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Le Pré-aux-Clercs

Titel: Le Pré-aux-Clercs
Autoren: Michel Zévaco
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noblesse, mes amis et moi, nous vous supplions d’agréer nos humbles excuses et de pardonner un moment de folie…
    – Je vous assure, messieurs, que j’ai déjà perdu le souvenir de ce qui s’est passé entre nous. »
    C’était dit sur un tel ton que, arraché enfin à sa rêverie par le son de cette voix mélodieuse, Ferrière admira à part lui :
    « Jamais je ne vis attitude plus noble et plus gracieuse ! »
    Pourtant, il faut croire qu’un travail sourd, obstiné, se faisait dans cet esprit désemparé – à son insu peut-être –, car il se raidit, et, soudain très froid, il se railla lui-même, intérieurement, avec une sorte de fureur concentrée.
    « Ça, Ferrière, tu perds la tête, décidément !… Mais malheureux, tu oublies que cette fille est une coureuse de rues qui s’abandonnera, un jour ou l’autre, au premier venu… qui saura y mettre le prix. »
    Et, chose étrange, en prononçant ces paroles au fond de lui-même, il grinçait des dents, tandis qu’une lueur rouge s’allumait dans son œil doux et que sa main se crispait sur la poignée de sa rapière.
    Pendant ce temps, les trois jeunes gens complimentaient, avec un air de sincérité auquel on ne pouvait se méprendre :
    « Vous êtes, madame, la générosité même.
    – Aussi bonne que belle… Aussi belle que sage. Car, Dieu merci, nous savons comme tout le monde, à Paris, que votre vertu est inattaquable.
    – Nous n’oublierons plus désormais que vous êtes digne de tous les respects. »
    Et Ferrière, qui écoutait avec une attention passionnée, Ferrière songeait, dans le désarroi de son esprit :
    « Sa vertu inattaquable !… connue de tous !… Est-il possible que cette fille soit vraiment digne de tous les respects, comme ils le disent ? »
    Elle accepta les compliments sans sourciller, en femme qui a conscience de sa valeur morale. Et elle eut une légère inclination de la tête qui était un congé. Ils le comprirent ainsi car ils s’écartèrent, après un dernier salut respectueux.
    Les différents personnages qui avaient assisté au combat se disséminèrent, s’éloignèrent lentement dans différentes directions. Deux curieux s’approchèrent, offrirent obligeamment leurs services. Ils se chargèrent de Roquebron qui ne pouvait pas marcher, tandis que Bonneval et d’Abancourt se chargeaient du cadavre de Saint-Solin.
    Le groupe funèbre se dirigea vers le moulin qui était plus près que l’auberge. Fiorinda et Ferrière demeurèrent seuls. Elle suivit ce groupe d’un long regard douloureux et murmura d’une voix étranglée par l’émotion :
    « Pour moi… à cause de moi, un homme est mort ! C’est affreux !
    – Il avait porté la main sur vous !… »
    Elle vit qu’il était sincère.
    « Vous avez exposé votre vie pour une inconnue, monsieur. Je voudrais connaître le beau langage des dames de la cour pour vous exprimer ma gratitude dans les termes élevés qui conviennent à une si noble action. Mais je ne suis qu’une fille des rues, sans famille, sans amis, sans fortune, sans même un nom à moi. Et je ne puis que vous dire, oh ! du plus profond de mon cœur, soyez remercié, monsieur.
    – Oh ! mademoiselle, fit-il avec insouciance, ne parlons plus de cela. La chose n’en vaut pas la peine.
    – J’ai vu l’inégale lutte !… la lutte épique !… l’irrésistible ruée d’un seul contre cinq !… le tourbillon flamboyant d’une invincible épée !… les rudes coups assenés !… J’ai vu, monsieur, j’ai vu !… Et cet inoubliable spectacle demeurera éternellement gravé dans ma mémoire. »
    Devant cet enthousiasme débordant, il s’inclina en rougissant. Elle se calma, et, lui tendant la main dans un mouvement irréfléchi, de sa voix douce, caressante :
    « Chaque jour, je prierai Dieu, la Vierge et les saints qu’ils vous accordent tout le bonheur auquel vous avez droit, monsieur le vicomte de Ferrière. »
    Il prit cette petite main si fine, si blanche que plus d’une grande dame eût enviée, et la garda un instant entre les siennes. Elle le vit troublé, hésitant comme s’il avait quelque chose à dire qu’il n’osait pas ou ne savait pas exprimer. Une lueur de malice pétilla dans ses yeux. Elle dégagea doucement sa main et avec une douceur qui le remua jusqu’au fond des entrailles :
    « Adieu, monsieur », dit-elle.
    Elle s’éloigna déjà.
    Brusquement, il se décida. Il la rejoignit en deux enjambées,
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