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L'amour à Versailles

L'amour à Versailles

Titel: L'amour à Versailles
Autoren: Alain Baraton
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sont trois. Chacune a sa partie : Laure est belle, Olympe danse à la perfection, seule Marie semble n’avoir aucune grâce. Qu’importe ! Sur le nombre, l’une d’elles saura bien séduire le roi. De plus, elles peuvent compter sur les faveurs de leur oncle, qui, à cette époque, a l’oreille de Louis XIV. Mazarin se charge de les mettre en avant, organise les occasions et, dans l’intimité, fait leur éloge auprès de celui qui est encore son élève. A vrai dire, c’est plus l’oncle que les nièces qui fait la cour au roi. Les soeurs appartiennent à la clique naissante des précieuses, qu’Anne d’Autriche voit du meilleuroeil : si elle parvient à faire glisser la sensualité de son fils du côté des amours platoniques, dont Louis XIV eut, avec son père, un modèle impeccable, l’honneur royal est sauf.
    Olympe est la première à gagner le coeur du monarque. L'espace d’un été, ils se montrent, bras dessus bras dessous, aux fêtes, aux bals et aux divertissements. Les paparazzi de l’époque, c’est-à-dire les courtisans, jasent. Anne d’Autriche s’affole et envoie prier pour la vertu de son fils, donc du royaume. Mazarin bat en retraite et marie Olympe en février 1657. L'affaire est close. Louis XIV ne semble pas en souffrir. Cette rupture forcée fera jurisprudence.
    En 1658, Louis se tourne à nouveau vers une Mancini, Marie. La surprise est générale, car tous s’accordent à la trouver vilaine. « Elle était si maigre, et ses bras et son col paraissaient si décharnés qu’il était impossible de la pouvoir louer sur cet article. Elle était brune et jaune ; ses yeux, qui étaient grands et noirs, n’ayant point encore de feu, paraissaient rudes ; sa bouche était grande et plate ; et hormis les dents (…) on la pouvait dire alors toute laide », écrit Mme de Motteville. Bref c’est une grande bringue à grande bouche, une sorte de Julia Roberts Grand Siècle. Sur les portraits, pourtant, elle ne me semble pas si déplaisante : je lui trouve un air vif et doux, des sourcilset des lèvres bien dessinés, surtout elle n’a pas le double menton classique qu’arborent toutes les perruches de l’époque et que je trouve si ridicule. N’oublions pas non plus qu’avec Cateau la borgnesse et sa mère, Louis XIV était particulièrement prédisposé à apprécier les laiderons.
    Cela fait quelque temps déjà que Louis XIV connaît la jolie brune, mais son coeur est ailleurs, tantôt occupé à chasser Vénus sur le mont Olympe, tantôt, à se délecter d’une jolie motte de blonde. En 1658 l’une est mariée, enceinte, et l’autre est au couvent. Le coeur royal est à conquérir. Comment Marie Mancini s’y prend-elle ? Certains prétendent qu’il aurait été ému de la voir pleurer à son chevet alors qu’il était malade, d’autres que c’est par sa culture qu’elle aurait séduit le roi. Pour moi, qui ne suis pas particulièrement fleur bleue, il ne faut pas être trop machiavélique dans cette affaire : ces deux-là s’aiment sincèrement. On a beaucoup glosé sur la grande culture de la belle Italienne : le roi, par elle, aurait été instruit, puis séduit. Je n’en crois pas un traître mot : si Louis XIV avait souhaité s’instruire, entre les livres et les pédagogues, il avait tout ce qu’il fallait. Non, ce que Marie lui apporte, c’est le romanesque, un univers qui, à l’époque, est réservé aux filles plus qu’aux garçons. Pendant que Louis XIV enfant se desséchait d’ennui sur Plutarque ou sur Sénèque,la petite Marie dévorait L'Arioste . Celle que Saint-Simon surnomme « la plus folle et toutefois la meilleure de ces mazarines » emporte le roi dans un univers héroïque où il n’est question que d’aventures, d’actes nobles, de courage… et d’amour. Elle l’ouvre à ce qu’elle a de plus précieux, son imaginaire ; il est charmé de se voir, lui, gravir les marches de ce monde de héros. Dans les yeux de l’une et dans le coeur de l’autre, ils sont deux personnages de Roland furieux , ce que Louis XIV fera passer à la réalité plus tard, lors de l’une de ses fêtes. Dans le conte de fées qui est le leur, chacun se contemple dans le miroir tendu par l’autre : un regard qui non seulement l’admire, mais l’élève, pour celui qui vient tout juste d’être surnommé « Soleil », est idéal.
    A être si romanesques, leurs amours ne vont pas tarder à être contrariées, d’autant que les jeunes gens se montrent fort
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