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Les Conjurés De Pierre

Les Conjurés De Pierre

Titel: Les Conjurés De Pierre
Autoren: Philipp Vandenberg
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l’occasion :
    — La dernière fois déjà, tu n’as pas raté ton coup, le garçon avait des cheveux frisés comme les tiens !
    Melchior la regarda abasourdi.
    — Tu mens ! hurla-t-il. Petite traînée !
    Mais il la lâcha. À défaut de se renseigner sur les circonstances précises de la naissance, il l’injuria et la menaça :
    — Infâme catin, crois-tu que je n’ai pas compris ton manège ? Tu ne cherches qu’à me faire du chantage ! Je vais t’apprendre à respecter le bailli Melchior, espèce de maudite sorcière !
    Afra tressaillit. Quiconque entendant le mot « sorcière » aurait réagi de la même façon. Les femmes et les curés faisaient leur signe de croix. Il suffisait de porter l’accusation, sans même en apporter la preuve, pour mettre en route d’impitoyables chasses.
    — Sorcière ! répéta le bailli en crachant par terre tout autour d’elle. Puis il lissa ses vêtements et partit en claudiquant nerveusement.
    Tandis qu’Afra se relevait péniblement, des larmes de désespoir et de colère roulaient sur ses joues. Accablée, elle appuya son front contre l’échelle et éclata en sanglots. Si le bailli l’accusait de sorcellerie, elle n’avait aucune chance d’échapper à la mort.
    Lorsque ses larmes se tarirent, Afra inspecta sa mise. Son corsage était déchiré, sa jupe et sa guimpe couvertes de sang. Pour éviter les questions, elle grimpa au sommet de l’arbre où elle attendit la tombée de la nuit. Lorsque l’angélus sonna dans le lointain, elle sortit de sa cachette pour regagner la ferme.
    Dans la nuit, d’abominables visions et d’affreuses pensées tourmentèrent son esprit : le bourreau s’approchait d’elle en brandissant un fer rouge, elle se voyait au milieu d’instruments de torture munis de roues et hérissés de pointes, qui ne tarderaient pas à lacérer son jeune corps. Peu après minuit, elle avait pris une décision : elle allait changer de vie.
    Personne ne s’aperçut qu’Afra quittait le dortoir des domestiques. Elle évita de poser le pied sur les planches du parquet qui craquaient et parvint, sans se trahir, à descendre du grenier au rez-de-chaussée. Elle s’introduisit à pas de loup dans la lingerie et rassembla, à tâtons dans le noir, ses vêtements dans un balluchon sans oublier d’y adjoindre une paire de chaussures et quitta la maison pieds nus par la porte de derrière.
    Après avoir traversé la cour noyée d’un épais brouillard qui semblait vouloir la retenir comme les mailles d’une toile d’araignée, elle prit le chemin de la grosse grange.
    Malgré la brume cachant la lune et les étoiles, elle marchait d’un pas d’autant plus assuré qu’elle connaissait bien le chemin. Une fois arrivée au grand porche, elle retira la chevillette de la petite porte latérale et poussa le battant qui s’ouvrit en gémissant.
    Afra sursauta d’épouvante.
    On eût dit le feulement d’un vieux chat dont on vient d’écraser la queue. Elle redoubla de peur lorsque l’un des chiens du bailli bondit sur elle. Son sang se mit à palpiter dans ses veines.
    Elle se figea sur place. Mais le clébard cessa miraculeusement d’aboyer.
    Personne ne remarqua son départ.
    Avant de partir, Afra devait aller chercher dans la grange ce qu’elle avait caché sous les planches de bois qui isolaient le foin de l’humidité. Là, tout au fond, sous la dernière latte, elle avait dissimulé ce qu’elle possédait de plus précieux.
    Dans l’obscurité, la servante mit le pied sur une souris ou un rat qui détala en couinant. Elle retrouva sans une hésitation la planche, la souleva et retira un sac de toile contenant un petit étui auquel elle tenait comme à la prunelle de ses yeux. Puis, avec toujours autant de discrétion, elle quitta définitivement la ferme du bailli où elle avait vécu depuis l’âge de douze ans.
    On remarquerait certainement sa disparition au lever du jour, mais personne ne se lancerait à sa poursuite. À l’époque où, un soir voilà trois ans, la vieille Gunhilda n’était pas rentrée des champs, personne ne s’était soucié de son absence.
    Le hasard avait voulu que le garde-chasse du bailli retrouve son corps se balançant au bout d’une corde à la branche d’un tilleul : elle s’était pendue.
    Après une heure de marche dans l’obscurité, le brouillard se dissipa progressivement et Afra put à peu près se repérer.
    Elle marchait vers l’ouest, à la lisière de la forêt,
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