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L'amour à Versailles

L'amour à Versailles

Titel: L'amour à Versailles
Autoren: Alain Baraton
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époux avec elle : après avoir mené l’enfant au sevrage (à plus de deux ans !), elle devient femme de chambre des Enfants de France, puis femme de chambre de la reine mère. En 1653, lorsqu’il a quinze ans et qu’il atteint l’âge où il est peu viril de traîner sa nourrice après soi, Louis XIV donne à Perrette et à son époux les lettres de noblesse ainsi qu’une maison et une forêt nommée depuis les « bois de la nourrice ».
    Jusqu’à la fin de sa vie en 1688, Perrette Dufour vint chaque matin déposer un baiser sur le front du roi. Pour ce genre de métier, il faut un physique, et les costumes étant largement décolletés à cette époque, on peut imaginer le spectacle matinal qui fut celui du roi tout le long de sa vie : pigeonnants, débordants puis racornis, les seins de Perrette ont salué le lever de celui qui resta, pour toujours, son nourrisson. Nous ignorons à quoi ressemblait cette alma mater , toutefois les seins de Perrette sont à leur manière passés à la postérité : tous les joursdonc, Louis XIV regarde vieillir la poitrine qui l’a vu grandir. « Souviens-toi des seins qui t’ont nourri », un beau memento mori pour celui qui est, dès son plus jeune âge, un séducteur.

    Très vite en effet, le jeune Louis a « un petit oeil pour les femmes », ou pour le dire de manière plus noble « un tempérament ardent ». Déjà à dix ans, lors de la Fronde, il fait des gracieusetés aux harengères parisiennes, qui le lui rendent bien. A peine se tient-il droit qu’il court sous les robes des femmes, qui, rappelons-le, ne portent pas de culotte à l’époque. Sous le vertugadin, le cerceau qui assure du volume à la robe, ces dames accumulent jupes et jupons, mais rien ne recouvre totalement ce qui s’appelle crûment un con. On effeuille la « modeste », le jupon de dessus, on se jette sur la « friponne », et finalement est atteinte la « secrète », une courte jupette fendue qui n’évite ni les coups de froid, ni les coups de chaud. Louis XIV y joue à cache-cache. Il est enfant, gazouillant, pas tout à fait érectile, Mazarin, chargé de son éducation, lui pardonne : les jeux du roi sont mis sur le compte de l’innocence puérile et de l’instinct maternel des demoiselles. Il polissonne, c’est de son âge. Même Anne d’Autriche, qui n’en a peut-être jamais fait autant avec son défunt mari, regarde les galanteries royales avec indulgence.
    Le vert paradis des amours enfantines ne dure guère. Le petit roi n’a pas douze ans que déjà Anne d’Autriche s’inquiète, à bon droit : Louis vient de jeter son dévolu sur une odieuse matrone de presque trente-cinq ans, la maréchale de Schomberg, qui n’est autre que Marie de Hautefort, l’ancienne maîtresse de Louis XIII. La « vieille » est mise sur la touche, non sans mal, car elle est du genre coriace. Avec Anne d’Autriche, elle a retrouvé une vieille ennemie : la reine lui a cédé l’époux, elle ne lui cédera pas son cher fils.
    Le danger est écarté, mais pour un temps seulement. Après trente ans de règne de Louis XIII, tout en pruderies, en pieusetés et en amours platoniques, puis cinq années de régence dévote, la Cour n’en peut plus. Trente-cinq ans de sensualité refrénée, c’est, pour l’époque, quasiment deux générations sacrifiées. Déniaiser le roi devient le nouveau sport national, d’autant que le jeune garçon est – il le confessera lui-même plus tard – prompt aux « égarements ». Les filles se pâment, les mères frémissent, les grand-mères, qui se targuent d’avoir connu Henri IV, abondent en recommandations. Dans les couloirs du Louvre, la compétition est ouverte : on se bouscule, on se déchire pour être la première à lancer une oeillade assassine ou un rire cristallin. Les décolletés deviennent agressifs, le maquillage indécent, onporte des bas couleur « veuve réjouie » ou « baise-moi ma mignonne ». On parsème son visage de mouches de soie noire aux noms évocateurs. La « passionnée » est placée près des yeux et la « baiseuse » tout près de la bouche. « La discrète » se pose sous les lèvres et la « majestueuse » sur le front. Certaines jouent les provocatrices en mettant une mouche au beau milieu du nez. A défaut de séduire, on fait sourire. Pour aguicher encore et encore, on en dispose aussi dans le cou et sur les seins. Il était même possible aux dames de la Cour de plaquer des mouches « assassines », d’une
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