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Le Pacte des assassins

Le Pacte des assassins

Titel: Le Pacte des assassins
Autoren: Max Gallo
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paysage bucolique de la
Bavière.
    Julia écrit :
    « Les nuits à venir seront aussi pour
nous celles des longs couteaux. »
    Elle dit de l’homme qui s’est installé à ses
côtés qu’il est « l’envoyé du loup aux yeux jaunes ».
    La frontière russe franchie, ils sont seuls
dans un wagon qui leur a été réservé et que gardent des soldats aux parements
verts du NKVD.
    « Je suis la
camarade Garelli-Knepper.
    Moscou. Limousine. Couloirs du Kremlin. Le
loup en face de moi, son regard insaisissable, mais je sais que ses yeux sont
jaunes.
    — Ce Karl von Kleist, tu crois qu’il a
transmis le message ?
    Tout en m’interrogeant, Staline fait glisser
les papiers qui encombrent son bureau.
    — Tu as payé le prix qu’il fallait.
    Staline s’interrompt.
    — Mais ça ne t’a pas beaucoup coûté, je
crois…
    Il sourit, dodeline de la tête, débonnaire.
    Il montre la photo d’un couple marchant à pas
lents le long de la Riva degli Schiavoni.
    — Oublions tout cela, n’est-ce pas, message
et promenade… »
    Julia retrouve l’hôtel
Lux, son écriture change, irrégulière, secouée, brisée par l’angoisse :
    « Silence. Couloirs où ne passent que des
ombres. Heinz ne m’interroge pas, comme s’il savait que je suis dépositaire d’un
secret maléfique.
    Je l’observe cependant qu’il va et vient dans
la chambre, tête penchée, visage amaigri, cheveux tout à fait blancs. C’est un
arbre mort qui n’a plus d’âme et il suffirait d’une poussée pour que l’écorce s’effrite,
que le tronc ne soit plus que poussière.
    Mais peut-être pour Heinz ai-je la même
apparence fantomatique ? Nous ne nous touchons plus, comme si l’un et l’autre
craignions de découvrir ce que nous sommes devenus.
    Un matin il me chuchote, regardant autour de
lui comme s’il avait peur que quelqu’un ne soit dissimulé dans la chambre, mais
sans doute pense-t-il que des micros ont été placés dans chaque pièce de l’hôtel
Lux :
    — J’attends, dit-il, ce peut être dans
une heure ou une semaine, dans un jour ou un an. Mais ses yeux jaunes sont
fixés sur moi. Je voudrais qu’ils ne te voient pas. Mais qui peut t’oublier, comtesse
Garelli, camarade Julia ?
    Il s’est approché de moi, j’ai cru qu’il
allait m’enlacer, mais ses bras, qu’il avait commencé à lever, sont retombés.
    Il m’a semblé qu’il ne voulait pas raviver en
lui le désir et donc l’espoir.
    Mais peut-être les agents des “Organes”, sur
ordre de Staline, lui avaient-ils montré la photo de ce couple marchant le long
de la Riva degli Schiavoni, et avaient-ils ainsi achevé de le désespérer ?
    Il m’a longuement dévisagé, puis a murmuré :
    — Julia, essaie de ne pas ressembler à
cette femme, celle du tableau, tu te souviens ?
    Et il est parti, son petit cartable noir sous
le bras.
    « Il y a, dans
l’escalier qui conduit à ma chambre, dans le palais Garelli, le tableau de l’une
de mes aïeules, la comtesse Elisabeth Garelli, qui a vécu au XIV e siècle.
    Nous étions déjà l’une des familles les plus
puissantes de Venise. Le peintre Vasco Morini l’a représentée debout, grandeur
nature, vêtue d’une robe de soie brochée. Ses cheveux et ses yeux sont d’un
noir brillant, mais sa peau est d’une blancheur de spectre. Derrière elle, une
jeune fille étendue dont le sang s’écoule d’une large plaie qui entaille sa
gorge.
    Quand j’étais enfant, mon frère Marco me
répétait que je ressemblais à cette comtesse cruelle qui avait découvert qu’à
se baigner dans le sang de jeunes vierges, la peau devenait de plus en plus
soyeuse, de plus en plus blanche. Alors elle avait fait construire un pressoir
pour extraire le sang des jeunes filles qu’elle faisait enlever sur les
placettes et dans les ruelles de Venise, voire dans les campagnes de la Terra
Ferma.
    Et chaque jour les corps étaient pressés, et
le sang coulait jusqu’à cette vasque de marbre qu’on apercevait dans l’un des
angles, au bas du tableau, cercle blanc, tache rouge dans la pénombre.
    Qui suis-je ?
    Celle qui se baigne dans le sang des jeunes
vierges, la comtesse Elisabeth Garelli réincarnée, ou bien l’une de ses
victimes ?
    Et le loup aux yeux jaunes, et l’homme aux
doigts potelés font tourner la roue du pressoir qui nous écrase, moi, Heinz, ainsi
que des millions d’autres. »

3.
    J’ai vu ce tableau.
    Dans la pénombre du palais Garelli, j’ai
longuement contemplé le
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