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Le souffle de la rose

Le souffle de la rose

Titel: Le souffle de la rose
Autoren: Andrea H. Japp
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physiologiques qui surviennent chez la douce gent ?
    — Je ne sais... Je n’aurai jamais de barbe et il existe
une différence anatomique majeure qui permet de reconnaître une fille d’un
garçon, proposa l’enfant.
    — C’est bien ce que je craignais. Eh bien, commençons
par cela... la cosmogonie peut attendre !
    La panique avait remplacé le saisissement. Les larmes aux
yeux, Clément supplia d’un ton presque inaudible :
    — Nul ne doit l’apprendre, maître. Nul.
    — J’avais bien compris. Ne t’inquiète. Nous sommes
maintenant liés par de dangereux secrets en plus de notre inextinguible soif de
savoir.
    L’oreille aux aguets, ils se tournèrent en même temps vers
la porte qui s’entrouvrait. Ronan avança de quelques pas et s’excusa :
    — J’espère ne pas vous interrompre dans quelque
expérience, messire médecin.
    — Non pas. Tout juste une démonstration que nous
venions d’achever.
    — Monseigneur Artus mande le jeune Clément.
    — Eh bien, mon garçon, va. Le comte requiert ta
présence. Ne le fais point attendre.
    — Merci, maître.
    — Tu me reviendras dès que notre seigneur le jugera
souhaitable. Nous n’en avons pas terminé pour aujourd’hui.
    — Bien, messire.
    Le comte travaillait dans la bibliothèque en rotonde qu’il
affectionnait tant. À l’entrée de Clément, il leva la tête des registres qu’il
consultait et remercia Ronan d’un geste amical.
    — Tudieu... ce travail d’intendant me gâche l’humeur,
marmonna-t-il. Et pourtant, je devrais être satisfait et reconnaissant :
nous avons évité le pire, les moissons ont été bonnes, et le vêlement plus
propice que l’année précédente.
    Il termina sa ligne et Clément remarqua l’élégance de sa
cursive [7] .
C’est alors qu’un détail lui revint : l’écriture carrée du carnet. Il s’agissait
de rotunda, lettres de somme réservées aux traités scientifiques, juridiques ou
théologiques, bref aux connaissances transcrites en latin. Si ce graphisme
appartenait bien au chevalier de Rioux ainsi qu’il l’avait toujours soupçonné,
celui-ci était-il un des théologiens de son ordre ? En quoi ce détail
pouvait-il faire avancer Clément ? Il l’ignorait et pourtant, un instinct
le prévenait de son importance.
    Le comte reposa sa plume sur le bel encrier d’argent en
forme de coque de navire posé en face de lui. Son visage déjà sombre se crispa
et l’appréhension assaillit l’enfant. Quelle nouvelle retenait-il pour hésiter
de la sorte ? D’une voix altérée qu’il tentait sans grand succès de
maîtriser, le comte lâcha :
    — Madame de Souarcy est arrivée en la maison de l’Inquisition
d’Alençon. Elle y est détenue en murus strictus.
    Clément se laissa aller contre le rayonnage d’un meuble de
bibliothèque, incapable de respirer. Il lui sembla qu’un tremblement l’agitait
de la tête aux pieds. Peut-être n’était-ce que son imagination. Une main ferme
l’agrippa par la tunique au moment où il se sentait glisser vers le sol. Il se
retrouva assis, sans trop savoir comment, dans l’un des petits fauteuils qui
ponctuaient la circonférence de la pièce.
    — Pardon, monseigneur, bafouilla-t-il en se remettant
de son étourdissement.
    — Non, pardon à toi. À force de ne vivre qu’avec des
hommes et des fermiers, la douceur et la diplomatie me font défaut, je le
crains. Demeure assis, conseilla-t-il comme Clément tentait de se lever. Tu es
encore jeune, mon garçon... Pourtant, tu n’ignores pas que certains êtres
doivent quitter l’enfance plus prématurément que d’autres. Je te demande de
réfléchir et de fouiller ton souvenir. C’est vital. Tu m’as expliqué que ce
vaurien d’Eudes de Larnay et sa servante acolyte étaient derrière la
machination qui a permis à l’Inquisition d’arrêter madame Agnès. Elle aurait
hébergé une hérétique sans le savoir, cette...
    — Sybille.
    — C’est cela.
    Clément se mordit la lèvre et avoua soudain :
    — Il s’agissait de ma mère.
    Le comte le dévisagea avant de murmurer :
    — Voici donc pourquoi madame Agnès tenait tant à t’éloigner
de son entourage.
    Une douceur incongrue se fraya un chemin dans la peur qui
habitait Artus depuis des jours. Il avait connu des hommes, des soldats, qui
auraient remis l’enfant aux mains des inquisiteurs pour s’épargner un dangereux
procès. Mais elle, une femme, sans appui  – du moins le croyait-elle
 – leur
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