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Le Druidisme

Le Druidisme

Titel: Le Druidisme
Autoren: Jean Markale
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file était davantage un intellectuel, un véritable
druide au sens où nous l’entendons. L’hagiographie irlandaise ne peut pas ne
pas avoir tenu compte de ce glissement, d’autant plus que saint Patrick
lui-même, dans son adolescence, avait été capturé (il était Breton) par des
pirates irlandais et avait été pendant plusieurs années esclave chez un
« druide », autrement dit un opérateur de magie. Patrick savait donc
à quoi s’en tenir. Non seulement il avait dû apprendre certaines techniques auprès
de ce druide, mais en privilégiant les fili au
détriment des druides, il préparait les futurs cadres du christianisme, surtout
du point de vue intellectuel, philosophique, juridique et finalement politique.
    Il ressort de tout cela que la distinction entre druides proprement
dits et fili n’est point affaire de rivalité
ou d’opposition, mais de fonction. Du reste, le rapide passage de l’Irlande
païenne au christianisme dont elle est devenue en quelque sorte le fer de
lance, prouve qu’en définitive c’est toute la classe
druidique qui s’est convertie, entraînant de ce fait les autres classes
avec elle, et donnant ainsi une idée du pouvoir réel qu’elle représentait dans
la société celtique. Or quand une classe sociale revêt une telle importance,
c’est qu’elle constitue un tout cohérent et organisé.
    Sur ce point, les textes de l’antiquité grecque et romaine
et les textes irlandais (épopée et hagiographie) sont, en dehors de détails
d’interprétation et de nuances de vocabulaire, en parfaite convergence :
il y a une classe sacerdotale druidique comprenant des prêtres, des devins et
des poètes-philosophes, pratiquant la théologie et les spéculations
métaphysiques, présidant les sacrifices, animant le culte et les rites divers,
transmettant la doctrine à des disciples et réglant la vie politique en tant
qu’intermédiaire entre le monde divin et le monde humain.
    On conçoit alors qu’une telle organisation n’est pas due au
hasard et qu’elle est la conséquence d’un plan qui répartit les tâches et les
responsabilités. La classe sacerdotale druidique est fortement structurée, même
si ses structures n’apparaissent pas toujours au premier plan. Un exemple est
caractéristique, celui de la Guerre des Gaules, plus particulièrement le moment
de la tentative de Vercingétorix pour libérer la Gaule des Romains. Si l’on
prend le récit des événements de la Guerre des Gaules, on peut dire, à quelques
exceptions près, que les druides sont curieusement et inexplicablement absents.
Mais quand on connaît l’organisation sociale des Celtes, on ne peut douter un
seul instant de leur présence, et surtout de leur action décisive dans tous les
événements, politiques et militaires, qui se sont déroulés entre 58 et 52. Or,
en 52, jamais la révolte suscitée par Vercingétorix n’aurait eu la moindre
chance d’éclater sans le patronage de la classe druidique. Cette révolte part
en effet du pays des Carnutes, où se trouvait le sanctuaire central de la
Gaule, et elle gagne ensuite, à une vitesse surprenante, l’ensemble du territoire
peuplé par les Gaulois [10] . C’est
la preuve qu’il existait une organisation ayant ses ramifications parmi tous
les peuples (pourtant rivaux et parfois très différents les uns des autres) et
capable de mobiliser en un temps record une masse humaine aux intérêts trop
souvent divergents. La révolte de Genabum, et le début de la tentative de
Vercingétorix à partir de sa base arverne, ne peuvent s’expliquer autrement.
    Tout cela suppose une hiérarchie. César est le premier à
l’avoir constaté et il l’affirme sans ambiguïté : « À tous ces
druides commande un chef unique qui exerce une autorité suprême sur eux ;
quand ce chef meurt, si l’un d’eux l’emporte en dignité, il lui succède, mais
si plusieurs sont à égalité, ils se disputent la première place par le suffrage
des druides, parfois même par les armes » (VI, 13). La désignation de ce
qu’on pourrait appeler « l’archidruide » est donc assez souple, et
tout compte fait, « démocratique ». La valeur du personnage fait
autorité, et à égalité de valeur, on a recours à l’élection. Et, bien entendu,
comme dans toute consultation électorale, les passions peuvent s’exacerber et
les positions partisanes se durcir : d’où le pis-aller de la violence.
Mais il n’y a pas de succession automatique ou
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