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Les compagnons de la branche rouge

Les compagnons de la branche rouge

Titel: Les compagnons de la branche rouge
Autoren: Jean Markale
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l’intégrité, la
survie et la richesse du groupe social considéré. Les héros sont donc suscités
par les événements. Ce qui ne les empêche pas d’incarner dans une certaine
mesure des personnages divins qui appartiennent à la mémoire collective et qu’ils
ont pour mission d’ interpréter , pour le plus grand
bénéfice de la collectivité qui les a mis au monde ou accueillis en son sein. Dans
ces conditions, on ne peut guère ravaler les récits épiques au rang de simples
expressions de rêves ou de fantasmes : ils reflètent des réalités
quotidiennes intégrées dans un cadre tant religieux que socioculturel, celui-ci
étant lui-même un fidèle reflet de la mentalité inhérente à tel groupe social, mentalité
qui remonte parfois jusqu’aux origines, dans ce temps mythique que les Évangiles
traduits en latin évoquent sous la célèbre formule in illo
tempore .
    Actuellement, l’Irlande est composée de quatre provinces, l’Ulster
( Ulad ), le Connaught ( Connacht ),
le Leinster ( Laigen ) et le Munster ( Mumu ),
qui correspondent à d’anciens royaumes, eux-mêmes divisés en multiples
principautés de taille et d’importance très variables, chacune ayant à sa tête
un ri , c’est-à-dire un roi dont la fonction essentielle
est d’assurer la répartition et la protection des richesses du territoire qu’il
administre selon les coutumes en vigueur. Ces petits rois de tribus sont liés
entre eux par des accords, des traités, des obligations diverses, y compris
celles qui relèvent de la religion ou de la magie. Ils sont également liés aux
rois des provinces, hiérarchiquement au-dessus d’eux, par des contrats
analogues à ceux des sociétés féodales du continent. On pourrait presque
définir la division politique de l’Irlande ancienne comme une sorte de
confédération où chaque groupe social conserve un haut degré d’autonomie.
    Mais cette unité « confédérale » est factice ou, plutôt,
seulement théorique. Une bizarrerie linguistique en dit long à ce propos :
en effet, en gaélique, le mot « province » se traduit par coic , littéralement « cinquième ». Or, il n’y a que
quatre provinces, la cinquième qu’on appellera le royaume de Mide ( Meath ), c’est-à-dire du « Milieu », étant une
institution presque entièrement virtuelle, essentiellement morale, avec sa
capitale Tara, véritable omphalos , centre religieux symbolique
de l’Irlande pré-chrétienne.
    C’est à Tara qu’est censé résider le haut-roi ( ard ri ), élu par les autres rois et les petits chefs, mais
obligatoirement choisi dans une famille royale, dans des conditions qui
demeurent encore assez mystérieuses, mais où devaient intervenir des rituels
magico-religieux. Toutefois, il est probable qu’avant le XI e  siècle,
où l’institution de la royauté suprême est formellement attestée, le titre de ard ri était surtout honorifique. Le pouvoir, si tant est qu’il
y en eût dans un pays de tendances libertaires, se trouvait aux mains des
grands rois des provinces. Voilà du moins ce qu’on peut déduire de la lecture
des récits épiques les plus anciens, notamment de ceux qui constituent ce qu’on
appelle le Cycle d’Ulster.
    Deux des « cinquièmes » d’Irlande ont eu une
importance particulière durant la période dite protohistorique, c’est-à-dire
pendant l’Âge du Fer celtique : le Connaught et l’Ulster, le premier
autour des considérables personnages que sont les mythiques roi Ailill et reine
Maeve ( Medbh ), le second autour du non moins mythique
roi Conor ( Conchobar ) et de son neveu, le héros
Couhoulinn ( Cùchulainn ). À vrai dire, le Cycle d’Ulster
est inextricablement lié à celui du Connaught, car les principaux sujets des
récits concernent les rivalités et les guerres entre les deux peuples et, de
plus, c’est toujours par l’intermédiaire d’un personnage du Connaught qu’on
apprend ce qui se passe en Ulster, comme si les habitants de l’Ulster, les Ulates , avaient été incapables de transmettre eux-mêmes leur
propre tradition.
    On se fait actuellement une idée presque entièrement erronée
de l’Ulster, et ce pour différentes raisons. D’abord, à cause de la partition
de l’île : on croit que l’Ulster se confond avec le Royaume Uni. Or, sa
province comprend neuf comtés dont six seulement sont rattachés à la Couronne
britannique, les trois autres, le Donegal notamment, faisant partie de la
République
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