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Les Fils de France

Les Fils de France

Titel: Les Fils de France
Autoren: Franck Ferrand
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flagellants, dit le cardinal de Tournon qui s’était, avec la discrétion d’un chat, approché de la verrière.
    — Vous ne devriez pas plaisanter avec ces choses, estima le grand maître. Tous ces braves gens ne viennent faire l’offrande de leur fierté que pour racheter des fautes que nous n’avons su prévenir.
    — Ce n’est pas moi qui ai vitupéré la messe du pape ! se défendit le prélat.
    Il présentait le faciès longiligne et pointu d’un rongeur.
    — Je m’en doute, fit Montmorency en le dévisageant comme pour la première fois ; quoique...
    Le maréchal sortit de l’embrasure. Son apparence, immuable, était impressionnante : large de front, de face et de stature, il paraissait un minotaure vêtu de velours sombre et de passements d’argent... Il avança vers la chaire où le monarque s’était rencogné, et n’hésita pas à tirer François I er de sa lecture.
    — Vos bons sujets attendent beaucoup de cette démonstration, affirma-t-il. Nous devons nous montrer résolus et fermes. Très fermes.
    Le roi lui lança un regard triste. Il paraissait las, et cette lassitude se trouvait renforcée par ses vêtements noirs – tellement inhabituels chez lui. Il brandit vers Montmorency les feuillets de sa harangue.
    — « Si un des bras de mon corps était infecté de cette farine, je le voudrais couper ; et si mes enfants en étaient entachés, je les voudrais moi-même immoler »... Est-ce assez ferme ? Est-ce assez résolu selon vous ?
    Montmorency, au ton de son maître, comprit que François trouvait ces formules excessives. Il savait aussi que le roi réprouvait l’emploi de la violence et regrettait qu’on eût prévu, comme point d’orgue des pénitences, l’immolation par le feu de six Luthériens avérés. Cependant, le maréchal pouvait-il se laisser rabrouer sans broncher ?
    — Sire, dit-il en se raclant la gorge, j’ai combattu pour la France à Novare et failli rendre l’âme à La Bicoque ; j’étais aux côtés de Votre Majesté à Pavie puis à Madrid, je l’ai servie en Languedoc, représentée chez les Anglais... J’ai fait tout cela sans qu’elle ait eu, je crois, trop à se plaindre de mes choix.
    François était censé approuver ; il se contenta de grogner.
    — Aujourd’hui, reprit Montmorency, je supplie le roi de me suivre encore dans cette affirmation de force. Vous êtes le berger qui doit tenir le troupeau. Il y va de l’ordre, à l’intérieur, et de la paix au-dehors.
    Le souverain maugréa, et c’est peut-être ce qui enhardit Tournon à contrer le grand maître.
    — Ne serait-il possible de tenir le troupeau sans faire rôtir les brebis égarées ?
    Si une posture avait le don d’exaspérer Montmorency, c’était bien cette sollicitude sans fond, sans engagement véritable, dont le cardinal de Tournon était coutumier.
    — Son Éminence prendrait-elle la défense des hérétiques ? siffla-t-il.
    — Ce ne sont que de pauvres gens, maréchal, et vous le savez bien...
    — Le Parlement de Paris en a jugé autrement, martela le grand maître.
    — Le Parlement vous obéit... Mais il a tort de rallumer les bûchers ; Madame aurait tout fait pour éviter cela !
    — La régente Louise n’a jamais manifesté de faiblesse envers l’hérésie, pour la...
    — Il suffit ! intervint le roi. Mais quand cesserez-vous donc de faire parler ma mère (Dieu l’ait en sa sainte garde) ?
    Il se tourna vers le cardinal.
    — Quant à vous, mon cousin, si vos prédicateurs, et surtout vos théologiens, s’étaient montrés moins acharnés à perdre leur prochain, j’aurais peut-être eu le loisir d’exercer ma grâce. Car c’est l’Église qui, à travers eux, me réclame la tête de ces réformés.
    — Pas toute l’Église, Sire...
    — Bien sûr que si, monsieur ! À commencer par le Saint-Siège !
    Le cardinal de Tournon s’en retourna, penaud, vers sa croisée, tandis que Montmorency, attentif à ne pas sourire, en choisissait une autre.

    Dehors, la neige s’était mise à tomber. En contrebas sur le parvis, la procession s’organisait par groupes de paroissiens et collèges de moines, Cordeliers, Jacobins, Carmes et Augustins, attachés au service d’une kyrielle de reliques 5 . Une ovation monta de la foule pour saluer l’arrivée de la duchesse Catherine et de ses belles-sœurs, les princesses Madeleine et Marguerite de France qui, en robes de velours noir, furent hissées sur des haquenées 4 blanches ; on leur
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