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La Régente noire

Titel: La Régente noire
Autoren: Franck Ferrand
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bientôt dans l’ouverture.
    — Madame ?
    — Françoise, vous paierez à ce brave homme ce que nous lui devons.
    La jeune fille se jeta sur les miroirs comme une enfant sur des confiseries. Déjà Diane traversait le couloir comme une ombre et faisait irruption dans la salle des bains.

    C’était une pièce assez vaste, avec un plafond de poutres peintes et de grands murs tendus de tapisseries épaisses et chatoyantes où dominaient le rouge et l’ocre. Quand la grande sénéchale entra, le tumulte cessa comme par l’effet d’un sort.
    — Maman Brézé ! s’écria l’un des enfants.
    D’autres tendaient les bras en quête de câlins. Le plus remuant des rejetons royaux, François, avait l’âge de l’aînée de Diane : un peu plus de trois ans. Né joueur, il piétinait l’eau de sa cuvette d’argent à la manière d’un fouleur. Il cherchait à éclabousser son frère, Henri, deux ans et demi, qui refusait obstinément de se laisser baigner. La cadette des princesses, Madeleine, neuf mois, séchait déjà dans les bras d’une vieille servante, sous l’œil attentif de sa grande sœur : charmante aînée des enfants de France, Charlotte allait sur ses cinq ans.
    La cérémonie du bain s’accompagnait toujours d’une débauche de lingerie blanche – beau lin brodé, les plis finement marqués... La dame d’honneur, d’un regard habitué, s’assura que le feu dans l’âtre était suffisant, l’eau des bassinets encore fumante. Elle voulut aussi voir la nourrice qui devait allaiter la princesse Madeleine, et jaugea sa poitrine en experte.
    — N’aurais-tu pas quelque affaire galante, en ce moment ?
    — Pour ça non, madame !
    Car on considérait le lait d’une femme amoureuse comme le plus pernicieux des poisons.
    — Vous préparerez aussi le prince Henri, ordonna Diane.
    Elle avait adopté, pour dire cela, le ton le plus détaché.
    Sur quoi elle se tourna vers la princesse Renée de France, très jeune sœur de la reine Claude, et qui s’amusait des facéties de ses neveux. Ses douze ans la rangeaient déjà parmi les femmes faites, et lui épargnaient ces ablutions collectives. Diane lui prit délicatement la main.
    — Vous-même, madame, vous êtes-vous bien baignée ? Il convient qu’une jeune princesse se lave souvent ; rien ne fera plus sûrement fleurir sa beauté !
    Une femme aussi parfaite de visage, de corps et de peau, était certes la mieux placée pour livrer des conseils en ces matières. Ne se plongeait-elle pas elle-même, chaque matin, dans une cuve d’eau glacée, souverain remède à tout relâchement ?
    Le petit prince Henri n’avait pu échapper à la poigne des femmes ; l’ayant rattrapé, elles lui ôtèrent ses habits. Diane s’approcha de la cuvette, le cœur battant ; sous couvert de cajoleries, elle se plaça juste au-dessus de l’enfant, et se mit en situation d’observer, plus attentivement que d’habitude, l’étrange malformation de son pénis  5 ... Ce qu’elle détailla la combla d’aise.
    — Tout beau, monseigneur ! dit-elle. Le bain n’est pas un supplice ! Voyez votre frère, comme il s’y complaît !
    Henri ne voulait rien entendre ; et la noirceur de son regard acheva de ravir la grande sénéchale.
    — Quand ce petit Moïse sera sauvé des eaux, dit-elle à la plus forte des femmes, et que tu l’auras frictionné comme il convient, tu auras soin de le conduire chez moi.
    Diane suffoquait à présent de joie contenue. Car si le Vénitien avait bien vu – or sa réputation n’était plus à faire – elle était la première à savoir – et avec quelle avance sur ses contemporains – que ce poupon rétif au bain, que ce petit être boudeur, régnerait un beau jour sur la France.
    — Longue vie, sire Henri ! murmura la dame d’honneur à l’oreille de l’enfant.
    Elle ajouta tout bas, comme pour elle-même :
    — Beau roi Henri, deuxième du nom...
    Environs de Compiègne.
    J eté dans un battement d’ailes, le rapace quitta le gantelet pour s’élever dans les airs. Quand il ne fut plus que poussière dans le ciel de midi, les chiens d’arrêt levèrent une corneille. Le prédateur attendit un instant, puis il fondit sur la proie comme un trait. On entendit alors le choc, si caractéristique, des deux oiseaux.
    — Il a pris un coup ! lâcha le chancelier de France  6 en serrant des poings gantés.
    Car il pensait le gerfaut blessé. Cela fit sourire alentour.
    — Pardon, maugréa le duc
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