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Le cadavre Anglais

Le cadavre Anglais

Titel: Le cadavre Anglais
Autoren: Jean-François Parot
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salons, beaux esprits et parlements avec ce morceau ridicule.
    — À sa décharge, il a sauvé l'usage des lettres de cachet que M. de Malesherbes, votre successeur, à défaut de les pouvoir supprimer avait voulu restreindre.
    — Peuh ! Victoire à la Pyrrhus si tout cela conduisait, comme nous l'avons constaté, à éteindre la ressource essentielle de notre information que constitue cette masse de mouchards et de décavés de société, tous sortis de la lie du peuple – enfin, pas tous – et prêts à y retomber si nous leur coupons les vivres !
    — Souvenons-nous, dit Le Noir sentencieux, de la réponse de d'Argenson au grand roi sur l'origine de ces informateurs : «  Sire, nous les recrutons dans tous les états, mais surtout parmi les ducs et les laquais.  »
    Ils éclatèrent de rire.
    — Comment ? Comment ! Grand merci pour les ducs ! grogna La Vrillière, mi-fâché mi-ravi. Bref, un beau tollé dès l'annonce de la mesure.
    — Et la plupart de nos sources aussitôt taries, ajouta Nicolas.
    — Pour comble, renchérit Le Noir, l'avez-vous vu sur les traces de Rétif, reprenant les idées exposées dans Le Pornographe 6  ? Il faut, selon lui, encaserner les prêtresses de Vénus, les répartir dans trois cents maisons gérées par l'État, elles-mêmes divisées en classes correspondantes aux moyens des différentes clientèles. Rétif nommait ces établissements des parthénions et lui des caligulaires  !
    — Et songez à ce qu'il entendait faire des enfants mâles à naître de ces rencontres mercenaires : ils seraient admis d'office comme enfants de troupe, procurant ainsi un recrutement régulier et aisé aux armées du roi ! Que n'aurait-il fait des filles !
    — Quelle est sa réputation dans l'opinion ? demanda La Vrillière à Nicolas.
    — Exécrable, monseigneur. Ses lubies ne le servent point. On est fort mécontent de lui. Il déplaît par son caractère, d'autant qu'il succède à des hommes qui, par leur aménité, se conciliaient ceux qui avaient affaire à eux, même en leur refusant. Il est tenu pour fort dur, de mine et de propos rebutants. Beaucoup le jugent impropre à sa fonction et personne ne miserait sur son maintien. On évoque encore devant moi son remplacement par Doublet, conseiller aux aides.
    — Hi, hi ! Je me répète. Depuis une semaine, Sartine a fait le siège de Maurepas, depuis longtemps averti par moi des faiblesses du personnage. Il recevra demain un mot sec de M. Amelot d'avoir à faire son paquet et quitter sur-le-champ la rue Neuve-Saint-Augustin. Et demain donc, Le Noir, vous renouerez le fil d'une action si malencontreusement rompue, avec les compliments de Sa Majesté.
    L'intéressé rougit derechef, les lèvres tremblantes d'émotion. La main d'argent virevoltait gaiement. Nicolas, heureux, souriait.
    — J'y mettrai pourtant une condition…
    — Peste ! Une condition ! Au roi ?
    — Monseigneur, comprenez-moi. Je ne souhaite guère me retrouver dans le cas des émeutes de 1775. Le roi doit me consentir, par écrit et dans les formes, le droit de réquisition de la force publique en cas de troubles graves 7 . Sans cela, le lieutenant général de police n'est qu'une silhouette réduite à l'impuissance.
    — Bon, bon ! J'avoue que votre requête me paraît légitime. J'en parlerai à mon beau-frère sans l'avis duquel le roi ne décide rien… Et que pense le marquis de Ranreuil de M. Amelot de Chaillou, ministre de la maison du roi ?
    — Je me garderai bien de penser. Les ministres ont droit à notre obéissance…
    — Peuh ! Vous avez souvent prouvé le contraire… heureusement. Vous êtes pourtant de nous trois celui qui l'approchez le plus.
    Nicolas fit la moue.
    — Monseigneur, le ministre m'a reçu… une fois… Je lui ai présenté mes devoirs. Sa discrétion a égalé la mienne.
    —  Brevitas   … Breteuil qui vous aime et vous loue depuis une certaine audience impériale à Vienne vous eût volontiers gardé. Je comprends pourquoi… Comment dire mieux en moins de mots. Moi qui ne suis plus qu'un vieillard malade au bord de la tombe… Si, si ! Je ne puis qu'admirer cette réserve qui participe de votre charme.
    Le duc médita un moment.
    — Les salons bruissent d'un mot de Maurepas quand il proposa le bonhomme au roi. Je vous le livre dans ses deux versions «  au moins on ne m'accusera pas d'avoir choisi celui-ci pour son esprit  ».
    — Et l'autre, poursuivit Le Noir s'échauffant de
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