureux de mettre fin à son malaise. Sa compagne s’attarda juste assez longtemps pour bien exprimer sa réticence à abandonner la partie.
    Dans le couloir, le couple se trouva face à face avec Eugénie. La jeune femme regagnait ses quartiers { l’étage, après avoir terminé son repas. Un début de migraine servait de prétexte à cette désertion hâtive du salon familial.
    Thérèse Létourneau la suivit des yeux, le front plissé, pendant un long instant.
    — Il s’agit de ma belle-fille, précisa Dupire machinalement.
    Il ouvrit la porte en ajoutant:
    — N’ayez crainte, je m’occupe de cette
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