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Le Droit à La Paresse - Réfutation Du «droit Au Travail» De 1848

Le Droit à La Paresse - Réfutation Du «droit Au Travail» De 1848

Titel: Le Droit à La Paresse - Réfutation Du «droit Au Travail» De 1848
Autoren: Paul Lafargue
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veut
retrouver une trace de beauté native de l’homme, il faut l’aller
chercher chez les nations où les préjugés économiques n’ont pas
encore déraciné la haine du travail. L’Espagne, qui, hélas !
dégénère, peut encore se vanter de posséder moins de fabriques que
nous de prisons et de casernes ; mais l’artiste se réjouit en
admirant le hardi Andalou, brun comme des castagnes, droit et
flexible comme une tige d’acier ; et le cœur de l’homme
tressaille en entendant le mendiant, superbement drapé dans sa
capa
trouée, traiter d’
amigo
des ducs d’Ossuna.
Pour l’Espagnol, chez qui l’animal primitif n’est pas atrophié, le
travail est le pire des esclavages [5] . Les Grecs
de la grande époque n’avaient, eux aussi, que mépris pour le
travail : aux esclaves seuls il était permis de
travailler : l’homme libre ne connaissait que les exercices
corporels et les jeux de l’intelligence. C’était aussi le temps où
l’on marchait et respirait dans un peuple d’Aristote, de Phidias,
d’Aristophane ; c’était le temps où une poignée de braves
écrasait à Marathon les hordes de l’Asie qu’Alexandre allait
bientôt conquérir. Les philosophes de l’Antiquité enseignaient le
mépris du travail, cette dégradation de l’homme libre ; les
poètes chantaient la paresse, ce présent des Dieux :
    O Melibœ, Deus nobis hœc otia fecit
[6]
.
    Christ, dans son discours sur la montagne,
prêcha la paresse :
    « Contemplez la croissance des lis des
champs, ils ne travaillent ni ne filent, et cependant, je vous le
dis, Salomon, dans toute sa gloire, n’a pas été plus brillamment
vêtu [7] . »
    Jéhovah, le dieu barbu et rébarbatif, donna à
ses adorateurs le suprême exemple de la paresse idéale ; après
six jours de travail, il se reposa pour l’éternité.
    Par contre, quelles sont les races pour qui le
travail est une nécessité organique ? Les Auvergnats ;
les Écossais, ces Auvergnats des îles Britanniques ; les
Gallegos, ces Auvergnats de l’Espagne ; les Poméraniens, ces
Auvergnats de l’Allemagne ; les Chinois, ces Auvergnats de
l’Asie. Dans notre société, quelles sont les classes qui aiment le
travail pour le travail ? Les paysans propriétaires, les
petits bourgeois, qui les uns courbés sur leurs terres, les autres
acoquinés dans leurs boutiques, se remuent comme la taupe dans sa
galerie souterraine, et jamais ne se redressent pour regarder à
loisir la nature.
    Et cependant, le prolétariat, la grande classe
qui embrasse tous les producteurs des nations civilisées, la classe
qui, en s’émancipant, émancipera l’humanité du travail servile et
fera de l’animal humain un être libre, le prolétariat, trahissant
ses instincts, méconnaissant sa mission historique, s’est laissé
pervertir par le dogme du travail. Rude et terrible a été son
châtiment. Toutes les misères individuelles et sociales sont nées
de sa passion pour le travail.

II. – BÉNÉDICTIONS DU TRAVAIL.
     
    En 1770 parut, à Londres, un écrit anonyme
intitulé :
An Essay on Trade and Commerce
. Il fit à
l’époque un certain bruit. Son auteur, grand philanthrope,
s’indignait de ce que « la plèbe manufacturière d’Angleterre
s’était mis dans la tête l’idée fixe qu’en qualité d’Anglais, tous
les individus qui la composent ont, par droit de naissance, le
privilège d’être plus libres et plus indépendants que les ouvriers
de n’importe quel autre pays de l’Europe. Cette idée peut avoir son
utilité pour les soldats dont elle stimule la bravoure ; mais
moins les ouvriers des manufactures en sont imbus, mieux cela vaut
pour eux-mêmes et pour l’État. Des ouvriers ne devraient jamais se
tenir pour indépendants de leurs supérieurs. Il est extrêmement
dangereux d’encourager de pareils engouements dans un État
commercial comme le nôtre, où peut-être les sept huitièmes de la
population n’ont que peu ou pas de propriété. La cure ne sera pas
complète tant que nos pauvres de l’industrie ne se résigneront pas
à travailler six jours pour la même somme qu’ils gagnent maintenant
en quatre ».
    Ainsi, près d’un siècle avant Guizot, on
prêchait ouvertement à Londres le travail comme un frein aux nobles
passions de l’homme.
    « Plus mes peuples travailleront, moins
il y aura de vices, écrivait d’Osterode, le 5 mai 1807, Napoléon.
Je suis l’autorité […] et je serais disposé à ordonner que le
dimanche,
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