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Le Chant des sorcières tome 2

Le Chant des sorcières tome 2

Titel: Le Chant des sorcières tome 2
Autoren: Mireille Calmel
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perceptible et les recoins discrets, nombreux, d'où Marthe pouvait la guetter. Algonde s'immobilisa à mi-chemin sur les marches. Sans se retourner. Ce froissement d'étoffe, l'avait-elle rêvé ? Les battements de son cœur s'accélérèrent. Marthe la suivait, elle en fut certaine. Bien qu'elle sût désormais l'intérêt que la Harpie avait à la garder en vie, un frisson gagna Algonde. Elle le chassa en accélérant le pas. Il fallait que la Harpie puisse vérifier qu'elle s'en tenait aux commandements de Mélusine : enterrer l'œuf, le laisser sécher trois lunes durant. Pour sa propre sécurité, celle de Mathieu et de leur fille, s'encouragea-t-elle.
    Abandonnant sa chandelle sur une table, elle sortit du château, le contourna par la droite, passa la cour intérieure puis se faufila entre les hauts murs des communs. Certes, elle aurait gagné du temps à prendre le cheval que Philippine lui avait offert, mais il aurait fallu réveiller le jeune palefrenier pour le seller et l'on aurait appris son escapade. Or, nul, à part Marthe, ne devait savoir. Un vent froid sifflait entre les bâtisses. Algonde serra le coffret sur sa poitrine pour mieux rabattre contre elle les pans de son mantel. Un chien aboya à senestre, réveillant aussitôt les autres occupants du chenil. Tête baissée sous la capuche, Algonde se mit à courir pour s'éloigner, et s'enfonça dans le parc.
    Tout au nord de la première cour extérieure, à un quart de lieue du château, se trouvait un pigeonnier abandonné, haut de cinq étages et dont la circonférence était presque aussi large que l'appartement qu'elles occupaient avec Gersende dans le donjon, à Sassenage. Personne n'y venait plus. La végétation s'était resserrée autour de la bâtisse, et la porte, défoncée, pendait sur ses gonds rouillés. L'endroit était idéal. Algonde l'atteignit en enjambant les broussailles, la jupe et le mantel relevés jusqu'à mi-cuisses, baignée d'une lueur blafarde. Ce ne fut qu'au pied de la tourelle qu'un doute la rattrapa. Selon Présine, comme la Harpie dont elle avait recueilli pouvoirs et tares, Marthe avait besoin de se repaître de jouvencelles les nuits de pleine lune. Avait-elle eu son content avant de lui emboîter le pas ? Prendrait-elle le risque de l'entraîner dans son sabbat ? Algonde se retrouva brusquement envahie par cette angoisse qui l'avait quittée aux portes de Sassenage. Que ferait-elle pour se protéger si cela advenait?
    Refusant de céder à la panique, elle pénétra dans la bâtisse envahie par la pénombre. Bien que des tuiles manquassent sur un bon tiers du toit, on n'y voyait pas assez pour se diriger sans tâtonner. Algonde avait heureusement déjà visité l'endroit. Elle gravit sans faillir les marches de l'escalier à vis au centre de la vaste pièce. Elle abordait le dernier niveau lorsqu'un bruit trahit un mouvement en bas. La peur au ventre, elle ôta ses chaussures et passa sur le palier circulaire. De larges passerelles de bois disposées en éventail permettaient d'atteindre les murs du pigeonnier. Un oiseau s'envola à deux pas d'elle, la faisant sursauter. Elle étouffa un cri et, malgré le peu de lumière que déversait la lune par le toit découvert, accéléra le pas jusqu'à l'ouverture qu'elle avait préparée dans la paroi en dessertissant une pierre. Elle y enfonça la boîte puis ramassa de la paille à ses pieds et reboucha prestement le trou, avant de s'écarter, de remettre ses chausses et de s'accroupir, à quelques pouces du bord de la passerelle, tétanisée par le raclement de souliers sur les marches. Pas d'échappatoire. Que savait au fond Présine des véritables projets de la Harpie ? Suppositions. La fée n'avait que des suppositions. Vêtue de noir jusqu'au capuchon rabattu jusqu'en lisière de ses yeux fourbes, Marthe s'arrêta sur le palier et sonda l'espace, le nez au vent.
    « Perdue, pensa Algonde. Je suis perdue. »
    Elle se ratatina plus encore dans un réflexe de survie. Sans hésiter, Marthe se dirigea vers le mur, arracha la paille de ses ongles recourbés et extirpa le coffret. Algonde était terrorisée. La Harpie ne pouvait pas ne pas la voir, la sentir, la frôler. Elle était si proche d'elle. Pourquoi feignait-elle l'indifférence ? Elle ouvrit le coffret et en vérifia le contenu avant de le remettre en place. Les serres grattèrent le sol à quelques pouces des doigts d'Algonde, puis masquèrent de nouveau la boîte. La Harpie tourna les talons,
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