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La Prison d'Édimbourg

La Prison d'Édimbourg

Titel: La Prison d'Édimbourg
Autoren: Walter Scott
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pauvre cœur, répondit Halkit, faisant de son mieux pour dire un bon mot.
    – On pourrait dire aussi que c’est un cœur haut, un grand cœur, répondit l’avocat ; vous voyez que lorsqu’il s’agit de cœur, je puis vous en montrer.
    – Je suis au bout de toutes mes pointes sur le cœur, dit le plus jeune de ces messieurs.
    – Alors il faudra choisir un autre sujet, répondit son compagnon ; et, quant à la vieille Tolbooth condamnée, quelle pitié de ne pas lui rendre les mêmes honneurs qu’on a rendus à plusieurs de ses locataires ? Pourquoi Tolbooth n’aurait-elle pas aussi ses dernières exhortations, sa confession, ses prières des agonisans ? Ses vieilles pierres seront, à peu de chose près, aussi sensibles à cet honneur que maints pauvres diables pendus du côté de sa façade occidentale, tandis que les colporteurs criaient une confession dont jamais le patient n’avait entendu parler.
    – J’ai bien peur, répondis-je, si toutefois il n’y a pas trop de présomption à donner mon opinion, que l’histoire de cet édifice ne fût un tissu de crimes et de douleurs.
    – Non pas tout-à-fait, mon ami, dit Hardie ; une prison est un petit monde par elle-même : elle a ses affaires, ses chagrins, ses joies qui lui sont propres ; ses habitans quelquefois n’ont que peu de jours à vivre, mais il en est de même des soldats au service ; ils sont pauvres relativement au monde du dehors, mais il y a parmi eux des degrés de richesses et de pauvreté, et plusieurs d’entre eux jouissent d’une opulence relative ; ils n’ont pas grand espace pour se promener, mais la garnison d’un fort assiégé, l’équipage d’un navire en pleine mer, n’en ont pas davantage, et même à certains égards ils se trouvent dans une position plus avantageuse, car ils peuvent acheter de quoi dîner tant qu’ils ont de l’argent, et ils ne sont pas obligés de travailler, qu’ils aient de quoi manger ou non.
    – Mais, répondis-je (non sans penser secrètement à ma tâche actuelle), quelle variété d’incidens pourrait-on trouver dans un ouvrage comme celui dont vous venez de parler ?
    – Ils seraient à l’infini, répliqua le jeune avocat : tout ce qu’il y a de fautes, de crimes, d’impostures, de folies, d’infortunes inouïes, de revers propres à jeter de la variété sur le cours de la vie, serait retracé dans les derniers aveux de la Tolbooth, et je trouverai assez d’exemples pour rassasier l’insatiable appétit du public pour l’horrible et le merveilleux. Les romanciers sont obligés de se creuser le cerveau pour diversifier leurs contes, et après tout, à peine peuvent-ils esquisser un caractère ou une situation qui ne soient usés et déjà familiers au lecteur, de sorte que leurs dénouemens, leurs enlèvemens, les blessures mortelles, dont leur héros ne meurt jamais, les fièvres dévorantes, dont leur héroïne peut être toujours certaine de guérir, sont devenus un véritable lieu commun. Moi je me joins à mon honnête ami Crabbe ; j’ai un malheureux penchant à espérer quand il n’y a plus d’espoir, et je me fie toujours à la dernière planche qui doit soutenir le héros du roman au milieu de la tempête de l’adversité. À ces mots le jeune avocat se mit à déclamer avec emphase le passage suivant :
    « J’ai eu jadis beaucoup de craintes (mais je n’en ai plus) lorsqu’une chaste beauté, trahie par quelque misérable, était enlevée avec tant de promptitude, qu’elle ne pouvait deviner par anticipation le sort cruel qui l’attendait. Aujourd’hui je ne m’effraie plus : – emprisonnez la belle dans des murs solides, creusez un fossé autour, mettez-y des serrures d’airain, des verrous de fer et des geôliers impitoyables ; qu’elle n’ait pas un sou dans sa bourse ; qu’elle éprouve les refus de tous ceux dont elle implorera la pitié ; que les fenêtres soient trop hautes pour oser les sauter ; que le secours soit si loin qu’on ne puisse entendre la voix qui l’appelle, quelque puissance secrète trouvera encore des moyens d’arracher sa proie au tyran déçu. »
    Ce qui tue l’intérêt, dit-il en concluant, c’est la fin de l’incertitude ; – voilà ce qui fait qu’on ne lit plus de romans.
    – Ô dieux, écoutez ! reprit son compagnon. Je vous assure, M. Pattieson, que vous n’avez qu’à faire une visite à ce docte gentleman, et vous êtes sûr de trouver sur sa table les nouveaux romans à la
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