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Le Droit à La Paresse - Réfutation Du «droit Au Travail» De 1848

Le Droit à La Paresse - Réfutation Du «droit Au Travail» De 1848

Titel: Le Droit à La Paresse - Réfutation Du «droit Au Travail» De 1848
Autoren: Paul Lafargue
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Villermé, membre de l’Institut, le même qui,
en 1848, fit partie de cette société de savants (Thiers, Cousin,
Passy, Blanqui l’académicien, en étaient) qui propagea dans les
masses les sottises de l’économie et de la morale bourgeoises.
    C’est de l’Alsace manufacturière que parle le
Dr Villermé, de l’Alsace des Kestner, des Dollfus, ces fleurs de la
philanthropie et du républicanisme industriel. Mais avant que le
docteur ne dresse devant nous le tableau des misères
prolétariennes, écoutons un manufacturier alsacien, M. Th.
Mieg, de la maison Dollfus, Mieg et Cie, dépeignant la situation de
l’artisan de l’ancienne industrie :
    « À Mulhouse, il y a cinquante ans (en
1813, alors que la moderne industrie mécanique naissait), les
ouvriers étaient tous enfants du sol, habitant la ville et les
villages environnants et possédant presque tous une maison et
souvent un petit champ [9] . »
    C’était l’âge d’or du travailleur. Mais,
alors, l’industrie alsacienne n’inondait pas le monde de ses
cotonnades et n’emmillionnait pas ses Dollfus et ses Kœchlin. Mais,
vingt-cinq ans après, quand Villermé visita l’Alsace, le minotaure
moderne, l’atelier capitaliste, avait conquis le pays ; dans
sa boulimie de travail humain, il avait arraché les ouvriers de
leurs foyers pour mieux les tordre et pour mieux exprimer le
travail qu’ils contenaient. C’était par milliers que les ouvriers
accouraient au sifflement de la machine.
    « Un grand nombre, dit Villermé, cinq
mille sur dix-sept mille, étaient contraints, par la cherté des
loyers, à se loger dans les villages voisins. Quelques-uns
habitaient à deux lieues et même à deux lieues et quart de la
manufacture où ils travaillaient. »
    À Mulhouse, à Dornach, le travail commençait à
cinq heures du matin et finissait à cinq heures du soir, été comme
hiver. […] Il faut les voir arriver chaque matin en ville et partir
chaque soir. Il y a parmi eux une multitude de femmes pâles,
maigres, marchant pieds nus au milieu de la boue et qui à défaut de
parapluie, portent, renversés sur la tête, lorsqu’il pleut ou qu’il
neige, leurs tabliers ou jupons de dessus pour se préserver la
figure et le cou, et un nombre plus considérable de jeunes enfants
non moins sales, non moins hâves, couverts de haillons, tout gras
de l’huile des métiers qui tombe sur eux pendant qu’ils
travaillent. Ces derniers, mieux préservés de la pluie par
l’imperméabilité de leurs vêtements, n’ont même pas au bras, comme
les femmes dont on vient de parler, un panier où sont les
provisions de la journée ; mais ils portent à la main, ou
cachent sous leur veste ou comme ils peuvent, le morceau de pain
qui doit les nourrir jusqu’à l’heure de leur rentrée à la
maison. »
    Ainsi, à la fatigue d’une journée démesurément
longue, puisqu’elle a au moins quinze heures, vient se joindre pour
ces malheureux celle des allées et venues si fréquentes, si
pénibles. Il résulte que le soir ils arrivent chez eux accablés par
le besoin de dormir, et que le lendemain ils sortent avant d’être
complètement reposés pour se trouver à l’atelier à l’heure de
l’ouverture. »
    Voici maintenant les bouges où s’entassaient
ceux qui logeaient en ville :
    « J’ai vu à Mulhouse, à Dornach et dans
des maisons voisines, de ces misérables logements où deux familles
couchaient chacune dans un coin, sur la paille jetée sur le carreau
et retenue par deux planches… Cette misère dans laquelle vivent les
ouvriers de l’industrie du coton dans le département du Haut-Rhin
est si profonde qu’elle produit ce triste résultat que, tandis que
dans les familles des fabricants négociants, drapiers, directeurs
d’usines, la moitié des enfants atteint la vingt et unième année,
cette même moitié cesse d’exister avant deux ans accomplis dans les
familles de tisserands et d’ouvriers de filatures de
coton… »
    Parlant du travail de l’atelier, Villermé
ajoute : « Ce n’est pas là un travail, une tâche, c’est
une torture, et on l’inflige à des enfants de six à huit ans. […]
C’est ce long supplice de tous les jours qui mine principalement
les ouvriers dans les filatures de coton. »
    Et, à propos de la durée du travail, Villermé
observait que les forçats des bagnes ne travaillaient que dix
heures, les esclaves des Antilles neuf heures en moyenne, tandis
qu’il existait dans la France qui
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