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Le livre du magicien

Le livre du magicien

Titel: Le livre du magicien
Autoren: Paul C. Doherty
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de bois renforcée de gros clous. Le Roi des Clefs s’accroupit et, ordonnant à voix basse à Bolingbroke de rapprocher la torche, il vida son sac empli de petites tringles et d’instruments qui ressemblaient à des clés. Il resta là un instant, agenouillé, grommelant dans sa barbe, jurant dans le patois des ruelles misérables du quartier Saint-Antoine.
    — Y parviendrez-vous ? s’inquiéta Bolingbroke à voix basse.
    Le Roi des Clefs cessa de farfouiller et eut un grand sourire qui dévoila sa dentition ébréchée.
    — Qu’il s’agisse du tabernacle de Saint-Denis ou du Trésor du roi Philippe, il n’est point de serrure à Paris que je ne puisse forcer.
    Il montra l’un de ses outils.
    — Il n’y a pas de serrure qui puisse résister à ça ; ce n’est que le manque de lumière qui me gêne.
    Comme pour prouver ses dires, il inséra la petite tringle et Ufford, soulagé, soupira en entendant le cliquetis espéré.
    La porte s’ouvrit. La pièce n’était qu’une cellule aux murs chaulés dont le plafond, aux épaisses poutres noires, ne s’élevait qu’à quelques pouces au-dessus de leurs têtes. Tout autour on avait rangé des coffres, des arches et des coffrets : les trésors de Maître Thibault. Bolingbroke, s’en désintéressant, entraîna ses compagnons vers un lourd coffre cerclé de fer, bleu foncé et orné de fleurs de lis dorées. Il possédait trois serrures sur le devant et une de chaque côté. Le Roi des Clefs le tira vers lui et l’examina avec curiosité.
    — Que contient-il ? Une rançon de roi ?
    — Le Secretus secretorum, répondit Ufford.
    — Quoi donc ?
    — La Voix de Dieu, expliqua Ufford.
    Le Roi des Clefs recula.
    — Il ne s’agit pas de magie noire, n’est-ce pas ? Il ne contient ni racine malfaisante ni livre de charmes ? Messieurs, je redoute la magie.
    — Il ne s’agit point de magie, le rassura Ufford, mais de savoir. C’est un manuscrit des écrits secrets de frère Roger Bacon, jadis érudit en Sorbonne.
    L’homme éclata de rire.
    — Quoi ? Vous m’avez engagé, moi le Maître des Serrures, le Roi des Clefs, pour voler le manuscrit d’un franciscain ?
    Ufford posa la main sur sa dague.
    — Vous avez été payé fort cher, Monsieur, qui que vous soyez. Une pièce d’or pour profiter de vos services, deux pour ouvrir ce coffre et deux autres quand nous nous quitterons. En ce moment, en haut, Maître Thibault chevauche sa jouvencelle pendant que ses hôtes se mettent au fait de tous les péchés de la chair. Hâtez-vous donc.
    Le Roi des Clefs retourna vers le coffre. Bolingbroke alla fermer les portes et s’assurer que tout allait bien. Ufford s’accroupit contre le mur, ordonnant à son estomac de se calmer et à sa sueur de se refroidir.
    Il ne cessait de regarder le Roi des Clefs qui, ayant à présent ôté ses mitaines de cuir, caressait les serrures comme il l’aurait fait de la chevelure de son amante (ont en gloussant sous cape.
    — C’est l’ouvrage d’hommes de métier, déclara-t-il en s’avançant vers Ufford.
    — Domine miserere ! murmura ce dernier. Ils en réclament toujours davantage.
    Il lança un regard furieux au bonhomme, remarquant à quel point ses jambes étaient minces et filiformes dans les sombres chausses de laine, à quel point ses pieds semblaient flotter dans les bottes à talon plat.
    — Deux pièces d’or supplémentaires, annonça le Maître des Serrures en tendant les mains.
    Ufford lança un coup d’oeil à Bolingbroke, qui ouvrit son escarcelle et tendit l’argent. Ufford leva son arbalète, ôta le capuchon du carquois et prit l’un des carreaux barbelés qu’il encocha dans la rainure polie. Le Roi des Clefs, pourtant, se contenta d’empocher l’or, de faire un clin d’oeil et de reprendre sa besogne.
    — J’espère que vous parviendrez à l’ouvrir ! s’exclama Ufford. Soit vous y arrivez et nous partons avec ce manuscrit, soit...
    — Ne me menacez pas, rétorqua l’homme qui s’affairait maintenant sur une autre serrure.
    Ufford se tut. Tout en serrant l’arbalète, il se pencha en arrière et contempla le plafond. Il lui tardait que la soirée soit passée. Comme il serait agréable de retourner en Angleterre pour recevoir les louanges et les récompenses dispensées par Sir Hugh Corbett, garde des Secrets du roi ! Il sourit dans sa barbe. Il aimait bien Corbett, homme taciturne, bon maître sans aucune illusion sur le grand Édouard d’Angleterre.
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