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Le talisman Cathare

Le talisman Cathare

Titel: Le talisman Cathare
Autoren: Jean-Luc Aubarbier
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à Alix. Ne l’avait-il retrouvée que pour la perdre définitivement ? Il s’apercevait, horrifié, de la confusion de son esprit. S’il aimait Dieu, c’était à travers l’amour qu’il portait à son épouse. Même si leurs corps ne se retrouvaient plus dans de doucesétreintes, il conservait pour elle une passion ardente, plus profonde encore depuis sa conversion. S’il ne pouvait sauver du bûcher la communauté de Montségur, il la sauverait elle. Il se souvint de son séjour à Cabaret, auprès de la sulfureuse Loba. C’était si loin maintenant ! Ce n’était pas la sensualité qui le taraudait à présent, mais le voyage. Cabaret était le point de départ des Parfaits pour l’Italie. L’Italie qui comptait encore sept évêchés dédiés aux Bons Chrétiens. Cabaret était tombé, mais la route de la Lombardie restait ouverte. Il y conduirait Alix.

    « Fuyons ensemble, tous les deux. Là où une troupe ne pourrait passer, deux individus réussiront. Partons pour l’Italie ; les cathares sont encore tolérés en Lombardie, autour du lac de Garde. Sirmione est une forteresse plus sûre que Montségur ; aucune armée ne la menace. Nous y fonderons chacun notre communauté, pour la plus grande gloire de notre religion. »
    Alix le regarda avec tristesse. Cette espérance en un futur terrestre, ce désir de vie qui animait Bernard, lui était devenu totalement étranger. Elle aspirait de tout son être à la paix du tombeau. « Tu me parles de gloire là où je ne veux voir que le salut. Qu’importent nos idées ! Le catharisme est moribond, et moi je suis déjà morte à ce monde. Ne me tourmente plus ! »
    Bernard toucha son bijou d’argent sous sa tunique : croyait-il encore en sa vertu salvatrice ? Il s’éloigna en murmurant pour lui-même : « Je la sauverai malgré elle. »

34

    Montségur, hiver 1243-1244.
    L’hiver était tombé sur Montségur. Une fine couche de neige recouvrait le sol et les sommets. Le ciel plombé, la roche noire et sinistre, le froid mordant ravageaient le moral des assiégés, autant que les privations. Le col de la Peyre était fermé ; l’approvisionnement ne passait plus les lignes qu’irrégulièrement et l’on avait faim. Mais les rigueurs hivernales avaient calmé l’ardeur batailleuse des assaillants. Les escarmouches se faisaient rares. Chacun se pelotonnait au coin du feu. Glacées de mauvais vent, les sentinelles battaient la semelle et la surveillance se relâchait.

    « Alerte ! Alerte ! Ils ont pris le roc de la Tour ! » Le garde ensanglanté venait de réveiller le fortin. En un clin d’oeil, les défenseurs quittèrent la douceur tiède de leur paillasse pour gagner la cour. Les soldats du roi venaientde s’emparer d’une tour isolée, à l’est du plateau, après avoir égorgé la garnison. Hugues des Arcis avait engagé un groupe de montagnards gascons qui, avec une folle témérité, avaient escaladé, de nuit, le pog, par la face la plus escarpée, s’accrochant désespérément aux roches verglacées. Mètre après mètre, ils avaient progressé le long de la paroi verticale, la bouche fermée d’un bâillon de tissu, afin que l’on n’entende pas les cris de ceux qui tombaient dans le vide. Dans le noir absolu d’une nuit sans lune, le poignard au côté à l’abri d’un fourreau de cuir, ils semblaient suspendus dans le néant d’avant la création. Au matin, lorsque les premiers rayons du jour éclairèrent la scène, certains d’entre eux, en découvrant le chemin emprunté, virent leurs cheveux blanchir d’un coup. Sans un regard pour les sentinelles exécutées, ils lancèrent des cordes pour aider les archers à prendre position sur la plate-forme.
    « Ils ont pris pied sur le plateau ; nous sommes perdus », murmura Pierre Roger de Mirepoix.
    Les Parfaits s’abîmèrent en prières. Habitué aux sièges et fin connaisseur de la tactique militaire, Bernard évalua la situation, mesura le danger et l’urgence d’une action décisive. Cela faisait des mois qu’il balançait entre le désir de se battre et l’aspiration au salut de son âme. Avec le danger immédiat, le monde terrestre l’attirait irrésistiblement. Déjà, l’idée d’abandonner les siens pour sauver Alix s’était tout entière emparée de lui. Trahir sa mission, son devoir, par amour pour elle ! Alors abandonner toute espérance divine pour faire ce qu’il faisait le mieux : se battre, ne lui prit que quelques instants de
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