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Le jour des barbares

Le jour des barbares

Titel: Le jour des barbares
Autoren: Alessandro Barbero
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appelaient les Romains. Sur la base des traités, ces chefs fournissaient
des guerriers en fonction des besoins, et recevaient en échange des cadeaux, des
pensions, et aussi des subsides réguliers pour nourrir leur peuple. L’administration
romaine était plutôt efficace quand il s’agissait d’extorquer aux contribuables
du blé, de l’huile et de la viande à bas prix, puis de redistribuer toutes ces
denrées au gré des exigences de la politique. La population des deux capitales,
Rome et Constantinople, vivait en grande partie de ces distributions gratuites ;
c’était une très lourde dépense pour le trésor, mais une opération
politiquement indispensable, parce qu’en échange l’empereur avait la certitude
de conserver la faveur de l’opinion publique, et d’éviter ce mécontentement
populaire qui était si souvent fatal à un souverain peu avisé.
    L’armée, elle aussi, était nourrie en grande partie grâce à
ces distributions gratuites, qui pouvaient remplacer le paiement de la solde en
argent. Rien de plus naturel, par conséquent, que de fournir également des
subsides en nature aux barbares, quand on voulait qu’ils restent tranquilles. Constantin
avait été le premier à stipuler des accords de ce genre, et dans la mémoire du
peuple goth son nom était cité avec vénération, comme celui d’un grand empereur
auquel les Goths étaient bien contents d’obéir, presque comme s’ils étaient ses
sujets. Libanius aussi dit quelque chose de semblable ; après la mort de
Constantin, observe-t-il, la frontière du Danube était tranquille, et son fils Constance II
n’avait rien à craindre des Goths, qui « traitaient notre empereur comme s’il
était l’un d’eux ». L’image traditionnelle de l’empire avec ses frontières
fortifiées et infranchissables, et du menaçant monde barbare s’agitant au-delà,
commence à devenir beaucoup plus nuancée : les Goths, certes, n’étaient
pas des sujets de l’empereur, ne payaient pas d’impôts, et leur pays n’était
pas gouverné par des fonctionnaires romains ; mais l’armée romaine
employait régulièrement des mercenaires goths, et le flux des salaires et des
subsides avait déjà bouleversé la vie et l’économie des tribus. Après l’accord
passé avec Constantin, les princes, pour nourrir leur peuple, s’étaient
habitués à compter de façon stable sur les expéditions de blé convoyées à
travers le Danube par les embarcations romaines ; et, grâce à l’or gagné
en combattant comme mercenaires, ils achetaient aux marchands romains tout ce
dont ils avaient besoin. Sans s’en rendre compte, les Goths étaient déjà
devenus dépendants de l’empire, à tel point qu’ils n’auraient probablement pas
pu survivre si, pour une raison ou une autre, les Romains avaient suspendu les
paiements.

4.
    La familiarité qui s’était installée entre les Goths et l’empire
eut aussi une autre conséquence de grande portée : les barbares
commencèrent à se convertir au christianisme. Nous ne savons pas grand-chose
des divinités qu’ils adoraient avant de découvrir Jésus-Christ, ne serait-ce que
parce qu’ils observaient, semble-t-il, un silence impénétrable au sujet de
leurs rites ; mais nous savons que ces divinités étaient représentées, ou
incarnées, par des idoles de bois ou de pierre et des objets sacrés, sur
lesquels étaient gravées des inscriptions en caractères runiques. Tous ces
objets avaient une énorme importance rituelle : les chefs qui voulaient
empêcher leurs hommes de se convertir au christianisme les obligeaient à
accomplir les sacrifices devant l’idole de la tribu et à manger la viande des
bêtes sacrifiées ; et, bien des siècles plus tard, un chant nordique
rappellera le souvenir de la guerre des Goths contre les Huns en affirmant que
ces derniers voulaient s’emparer de l’objet sacré des Goths, « la pierre
radieuse sur la plage du Dniepr ». Lorsqu’elle était amenée à se déplacer,
chaque tribu se préoccupait avant tout d’emporter les idoles et les objets
cultuels qui les accompagnaient, confiés à des prêtres et à des prêtresses :
le trésor de Pietroasa, découvert en Roumanie en 1837, et constitué de
vingt-quatre objets d’or, vases, coupes ou ornements sacerdotaux, sans aucun
bijou féminin ni objet d’usage quotidien, nous montre probablement en quoi
consistait la dotation d’un temple ou d’un sanctuaire tribal.
    Le christianisme fut
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