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L'amour à Versailles

L'amour à Versailles

Titel: L'amour à Versailles
Autoren: Alain Baraton
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d’alors.
    Le seul intérêt de la terre est d’être giboyeuse. Henri IV y va souvent chasser « à vol », avec des rapaces, en compagnie de son ami Henri de Gondi, qui l’invite sur ses terres versaillaises. Du terrain de chasse amoureux au terrain de chasse tout court, il n’y a qu’un pas. Le « vert-galant » vient pour débusquer le gibier, il y reste pour entretenir le damoiseau, à la hussarde, sans précaution car l’époque est aux guerres et à la brutalité. Il est loinle temps raffiné et coquin où le monarque, François I er , invitait à sa table les dames de la Cour simplement vêtues de leurs bijoux. On raconte que le roi avait pour habitude de se cacher pour observer les jeunes femmes se toilettant dans la sublime salle de bain du château de Fontainebleau. Mme de Maintenon connaissait-elle l’histoire des lieux? Toujours est-il qu’elle fit détruire en 1697 la salle témoin des frasques royales, et demanda sa propre salle de bain !
    L'endroit est si inculte que, comme le raconte Guitry dans Si Versailles m’était conté , lorsque le roi demande son chemin à un paysan, celui-ci fait mine de ne pas le reconnaître. Le roi fut si ravi d’être incognito et de pouvoir se livrer à ses plaisirs en toute quiétude, qu’il prit l’habitude de fréquenter le pays. A l’époque, aller à Versailles, c’est déjà un petit voyage : il faut presque une journée pour y accéder, et même si le bourg est seulement à une vingtaine de kilomètres du coeur de Paris, il n’a rien à voir avec la capitale. Lorsqu’il fait halte, le roi s’arrête à la seule auberge du village, l’ Hostel où pend l’écu . Le lieu est plus proche de l’hôtel borgne que du trois-étoiles : plus tard, Saint-Simon le qualifie de « misérable cabaret ». On y dort sur des matelas de paille, à même le sol en terre battue, en compagnie de puces, de tiques et de vermines entous genres dans des chambrées nombreuses où grouille une clientèle crapuleuse. Le vin y est mauvais, l’hôtelier voleur, quand il ne fait pas tout bonnement le tenancier. C'est L'Auberge rouge , l’accent chaleureux de Fernandel en moins. Le seul mérite de ce gourbi est d’être le seul du coin. Versailles est à la fois trop éloigné de Paris et trop proche de la capitale, une situation bâtarde pour la future ville des rois.
    Quel charme y trouve le souverain? Certes Henri IV n’est pas un homme délicat, mais il est tout de même habitué à plus de raffinement. Il va y chercher le calme, c’est sûr, mais je pense qu’il en profite pour batifoler. Le « bon roi Henri » est très tolérant : les amours ancillaires ne sont pas pour lui déplaire. L'histoire lui prête même une liaison avec la fille d’un jardinier, Fleurette. L'espace d’une année, le roi alla souvent chasser du côté du château de Nérac. Il aurait abandonné la petite et elle se serait donné la mort. J’aurais volontiers quelque rancune envers un homme ayant brisé le coeur de la fille d’un collègue, qui plus est si joliment nommée ; mais je suis fier que l’enfant d’un jardinier soit à l’origine de l’expression « conter fleurette ». Même si elles sont restées anonymes, il y a fort à parier que Versailles comptait aussi nombre de marguerites sauvages, prêtes à être effeuillées.
    Comment un lieu sordide, en tous points mal loti, un marais où l’on trouve plus de crapauds que de princes charmants, est-il devenu l’un des plus beaux châteaux du monde? La métamorphose commence quelques années plus tard, avec Louis XIII.
    1 La volaille est à l’époque une nourriture rare, si précieuse qu’une ordonnance royale datée de 1564 interdit que soient servies dans les restaurants et hôtels poules, dindes et autres volailles, pour « reigler et modérer » les additions trop souvent excessives.

Chapitre 2
    Le relais de chasse de Louis XIII
    Le magicien malgré lui de cette métamorphose est Louis XIII. Grâce à lui, le marais puant devient le miroir rutilant où se reflètent toutes les convoitises. Il n’en a bien sûr aucune idée lorsqu’il y fait bâtir son petit château, rose déjà. L'homme n’a pourtant rien d’un bourreau des coeurs. Le jeune garçon n’a pas eu une enfance très heureuse : il monte sur le trône en 1610, âgé d’à peine neuf ans. Sa mère, Marie de Médicis, est une femme dure, lointaine et autoritaire. A treize ans, alors qu’il vient d’atteindre la majorité royale, elle le déclare trop
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