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Le Dernier Maquisard

Titel: Le Dernier Maquisard
Autoren: Alain Pecunia
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compter les pompiers, les gendarmes et un
détachement militaire pour rendre les honneurs.
    Bien sûr, c’était le soixantième anniversaire. Toute la France
était en commémorations diverses en tous lieux et celles du 6 juin
en Normandie avaient été particulièrement grandioses.
    En 1945, quand nous nous étions retrouvés devant la stèle de
bois provisoire, nous étions loin d’être aussi nombreux.
    Il y a eu, bien entendu, plusieurs prises de parole. Le préfet,
le député-maire, d’autres, puis Georges, en tant qu’ancien
conseiller général et « capitaine Marceau ».
    C’est d’ailleurs son discours qui fut le plus émouvant et le
plus applaudi. Pas parce qu’il était le plus court, même si ça a pu
jouer vu qu’il prenait la parole le dernier. Non, mais c’est
surtout parce qu’il l’a terminé par l’appel des noms de nos
quatorze camarades tombés au champ d’honneur, sans oublier les deux
Espagnols, ni le petit vieux tué à sa fenêtre. Et la minute de
silence qu’il a réclamée à la fin des applaudissements fut
religieuse.
    Lors de la sonnerie au mort, j’ai failli pleurer. Seule ma
dignité de porte-drapeau m’en a empêché.
    Il y a aussi eu des remises de décorations. À des anciens
d’Afrique du Nord.
    Les résistants, eux, ils en avaient déjà ou étaient morts. Sauf
moi. Mais je n’ai jamais recherché le moindre honneur.
    Il y eut ensuite la réception à l’hôtel de ville autour d’un
buffet et nous ne sommes rentrés que vers seize heures chez Georges
qui semblait moins fatigué que moi par cette journée. Mais il a
quand même été s’allonger une petite heure en me conseillant d’en
faire autant.
    J’en ai profité pour me replonger dans son bouquin.
    Il ne me citait qu’à de rares passages. Trois en tout. Une fois
en janvier 1944, le 8 précisément, pour dire qu’ils étaient à
présent vingt et un avec l’arrivée d’un jeune étudiant de la région
parisienne qu’Émile avait trouvé errant dans les bois « à la
recherche du maquis ».
     
    Au cours de l’été 43, un groupe de lycéens du Quartier latin
avait commencé de jeter les bases, vers Bouffémont et L’Isle-Adam,
en Seine-et-Oise, d’un maquis. Durant les mois de juillet et août,
ils avaient établi l’infrastructure d’un camp de base et d’un camp
de secours, comprenant tous deux des abris enterrés et des postes
de vigie habilement camouflés dans les arbres, dans la plus pure
tradition du scoutisme. Ils agissaient sous la conduite de Francis
Ricol, militant chevronné originaire de notre région, professeur de
physique au lycée Louis-le-Grand.
    Il s’agissait à la fois d’un camp d’entraînement pour ses
lycéens et d’un refuge pour résistants « en
cavale ».
    Les jeunes y venaient en fin de semaine à vélo et s’y
retrouvèrent pour un séjour aux vacances de Noël.
    Leurs va-et-vient, malheureusement, n’avaient pas échappé
aux Allemands, et, le 25 décembre au matin, le maquis se retrouva
encerclé.
     Ricol donna l’ordre à sa dizaine de gars de tenter de
se faufiler à travers le cercle et leur fixa un lieu de
ralliement.
    Finalement, seuls Ricol et Gilles parvinrent,
miraculeusement, à s’enfuir, et Ricol décida avec Gilles de rallier
séparément notre maquis. Mais seul Gilles nous rejoignit et, encore
aujourd’hui, en 1993, nous ignorons tout du sort de Francis
Ricol.
     
    La deuxième fois qu’il me citait, c’était pour dire qu’il avait
dû me sermonner à peine trois semaines après mon arrivée et qu’il
avait même songé à me renvoyer « dans mes foyers ».
Précisant que seul le courage dont j’avais su « faire preuve
en abattant à bout portant un Feldwebel quelques jours plus
tôt » l’en avait dissuadé.
     
    Ce jour-là, ça avait été l’humiliation devant tous les copains
et Georges m’avait même giflé sous le coup de la colère.
    – Je devrais te fusiller ! avait-il hurlé. Les
promeneurs ou les cueilleurs de champignons, ça n’existe pas en
temps de guerre. Ceux qui rôdent dans les bois ou dans les
environs, sous quelque prétexte que ce soit, sont par principe des
agents de la Milice qui cherchent à localiser les maquis. Alors, on
ne discute pas avec eux et on les abat systématiquement.
    – Mais je lui ai rien dit ! avais-je tenté de plaider.
    – Encore heureux ! Mais, lui, il a vu que tu étais là à
glander et il sait que t’es pas du coin.
    Ginette n’avait aperçu le type que de loin
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