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Le Glaive Et Les Amours

Le Glaive Et Les Amours

Titel: Le Glaive Et Les Amours
Autoren: Robert Merle
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Henri IV admirait, et prodiguant à mains
décloses l’or des Amériques, demeuraient pour le royaume de redoutables
adversaires, et d’autant que la frontière qui nous séparait des Pays-Bas espagnols
se trouvait être si longue, et si faiblement remparée.
    Comme je faisais remarquer à l’un de nos maréchaux que grâce
à l’occupation de la Lorraine et de l’Alsace Louis s’était fortifié à l’Est,
mais que le Nord restait béant, il me dit avec une courtoisie qui cachait mal
une certaine condescendance :
    — C’est vrai, mais outre que pour fortifier notre
frontière du Nord il faudrait un demi-siècle de travaux et plusieurs millions
d’or, notre solide rempart de l’Est exclut du moins que les Impériaux nous
attaquent de flanc tandis que les Espagnols franchissent notre frontière du
Nord.
    — Mais ce ne serait là, dis-je, qu’un demi-bien.
    — Je dirais plutôt, dit le maréchal en tortillant d’un
air hautain sa moustache, que ce ne serait qu’un demi-mal.

 
CHAPITRE II
    La guerre s’implantait dans les esprits avant même d’avoir
fait irruption dans nos vies. En mon hôtel de la rue des Bourbons le babil des
courtines avait pris un tour mélancolique. Non que nos tumultes eussent cessé,
mais les bonaces qui leur succédaient et nous ococoulaient dans les bras l’un
de l’autre, n’étaient plus meshui si apazimantes. Catherine était entrée dans
des inquiétudes qui ne peuvent se dire, prévoyant déjà que Louis m’appellerait
à des missions périlleuses, où bien naturellement je ne pourrais que perdre la
vie, privant Emmanuel de son père et faisant d’elle une veuve déconsolée
jusqu’à la fin de ses terrestres jours.
    — Et pourquoi ? Et pourquoi ? demandait
Catherine avec véhémence. Pourquoi cette guerre du diable ! Parce que les
Français et les Impériaux veulent en découdre au lieu que de s’entendre !
C’est à qui tentera de grappiller le royaume de l’autre.
    — Nenni, m’amie, dis-je vivement, il ne s’agit pas de
grappiller des parts du royaume, mais de montrer les dents au royaume ennemi
par des affronts délibérés. Louis prend Spire, ville impériale. Les Pays-Bas
espagnols prennent Trêves et retiennent prisonnier l’archevêque Philippe de
Sötera, ami et protégé du roi de France. Casus belli aussi évident
qu’insolent.
    — M’ami, de grâce, dit Catherine, qu’est-ce qu’un casus
belli  ?
    — C’est un procédé d’État à État si déplaisant qu’il
peut, selon le code d’honneur des rois et des royaumes, motiver une déclaration
de guerre à l’État qui s’en est rendu coupable. En l’espèce, Louis fit preuve
de patience et de prudence. Il réclama de prime la libération de l’archevêque
aux Espagnols, lesquels refusèrent avec une hauteur si dédaigneuse que le refus
se trouva presque aussi insolent que la capture. Après avoir consulté
Richelieu, Louis déclara alors la guerre en bonne et due forme aux Ibériques,
mais non sans de terribles appréhensions, n’ignorant pas en effet que nos
armées étaient maigrelettes et notre Trésor fort dépourvu. Au surplus,
n’était-il pas prévisible qu’aux Espagnols viendraient se joindre les Impériaux,
lesquels nous gardaient une fort mauvaise dent de ce que le duc de Rohan les
eût chassés de la Valteline [4] .
    « Derrière cette raison-là s’en cachait une autre plus ambitieuse.
Ni les Habsbourg d’Espagne ni les Habsbourg d’Autriche n’avaient renoncé au
rêve d’une royauté universelle qui, seule, leur permettrait d’éradiquer par le
fer et le feu l’hérésie protestante. Et quelle royauté pourrait être considérée
comme universelle tant que la France serait libre ?
    — Dieu bon ! s’écria Catherine avec colère, que
les hommes sont stupides ! Chacun veut la terre de l’autre, et lui arrache
la bourse comme le caïman des grands chemins aux malheureux voyageurs.
    À cet instant on toqua à l’huis, et un mousquetaire aux
couleurs du cardinal apparut, qui me remit un message de son maître. Je rompis
le cachet, ayant peu de doute sur son contenu.
    — Eh bien ! dit Catherine, que vous veut ce prélat
diabolique ?
    — Me confier une mission, m’amie.
    — Et à coup sûr, au diable de Vauvert !
    — Je ne sais.
    — Une mission dont vous ne reviendrez pas, dit
Catherine, pâle et crispée.
    — Babillebahou, Catherine ! Louis ne m’a mie
confié une mission militaire.
    — Vous avez pourtant escaladé de
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