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Le roi d'août

Le roi d'août

Titel: Le roi d'août
Autoren: Michel Pagel
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sa maison ne s'étaient précipités à sa rescousse. Tandis que les uns empêchaient les adversaires de l'atteindre, les autres l'aidaient à se remettre sur pied, lui amenaient un deuxième cheval.
    Le même genre de scène se reproduisait un peu partout, chaque grand baron étant environné de ses propres vassaux qui s'efforçaient de ne pas le quitter durant le combat. On se battait par clan, par maison, par famille.
    Eudes, furieux d'avoir été désarçonné, empoigna son épée, piqua des deux et se jeta de plus belle dans la mêlée, fendant d'un coup monumental le heaume d'un chevalier flamand et le crâne qu'il recouvrait. Un peu à l'écart, le comte de Saint-Pol et ses hommes reprenaient leur souffle avant de lancer un nouvel assaut. Plus loin, très droit sur sa selle, vêtu de sa seule chasuble et désarmé, le frère Guérin suivait la progression de l'engagement, envoyant parfois les soldats qui se tenaient près de lui transmettre un ordre sur le terrain. De ce côté-ci, aucun avantage ne se dessinait encore, mais compte tenu de la supériorité numérique flamande, c'était un résultat honorable. Champenois et Bourguignons avaient déjà donné plus qu'on n'eût été en droit d'exiger d'eux et ils devaient continuer leur effort : s'ils tenaient, on pourrait se permettre d'espérer.
     
    L'évêque de Beauvais demeurait en retrait depuis le début de la bataille, attendant pour intervenir que se présentât un adversaire dont l'importance justifiât aux yeux les plus sévères la transgression de ses vœux. Son regard s'alluma sous son heaume quand lui apparut le comte de Salisbury, Guillaume Longue-Épée, qui avait su faire naître son antipathie à l'époque où il était prisonnier de Jean sans Terre. Plantagenêt ou bâtard de Plantagenêt, c'est du pareil au même, songea le prélat en empoignant sa masse d'armes et en éperonnant son cheval.
    Guillaume, un véritable géant, tenait son surnom de ses armes, adaptées à sa taille. Ce fut cependant sans l'ombre d'une hésitation que l'évêque lui courut sus. Il le fallait, d'ailleurs : profitant d'une défaillance de la chevalerie française, Salisbury arrivait à la tête d'une troupe importante dans l'évidente intention d'enlever le pont sur la Marcq, coupant ainsi l'unique retraite de l'ost royal. Les massiers, quatre cents au total, se feraient tuer sur place plutôt que de céder un pouce de terrain mais, seuls, ils n'avaient aucune chance de l'emporter.
    — À moi, Longue-Épée ! s'écria le prélat. Contemple le bras qui te bénis !
    Le demi-frère de Jean sans Terre frappa le premier. Son adversaire évita habilement l'épée qui le visait et riposta sans attendre : maniée par un bras que l'approche de la soixantaine n'avait pas privé de sa force, la masse s'écrasa sur le heaume de l'Anglais, qui vacilla. Deux autres coups rapprochés achevèrent le travail : Salisbury vida les étriers et s'effondra dans la poussière – ironiquement les bras en croix. Un rire tonitruant échappa à l'évêque, lequel ne songeait pas à s'arrêter en si bon chemin : son ardeur guerrière retrouvée, il laissa sa suite s'emparer de l'adversaire vaincu pour plonger dans la mêlée, assommant ici, disloquant là, n'oubliant jamais de bénir ceux qu'il envoyait rejoindre leur créateur. Dans son sillage, son frère Robert et les chevaliers de leur maison suivaient son exemple, harcelant les mercenaires anglais.
    Près du pont, les massiers tenaient bon.
     
    Les piques et les poignards se brisaient sur son haubert, il écartait les coups d'épée ou de masse à l'aide de son bouclier, sa propre épée semait la mort plus vite que l'ange exterminateur, mais ses assaillants étaient trop nombreux. Ce fut un des plus méprisables qui eut raison de lui : l'homme maniait un crochet monté au bout d'une longue hampe, un de ces outils n'ayant d'autre utilité que de faire choir les cavaliers. Il parvint à l'insérer entre le capuchon de mailles et le haubert de Philippe, qui s'arc-bouta sur ses étriers mais se trouva dès lors en fâcheuse posture. Finalement, son cheval trébucha et s'effondra, le projetant hors de sa selle.
    Le roi poussa un cri de colère plus que de peur, quoique sa vie fût désormais menacée : alourdi par son armure, étourdi par sa chute, il ne put empêcher des dizaines de mains de le plaquer au sol, de chercher à lui arracher son heaume, de le larder de coups de poignard à la recherche d'un défaut dans les
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