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Le spectre de la nouvelle lune

Le spectre de la nouvelle lune

Titel: Le spectre de la nouvelle lune
Autoren: Marc Paillet
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les pas, cependant, y étaient mieux assurés que sur le sentier des marais et on ne risquait plus la noyade. Enfin le village de Longoret ( 4 ) fut en vue, puis l’abbaye Saint-Pierre. Timothée et le frère Antoine, assistants du missus, ainsi que Sauvat, garde impérial, faisaient le guet, anxieux, devant le portail du monastère. Quand ils virent les « rescapés » franchir, courbés sous les rafales, le pont sur la Claise situé à une centaine de pas de l’entrée, ils se précipitèrent vers eux à la tête d’une escouade de serviteurs portant torches et lanternes, tandis qu’un moine allait prévenir son supérieur, l’abbé Mainfroi, en religion père Ferréol.
    Rafanel, pressé de regagner sa chaumière, afin, dit-il, de rassurer les siens, prit immédiatement congé de l’abbé Erwin qui lui renouvela ses remerciements. Il refusa les quelques pièces qu’on lui tendait.
    — Je fais payer mes sabots, mais non les services que je dois au missionnaire du roi, lança-t-il.
    — C’est ça, gronda le viguier, dépêche-toi d’aller retrouver tes pareils !
    L’abbé Ferréol, cependant, était accouru pour saluer le retour du missus dominicus.
    — Ah ! seigneur, s’écria-t-il, comment te dire… Quelle ne fut pas notre anxiété !… Avec tout ce qui est advenu dans ce pays… Oh ! tant de drames, tant de crimes même, tant de sacrilèges ! C’était folie, je te l’assure, que de vous aventurer dans le marais par un soir pareil, sous une telle tempête.
    — Folie ?
    — Je veux dire, seigneur, que c’était si dangereux, si risqué… Et avec comme guide ce sabotier, ce Rafanel, homme sombre et sournois ? Ah ! il connaît trop le marécage pour ne pas s’être acoquiné avec les pires forbans, gredins sans foi ni loi ! Je vous avais, hélas ! prévenu…
    — Ce serait lui prêter trop de puissance, me semble-t-il, laissa tomber le Saxon, que d’en faire le maître de la tempête. L’ayant subie, comme nous, il nous a néanmoins menés à bon port.
    — Oui, oui, sans doute, concéda l’abbé Ferréol. Mais nous n’avons pas ménagé nos prières, combien ferventes, en vérité.
    — Voilà donc le secret de notre salut ! commenta, imperturbable, Erwin.
    — Elles ont été exaucées et, enfin, vous voici ! Des vêtements chauds et une collation roborative vous attendent près…
    — Ne convient-il pas d’abord que nous rendions grâces au Très-Haut pour avoir exaucé vos prières ? coupa le Saxon.
    L’abbé, observant l’eau qui dégoulinait des vêtements de ceux qui venaient d’arriver, s’exclama :
    — Comment cela ? Mais trempés et transis comme vous l’êtes ? Et dans cette chapelle qui est glaciale ?
    — Dieu réchauffe les corps et les cœurs ! rétorqua Erwin qui, suivi par son assistant et, avec réticence, par le viguier, gagna à grandes enjambées le lieu saint pour une prière à laquelle se joignirent Timothée, le frère Antoine, Sauvat et l’abbé Ferréol lui-même.
    Dans un petit réfectoire où le supérieur du monastère recevait notables et hôtes illustres, près d’une cheminée où flambaient d’énormes bûches, des vêtements secs étaient à la disposition des arrivants qui purent se changer. Le missus et ses aides prirent place autour d’une table sur laquelle des serveurs placèrent des pâtés, des perches et carpes en sauce, des viandes bouillies puis rôties, des lentilles au lard ainsi que des cruches de vin, sans oublier un flacon d’hydromel pour le Saxon. Contrairement à ce qu’il attendait, Guntran ne fut pas invité à partager cette collation. Erwin ne tenait pas à ce qu’il eût connaissance des démarches qu’il prévoyait.
     
    La mission que le comte Childebrand et l’abbé Erwin avaient entreprise dans le Berry leur avait été confiée formellement par Louis, roi d’Aquitaine, de qui dépendait ce pays. En fait, elle avait été décidée par son père, Charlemagne, qui en avait dicté lui-même les instructions. Elles demandaient à ses missi dominici « de mettre fin au plus tôt aux méfaits, forfaits et toutes entreprises aussi répugnantes qu’odieuses, qui insultaient le Ciel, ensanglantaient la terre et troublaient les esprits, à grand dommage pour Ordre et Paix ». « Vous n’aurez de cesse, ajoutait l’empereur, que vous n’ayez découvert et saisi les coupables, bandits et assassins, que vous n’ayez fait bonne et prompte justice, pour quoi vous recevez de moi tout pouvoir et de quoi vous me rendrez
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