Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen

L'envol des tourterelles

Titel: L'envol des tourterelles
Autoren: Arlette Cousture
Vom Netzwerk:
ferait un petit discours pour éloigner Élisabeth et Agnès de la table. Pendant qu’il parlerait, Jan informerait tous les autres membres de la famille, y compris Florence,et leur demanderait leur avis sur la façon d’annoncer la nouvelle à Élisabeth sans la commotionner.
    De retour dans la salle, Nathaniel se dirigea donc vers le microphone.
    – Mes amis, mes amis, je vous demanderais une, non, deux minutes d’attention. Élisabeth, ma
lunia
, peux-tu venir me rejoindre avec Pluche?
    Élisabeth obéit immédiatement, tenant dans ses bras une Agnès endormie dans sa robe de dentelle et portant au cou sa prothèse auditive recouverte par Florence d’un petit sac taillé dans une dentelle semblable à celle de la robe. Dès qu’Élisabeth fut près de son mari, les invités les applaudirent encore, ce qui les émut tous les deux.
    – Dans quelques minutes, nous allons tous nous séparer, vous pour rentrer chez vous, ici, aux États-Unis ou au Manitoba. Nous, nous allons coucher Pluche dans son lit, et, à moins que je fasse erreur, Élisabeth va verser une ou deux larmes de bonheur. Croyez-moi, ce n’est pas facile d’être le mari d’une femme que le bonheur fait pleurer, et Élisabeth joue aussi bien de la larme que de l’archet.
    Des rires amusés ponctuèrent la taquinerie de Nathaniel.
    – Ma
lunia
, continue de pleurer. C’est la plus touchante façon de me dire que je te rends heureuse.
    Élisabeth lui fit un sourire tendre et ému, puis porta son attention sur la table familiale. Il s’y était passé quelque chose d’assez important pour que Jerzy se mouche et se tienne la tête, le pouce sur un sourcil, l’index sur l’autre. Pour quelle raison Florence était-elle sortie de la salle à toute vitesse? Nathaniel continuait de lui répéter son amour, mais elle était davantagecurieuse de comprendre pourquoi Sophie et Stanislas se tenaient tous deux près de leur mère. Elle crut même voir Stanislas tapoter doucement la main de son père. Quant à Michelle, elle avait trois doigts devant la bouche, geste qui lui rappela celui qu’elle faisait quand elle était jeune pour cacher sa mauvaise dentition. Elle entendit vaguement Nathaniel raconter combien il avait remercié le ciel d’être venu au Concours international de Violon de Montréal en 1966. Florence réapparut et la regarda dans les yeux, avec un sourire tellement rassurant et complaisant qu’elle comprit qu’on lui cachait quelque chose qui ne pouvait être une surprise-party puisque tous leurs amis étaient avec eux. Nathaniel termina sa petite allocution, l’embrassa et lui prit Agnès des bras avant de la faire passer devant lui pendant que les invités les applaudissaient une dernière fois. Élisabeth s’approcha de la table d’un pas décidé et resta debout, les bras croisés sur sa poitrine.
    – Qu’est-ce que vous me cachez?
    Il y eut un instant de malaise et Jan jeta un regard à Nathaniel, espérant qu’il avait trouvé la façon de dire.
    – Jan! Tu ne m’as jamais rien caché.
    Jan était torturé. Pour lui annoncer la nouvelle, il aurait fallu qu’il la prenne dans ses bras et lui retienne la tête comme celle d’un bébé. Il aurait fallu qu’il lui chuchote chacun des mots de son récit pour ne pas l’affoler. Il aurait fallu qu’il entende le conseil de son père, hélas muet depuis son retour d’Europe. Essayait-il de lui faire comprendre que la guerre était finie et qu’ils étaient maintenant assez grands pour se passer de lui et de leur mère?
    – Jerzy, as-tu pleuré parce que Nathaniel est un piètre orateur ou parce que ses déclarations t’ont ému?
    Jerzy regarda Anna comme s’il avait été pris en défaut. Il avait besoin d’elle et du claquement de sa langue sur sa canine. Toute leur vie avait été chamboulée depuis la fourberie de Casimir, mais jamais ils n’avaient cru qu’elle pourrait l’être davantage. Maintenant que la Pologne avait diminué l’épaisseur de ses frontières et qu’ils avaient décidé d’embaucher de jeunes étudiants polonais pour travailler à la ferme durant l’été, que quatre autres maraîchers de Saint-Norbert s’étaient joints à eux sous la bannière Aucoin et avaient reçu les étiquettes beiges «Les jardins d’Anna» pour les coller sur leurs pots de verre, que Stanislas s’était retroussé les manches dans les champs le jour et avait, le soir, pris en main la comptabilité de l’entreprise, et que Sophie acceptait,
Vom Netzwerk:

Weitere Kostenlose Bücher