Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

Titel: L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford
Autoren: Ron Hansen
Vom Netzwerk:
Jesse
sentait le rail vibrer dans son pied droit. Il regarda autour de lui et vit
Liddil à sa droite, son Colt Navy à la main, les Hite et Ed Miller plus à l’est,
prêts à intimider les passagers, ainsi que les nombreux surnuméraires rangés le
long du déblai, la Winchester appuyée sur le poignet, et Bob Ford, juché sur le
talus derrière lui, avec des allures de desperado.
    Jesse entendit la locomotive ralentir dans la
côte, entendit les grincements et les gémissements des wagons qui s’inclinaient
vers le nord dans la courbe. Le phare en cuivre ouvrit dans le goulet de Blue
Cut un couloir de lumière blanche qui balaya les broussailles et la forêt, aveuglant
Charley Ford qui s’abrita les yeux, puis le faisceau obliqua et se déversa en
direction de Jesse. Le chasse-pierres flairait la voie en quête de proies, un
panache de fumée noire se déployait en chaînes de collines et de montagnes
au-dessus de la cheminée et du train ; Jesse agita sa lanterne emmaillotée
de flanelle rouge au-dessus des rails tel un chef de triage pour signaler au
train de s’arrêter.
    Des lunettes d’aviateur sur le nez et un coude
dehors, Chappy Foote, le machiniste, scrutait la voie par la fenêtre de la
cabine, la main gauche sur la manette du frein à vapeur. À la vue de la
lanterne, il se pencha au-dehors, pensant qu’un train de marchandises devait
être coincé dans la côte, puis il aperçut le foulard de l’homme et les rochers
sur les rails à dix mètres de là. Il tira la manette du frein.
    « On dirait qu’on va se faire dévaliser ! »
s’écria-t-il à l’attention du chauffeur.
    Son jeune collègue, John Steading, porta la
main à son oreille à cause du rugissement de la chaudière, mais en entendit
assez pour jeter un coup d’œil dehors.
    « Miséricorde », lâcha-t-il.
    Jesse esquiva le chasse-pierres et vit la
genouillère jouer entre les patins de frein et les presser contre les roues en
acier dans un crissement qui l’obligea à se boucher les oreilles. Il fut
aspergé par un jet de vapeur, les attelages des wagons s’entrechoquèrent et des
étincelles jaillirent des rails. La vitesse du train était de quarante
kilomètres-heure ; quelques secondes plus tard, elle n’était plus que de
vingt-cinq ; puis de cinq. À l’intérieur, des malles chassèrent ; déséquilibré,
l’employé des Postes enfonça le poing dans l’une des fentes du trieur en noyer
et se meurtrit l’ongle et l’articulation du pouce ; un gros homme
valdingua à travers la voiture-lit et défonça la porte avant, tel un piano
monté sur roulettes ; dans le fourgon de queue, un mécano épongea avec son
mouchoir la soupe de macaronis qu’il avait renversée sur ses vêtements. Le
machiniste avait freiné juste à temps et le chasse-pierres tomba en arrêt
contre le rocher le plus proche avec un bruit métallique de glacière qui se
referme.
    Dans la voiture pullman, un quatuor d’Anglais
aux voix agréables chantait : « Viens donc, septembre est là, la lune
d’automne flotte dans le ciel, et par les blés et les chaumes retentit au loin
un fusil. Les feuilles pâlissent, jaunissent, frémissent et rougissent, et l’orge
bienheureux courbe l’échiné. »
    Puis les brigands s’élancèrent dans la pente
en cascadant et en dérapant. Jesse observa Bob Ford qui se laissait glisser le
long du talus telle une débutante en jupon, s’agrippant aux plantes et aux
racines de la main gauche, alors que de la droite il soulevait son masque et
contemplait la confusion. Les hors-la-loi couraient le long du train, fusil en
joue, pliés en avant dans une attitude qui se voulait patibulaire et effrayante.
Sur le flanc sud de la voie, Frank James, un fusil négligemment niché au creux
des bras, aboyait des ordres, serrant dans son poing les pans de son cardigan. De
la vapeur s’échappait des bogies de la locomotive et se dissipait dans la brise ;
la machine exhala un premier « ouf », puis un second avant de pousser
un soupir chargé de braises comme Jesse montait sur le marchepied de la cabine
en brandissant son revolver armé. Le machiniste se réfugia derrière ses mains.
    « Ne tirez pas ! implora-t-il. Ce n’est
pas nécessaire !
    — Alors vous feriez mieux de descendre
tous les deux de là avec un pic à charbon, leur intima Jesse.
    — C’est vous qui avez le flingue », répliqua
Chappy Foote, obéissant, en étant ses lunettes et en les suspendant à la
manette de frein.
    Assis
Vom Netzwerk:

Weitere Kostenlose Bücher