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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour
Autoren: Robert Merle
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fut
aussitôt répétée de bouche en bouche avec quelques déformations, et courut
ainsi jusqu’à l’autre bout de Paris, étant mâchellée et remâchellée par tous
comme un des fruits les plus savoureux de cette journée.
    Ce duc de
Feria que le roi appelait, parmi ses intimes, « le solennel idiot »,
avait le visage tant long que son cheval et, à ce que je vis, des yeux noirs
assez beaux, mais qui n’exprimaient rien, en plus d’une moue hautaine figée sur
ses lèvres.
    Après lui
vinrent les compagnies wallonnes contre qui personne n’avait de haine, tant est
que le spectacle aurait pu perdre de son intérêt si, à la queue des Wallons, et
précédant l’attirail de garces et de vilaines que les soldats traînent
d’ordinaire après eux, n’était apparu un cortège de quarante à cinquante, qui
moines qui prêchaillons, lesquels n’ayant pas fiance en la clémence du
roi – jugeant de lui à l’aune de leur propre férocité – fuyaient
Paris dans les bagages de leurs maîtres espagnols. La foule leur chanta
pouilles, les nuées grandissant tout soudain jusqu’au ciel quand parmi eux on
découvrit Boucher, dont les prédications avaient fait trembler tout Paris, et
se peut, inspiré l’exécution du président Brisson.
    — Ha !
Boucher ! criaient les moins méchants, tu fuis la corde ou tu suis les
doublons ?
    J’eus le plus
grand mal à me démêler de la presse et n’y serais pas, se peut, parvenu, sans
La Surie qui, grand trantoleur et museur, connaissait Paris et ses petites rues
mieux que personne, si bien que je parvins à l’hôtel de Montpensier sur le coup
de cinq heures et venant de la part du roi, fus aussitôt introduit auprès de la
Boiteuse, laquelle, échevelée, dépoitraillée, le rouge mal mis, l’œil en furie,
marchait qui-cy qui-là en se rongeant les poings, ayant jà déchiqueté des dents
deux ou trois mouchoirs que je vis joncher le parquet.
    — Que me
veut le roi ? hurla-t-elle. Jouir de mon pâtiment ? m’exiler ?
m’embastiller ? me mettre la tête sur le billot comme la pauvre Mary
Stuart ? Ha ! ciel, je n’y survivrai pas ! Franz, je te
l’ordonne, prends ce poignard que voilà et m’en donne tout de gob dans le sein !
    Je n’ose pas
affirmer que cet ordre, qui me parut de pure rhétorique, déplut tant à Franz
que sa muette mine avait l’air de le dire, mais comme il ne branlait ni ne
parlait, je pris le relais aussitôt :
    — Madame,
dis-je, il n’est pas nécessaire d’en venir à de si dures extrémités. Le roi
vient céans pour vous pardonner et s’accommoder à vous. Vous eût-il d’ailleurs,
envitaillée pendant le siège, s’il avait nourri contre vous tant
d’animosité ? N’êtes-vous pas sa parente ? N’est-il pas l’homme le
plus bénin du monde ? A-t-il fait périr la reine Margot qui avait attenté
de l’empoisonner ?
    Je la
convainquis, je crois, mais tenant à sa haine qui lui avait fourni tant
d’années une raison de vivre, et ne pouvant plus laisser couler cette lave
furieuse du côté du roi, puisqu’il lui pardonnait, elle la détourna sur Brissac
et s’écria, l’œil enflammé :
    — Ha !
Ce Brissac ! Que ne l’ai-je, céans, sous mes ongles ! Je lui ferais
sauter ses yeux louches ! Ha ! le méchant ! Ha ! le
traître ! Livrer Paris que mon frère Mayenne lui avait donné à
garde ! Trahir mon frère Mayenne qui l’avait nommé maréchal !
Ha ! Oui-da ! Le beau maréchal que nous avons là ! Le dernier au
combat ! Le premier à trahir ! Tudieu, je le savais depuis longtemps
bas de poil ! Mais, en plus, félon ! Qui l’eût pensé ?
    J’interrompis
ce torrent de feu en lui demandant mon congé et je courus chez M me de Nemours, mais sans demander à la voir, laissant message à son majordome que
le roi voulait la voir sur les six heures chez sa fille Montpensier et dépêchant
M. de La Surie porter le même message à M me de Guise, je retournai à
l’hôtel de Montpensier, mais m’en tins distant assez pour ne me montrer point,
si bien que je vis arriver M. de La Surie, puis M me de Guise, en son
carrosse, puis M me de Nemours en le sien, et enfin Sa Majesté, que
j’abordais aussitôt pour lui dire à l’oreille comment la Montpensier avait pris
la chose. Ce dont il ne fit que rire et me commanda de le suivre chez la
Boiteuse ainsi que M. de La Surie, lequel rougit de bonheur de ce que le roi se
ramentut son nom.
    Les trois
princesses l’attendaient mais, à
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