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Les Amours qui ont fait la France

Les Amours qui ont fait la France

Titel: Les Amours qui ont fait la France
Autoren: Guy Breton
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librement. En outre, ses gardiens, sachant que cette femme, dont les aventures galantes scandalisaient tout le royaume, était à l’origine des maux dont souffrait le peuple, se montraient désinvoltes et impertinents. Oubliant qu’elle était reine de France (mais ne l’oubliait-elle pas elle-même ?), ils lui parlaient insolemment sans retirer leur chapeau.
     
    À Paris, pendant ce temps, le dauphin Charles ne demeurait pas inactif. Sans rien en dire au roi, qui ne sortait de ses moments d’abattement que pour entrer dans le lit d’Odette de Champdivert [126] , il confisqua les trésors cachés par sa mère.
    Après quoi, pour subvenir aux besoins financiers des Armagnacs, il vendit les robes d’or, les meubles précieux et les bijoux qu’Isabeau avait laissés à Vincennes…
    Mais l’argent ne suffit pas à faire la force d’un parti ; il faut des partisans, et c’est précisément ce qui allait manquer. À la suite de maladresses successives commises par le connétable d’Armagnac, un grand nombre de militaires abandonnèrent en effet brusquement le dauphin pour aller grossir l’armée du duc de Bourgogne.
    Le roi d’Angleterre connaissait son métier. C’est à ce moment précis qu’il débarqua en Normandie, sûr d’être aidé par Jean sans Peur. Aussitôt, les troupes bourguignonnes se joignirent aux troupes anglaises, et Henri V marcha sur Paris. Parvenu à Senlis, il fit demander à Charles VI de lui céder la couronne de France.
    — Précisez bien, dit-il à ses messagers, que je lui en laisserai les honneurs jusqu’à sa mort, à condition, premièrement, que je sois nommé régent, avec le titre de roi de France, et, deuxièmement, que la main de Catherine, sœur du dauphin, devienne le sceau du traité.
    Charles VI, qui, par bonheur, n’était pas en crise, étudia ces propositions avec ses conseillers.
    Au même instant, à Tours, Isabeau rongeait son frein. Informée de ce qui se passait à Paris, grâce à la complicité d’un domestique qui lui permettait de correspondre avec l’extérieur, elle cherchait à s’évader, dans le but d’aider le roi d’Angleterre contre l’époux qui la gênait depuis trente ans et contre le dauphin qui lui avait enlevé ses richesses…
    Un soir, son complice vint lui dire que le duc de Bourgogne approchait de Tours avec huit cents hommes. C’était une occasion inespérée. Aussitôt, elle lui envoya son sceau en or. Jean sans Peur comprit. Il fit répondre qu’il était prêt et qu’il attendait la reine le lendemain, jour des Trépassés, dans une abbaye située à deux lieues de Tours.
    En se couchant, ce soir-là, la reine dit négligemment à ses gardiens :
    — Messieurs, j’aimerais faire demain mes dévotions à Marmoutier. Je pense qu’on ne peut me refuser d’aller prier ?
    — Certes, non, madame.
    — En ce cas, soyez prêts à m’accompagner de bonne heure.
    Le lendemain, à peine Isabeau et ses compagnons furent-ils en prière que soixante hommes pénétrèrent dans l’église de Marmoutier.
    Les gardiens, très inquiets, se penchèrent vers la reine :
    — Madame ! voilà une grande affluence d’Anglais et de Bourguignons. Sauvez-vous !
    — Restez calmes, dit Isabeau en souriant.
    Alors, les trois hommes comprirent qu’ils avaient été joués et cherchèrent à s’enfuir. Ils n’en eurent pas le temps. Déjà, Hector de Saveuse, le chef de la troupe envoyée par Jean sans Peur, se présentait devant la reine et la saluait respectueusement.
    — Saveuse, dit Isabeau, qu’on arrête ces trois hommes !
    Deux se laissèrent prendre. Le troisième réussit à sortir de l’église et courut vers la Loire où il monta dans un bateau qui chavira. Personne n’en entendit plus jamais parler.
    Quand le tumulte se fut apaisé, le duc de Bourgogne vint à son tour saluer Isabeau.
    — Soyez le bienvenu, lui dit celle-ci, vous êtes l’homme du royaume que je dois le plus aimer, puisque vous quittez tout pour me délivrer. Soyez assuré que jamais je ne vous manquerai.
    Après quoi, tous deux « firent bonne chère à l’abbaye » et allèrent s’allonger dans une chambre « pour se mieux retrouver… ».
     
    Le lendemain, la reine força la ville de Tours à se livrer au duc. Puis les deux amants se rendirent à Chartres, où ils furent reçus triomphalement. Isabeau en profita pour se déclarer régente « en vertu des ordonnances passées qui ne pouvaient être révoquées », et elle
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