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Le livre du magicien

Le livre du magicien

Titel: Le livre du magicien
Autoren: Paul C. Doherty
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parfums bon marché. Les yeux brillaient, les doigts s’agrippaient à ses vêtements. Ceux qui désiraient regarder la danse et se joindre à l’assemblée qui encerclait de plus en plus étroitement les Salomé cabriolant le poussaient et le bousculaient. Quand la danse s’interrompait, celui qui avait gagné la faveur des jouvencelles pouvait jouir de leur corps.
    Ufford ne se sentait pas très bien et tenta de refréner la panique qui s’emparait de lui. Il y avait là des docteurs en droit, des maîtres de logique, des professeurs de théologie qui laissaient libre cours, en cette folle soirée, à leurs moindres caprices et à leur passion. Il était certain d’avoir reconnu Destaples et Vervins, si faciles à identifier grâce à leur haute taille. De l’autre côté de la salle, comme s’il voulait garder ses distances avec l’orgie, était assis Louis Crotoy. Le corpulent Pierre Sanson tira Bolingbroke par la manche, mais fut repoussé. Ils réussirent enfin à traverser la pièce et parvinrent sous l’estrade des trouvères et dans les cuisines. Les fêtards s’y étaient introduits furtivement pour étancher leur soif et voir s’ils ne pourraient dérober aux serviteurs et aux marmitons un supplément de vin. Partout des domestiques s’affairaient, qui à nettoyer les billots ensanglantés, qui à se goberger des reliefs du banquet. Personne n’accorda grande attention à Ufford ni à Bolingbroke quand ils se dirigèrent vers la cour dallée, un endroit sombre et humide puant l’écurie à plein nez. Bolingbroke s’y faufila, Ufford sur ses talons dans l’ombre, ouvrit la grille de la poterne percée dans le haut mur d’enceinte et siffla doucement dans l’obscurité. On siffla en retour. Ufford, scrutant les ténèbres, distingua une silhouette qui se déplaçait et le Roi des Clefs s’approcha. Bolingbroke verrouilla aussitôt la porte et les trois hommes s’accroupirent dans le noir.
    Le Roi des Clefs était sec comme une trique. Ses cheveux, blanchis avant l’âge, séparés par une raie médiane, lui tombaient sur les épaules. Ufford fut fasciné par son visage si particulier : émacié, le menton pointu, il évoquait un V ; ses yeux étaient très rapprochés et il avait un nez crochu sur une petite bouche. Ufford sentit l’odeur et se remémora la remarque de Bolingbroke sur ce maître ès cambriolages, à savoir qu’il détestait les poils sur son visage et sur celui de la personne avec laquelle il traitait. Bien entendu, plus tôt dans la soirée, lui et Bolingbroke s’étaient rasés avec grand soin.
    — Êtes-vous prêt ? interrogea Bolingbroke.
    Le Roi des Clefs jeta un coup d’oeil autour de lui.
    — Êtes-vous seuls ?
    Il parlait un bon anglais d’une voix douce qui détachait chaque mot.
    — Bien sûr !
    — Une pièce d’or ! exigea le Roi des Clefs en tendant la main, le bout de ses doigts dépassant de ses mitaines de cuir noir.
    Bolingbroke s’exécuta. L’homme prit la pièce entre l’index et le pouce, la mordit, se déclara satisfait et retourna à la grille. Il revint chargé de deux sacs de cuir. Il tendit le plus grand à Bolingbroke et attacha l’autre à la ceinture qui enserrait son justaucorps de cuir. Bolingbroke ouvrit son propre sac et en sortit deux ceinturons, garnis, chacun, d’une épée et d’un poignard. Lui et Ufford s’en ceignirent et, replongeant la main dans le sac, Bolingbroke y prit deux petites arbalètes et un solide carquois en cuir plein de carreaux.
    — Nous sommes prêts.
    Ceinturons et arbalètes dissimulés sous leur chape, ils traversèrent la cour à pas de loup et entrèrent dans les cuisines. Les serviteurs se disputaient un juteux morceau d’agneau pendant qu’à l’autre bout de la pièce, un lévrier regardait le coin où il avait l’habitude de se coucher, coin où, à présent, un soiffard était fort occupé à trousser une souillon. Personne ne remarqua les trois nouveaux venus quand ils ouvrirent la porte de la cave et descendirent les marches de pierre mal éclairées. Ils s’arrêtèrent en bas de l’escalier et se regroupèrent. Bolingbroke décrocha une torche des supports fichés dans le mur et les entraîna plus loin dans l’obscurité. De chaque côté il y avait des barriques, des cuveaux et des tonneaux, pour la plupart mis en perce en vue du banquet de la soirée de sorte que, sous les pieds, le sol était glissant. Au bout de la cave, ils parvinrent devant une épaisse porte
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