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La Volte Des Vertugadins

La Volte Des Vertugadins

Titel: La Volte Des Vertugadins
Autoren: Robert Merle
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ecclésiastiques et aux princes du sang. Mais Conti, le seul Bourbon
présent à Paris, était sourd, bègue et stupide, Soissons boudait dans son
château lointain et Condé se trouvait à Milan. Fallait-il les attendre,
arguaient nos deux compères, et laisser le trône en quenouille ?
    Le Parlement se laissa faire par d’Épernon la plus douce
violence. Il était, en fait, enchanté de se donner un droit nouveau, et déclara
sans ambages la Reine, mère du Roi, Régente de France pour l’administration des
affaires du royaume «  avec toute-puissance et autorité ».
    Cette seule phrase supprimait sans le dire et sans qu’on en
ait débattu, le Conseil de régence établi tout exprès par le Roi pour que Marie
n’y eût qu’une voix. Elle était d’ores en avant, sous le nom de Régente, reine
régnante aussi absolue que l’avait été son mari.
    Nos deux barbons, sachant ce qu’il en était de ses
capacités, pensaient bien qu’ils auraient la réalité du pouvoir et qu’ils s’y
perpétueraient. D’Épernon, partant poigner le Parlement, jugeait de son côté
que la Reine aurait besoin d’une épée et que cette épée serait la sienne. Dans
son embrasure de fenêtre, Concini considérait cette scène sans se permettre un
sourire, n’ignorant pas que l’opiniâtreté invincible de Marie était un bloc de
pierre que nul ne savait bouger, sauf lui-même et la Galigaï. Peut-être
rêvait-il déjà, à cette minute même, à pousser sa fortune aussi loin qu’elle
pourrait aller, et à hériter d’un royaume.
    La Reine, s’apercevant que son fils était toujours là,
immobile et contraint, me demanda de le ramener dans ses appartements, où il
mangea peu et à contrecœur. Les larmes lui venaient par instants, mais il les
refoulait. On le coucha à neuf heures et peu après il demanda à coucher avec
Monsieur de Souvré, «  pour ce qu’il lui venait des songes  ».
Cependant, il fut réveillé brusquement sur le coup de minuit, la Reine
l’envoyant quérir pour qu’il reposât dans sa chambre. Je dis : dans sa
chambre, et non avec elle, car ne voulant pas pousser la sollicitude maternelle
jusqu’à l’avoir dans son lit, elle le fit coucher dans un lit à part avec son
demi-frère Verneuil. Il dormit fort mal et se réveilla à six heures et demie du
matin.
    Pour ma part, Héroard me fit manger et coucher dans son
appartement, pensant que Louis serait heureux de me retrouver au matin. Mais je
ne pus le voir alors, car il était parti – premier acte de sa vie de
roi – tenir un lict de justice, comme j’ai dit, au Parlement, pour
confirmer la régence de sa mère. C’est là où, cheminant par les rues sur une
haquenée blanche, il fut fort troublé, par les cris de : « Vive le
Roi ! » qui furent poussés par le peuple comme il passait.
    Cependant, je l’allai visiter l’après-midi ; et comme
j’entrais dans ses appartements, je fus ébahi de les voir tout soudain envahis
par une douzaine de soutanes noires. Elles appartenaient à des jésuites, qui,
sous la houlette du père Cotton, venaient réclamer, comme leur ayant été
promis, le cœur du feu roi. Ceci fut dit avec beaucoup d’encens, de larmes
verbales, de regrets douloureux et de serments de fidélité au nouveau
souverain. Pendant que le père Cotton parlait, je détaillai les physionomies
des jésuites qui l’accompagnaient, mais je ne trouvai parmi eux ni le père
Gontier, qui avait laissé entendre que Dieu pourrait cesser de maintenir le Roi
en vie s’il ne changeait pas de politique, ni le père Hardy, qui avait observé
plus crûment « qu’il suffisait d’un pion pour mater un roi ».
    Quand Louis, sur le conseil de Monsieur de Souvré, eut accepté
leur requête, j’eus la curiosité de les suivre dans la chambre du Roi, où le
premier médecin, Milon, leur remit le cœur royal qu’il venait d’extraire en
pratiquant l’autopsie. Le père Cotton le plaça dans une urne en plomb, et
celle-ci, dans un reliquaire qui avait lui-même la forme d’un cœur. Le
reliquaire était en argent et non en or, comme la Duchesse de Guise l’avait
imaginé.
    Mais il fallait une personne du sang pour dire une dernière
prière avec le père Cotton avant qu’il emportât le reliquaire.
    On n’osa pas demander à Louis ce service, et on courut
chercher le seul prince royal qu’il y eût encore en Paris : le Prince de
Conti qui, à dire vrai, n’ouït pas bien et entendit moins encore ce qu’on
attendait
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