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Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate

Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate

Titel: Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate
Autoren: Emma Locatelli
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conseiller, le tenant sous l’emprise de l’éclat furieux dont luisaient ses yeux.
    — Et ce n’est pas tout, poursuivit-elle d’une voix tranchante, il faut aussi dénoncer sa mollesse, sa veulerie, son avarice et sa cruauté ! Oui, sa cruauté ! Nous allons répandre le bruit que sa férocité est sans limites, ce qui achèvera de lui aliéner l’armée !
    — La rumeur court déjà, répliqua Gannys. Nos émissaires ont fait savoir aux soldats de la légion gauloise que Macrin avait la ferme intention de rétablir une discipline de fer dans l’armée.
    — Parfait.
    — Nous leur avons raconté, ajouta Eutychianus, que leur nouveau César attachait les soldats désobéissants à des cadavres, face contre face, bouche contre bouche, et qu’il les laissait périr ainsi. Nous les avons aussi épouvantés en leur affirmant que Macrin faisait brûler vifs tous les légionnaires coupables d’adultère, ou encore qu’il les enfermait vivants dans le ventre d’un bœuf…
    — Quelle imagination ! le félicita la princesse. Que l’on fasse également savoir aux soldats que ses caisses sont vides et qu’il ne paiera bientôt plus les soldes. Mais qu’on leur dise, en revanche, que Maesa Bassiana croule sous l’or et qu’elle est prête à le leur offrir, en échange de leur loyauté.
    Elle médita un instant puis ajouta :
    — Il faut les acheter : voilà comment nous nous attirerons leur sympathie ! Souviens-toi de ce que disait Septime Sévère à ses fils : « Enrichissez les soldats et moquez-vous du reste ! » C’est exactement ce que nous allons faire.
    Gannys observait la princesse syrienne d’un œil sagace tandis qu’elle parlait.
    À Rome, où elle avait passé ces vingt-quatre dernières années, Maesa n’avait pas seulement développé son talent naturel pour l’intrigue. Elle avait aussi acquis une aisance remarquable, un maintien incomparable, qui s’exprimaient dans ses manières, son allure, dans sa façon de se mouvoir et de se vêtir, toujours sans ostentation ni mauvais goût.
    Comme tous les jours, elle portait une sobre mais élégante tunique de lin à manches longues, de couleur sombre, qui retombait en une cascade de plis raides et majestueux jusqu’à ses pieds. Sa robe, que ne couvrait aucune broderie, aucune fantaisie, était resserrée à la taille par une ceinture et ne s’ornait, dans le bas, que de petits fils torsadés.
    Ses pieds étaient chaussés de simples sandales fermées, en cuir souple, qui remontaient sur la cheville. À ses oreilles, à son cou, à ses bras, l’austère princesse syrienne ne tolérait jamais de bijoux, ni de gemmes. Mais sur son front, qui commençait à porter les stigmates d’une vieillesse apparue trop tôt à son goût, elle arborait un magnifique diadème en or qui rappelait à tous son ascendance royale.
    Sachant qu’elle ne pouvait plus, désormais, exercer aucune séduction, elle s’évertuait néanmoins à masquer ses défauts le plus subtilement possible. Avec l’âge, ses cheveux étaient devenus plus fins et plus rares. Aussi, depuis quelques mois, portait-elle des nattes postiches, que sa coiffeuse devait d’abord fixer en haut de son crâne puis relever en bourrelets sur ses tempes et sur son front dégarni. Le lait d’ânesse n’ayant plus aucune vertu sur son teint, qui avait perdu son éclat, elle avait également pris l’habitude d’étaler sur ses joues, en touches discrètes, un peu de craie mêlée à de la céruse.
    Désormais, les plus nobles matrones italiennes pouvaient la regarder sans sourire. Elle n’était plus une Sémite revêtue tant bien que mal d’un vernis de civilisation, elle était romaine au plus profond de son être. Non seulement elle avait définitivement perdu les inflexions exotiques de son accent syrien, mais plus rien en elle ne rappelait ses origines orientales, ni le langage, ni les manières, ni l’esprit.
    Maesa crispa ses sourcils clairsemés dont elle avait redessiné la ligne d’un trait de charbon noir.
    — L’appât du gain, voilà aujourd’hui la seule chose qui attire les soldats romains, lâcha-t-elle avec un léger mépris. Faisons renifler à ces légionnaires l’or des Bassianides et ils viendront par centaines se faire acheter.
    Pour la première fois depuis le début de leur conversation, Gannys Eutychianus se surprit à sourire.
    — J’en suis certain, confirma-t-il en plissant les yeux d’un air entendu. Préparons-nous à les voir
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