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La polka des bâtards

La polka des bâtards

Titel: La polka des bâtards
Autoren: Stephen Wright
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chercher cette corde » – il désigna un enchevêtrement de
cordages entassés dans un coin – « et ficelle-moi ces volailles pour les
cuire à la broche. Je suis à présent aux commandes de ce vaisseau, et j’entends
que tous mes ordres soient exécutés avec promptitude et efficacité.
    — Vous vous trompez lourdement, affirma Wallace, si
vous croyez qu’un seul membre de mon équipage obéira à un seul de vos ordres.
    — Tu crois ça, l’Angliche, espèce de bâtard noir ?
Peut-être que le spectacle de leur maître bien-aimé ligoté et bâillonné, avec
un pistolet sur la tempe, provoquera chez eux un changement d’allégeance tout à
fait salutaire. Monday, sale crétin, cria-t-il au vieil homme qui bataillait en
vain contre le cordage, ose me dire que tu ne sais pas manipuler une
corde !
    — Mais, monsieur, regardez-moi toute cette diablerie,
gémit Monday en exhibant un nœud gordien de chanvre.
    — Liberty, va aider ce bourricot sans cervelle. Jésus
Marie Joseph, le jour où je rencontrerai un homme qui connaît son boulot et
l’exécute sans faute, ce jour-là je tomberai à genoux et je prierai pour être
délivré de cette vie, car il ne me restera aucun prodige à contempler sur cette
planète de ténèbres.
    — Si vous n’étiez pas aussi occupé à insulter ceux qui
vous entourent, suggéra Wallace, peut-être que ce pauvre bougre arriverait à
satisfaire vos exigences exaspérantes. Peut-être que cette charmante jeune
fille serait encore parmi nous au lieu de grossir les rangs des innombrables.
    — Liberty, fais-le taire, ce salaud de rosbif. Tu peux
commencer par lui fourrer sa casquette dans la bouche et la ficeler bien
serré. »
    S’accompagnant d’un répertoire complet (celui du parfait
oisif) de tics faciaux, d’effets vocaux et de contorsions corporelles destiné à
exprimer toutes les nuances possibles de l’agacement, du ressentiment et de
l’injustice subie, Liberty parvint enfin à démêler le cordage goudronneux en
une série de boucles impeccables qui pendaient à son poing. « Il va me
falloir un couteau.
    — Est-ce que quelqu’un, n’importe qui, pourrait faire
simplement ce qu’on lui demande ? s’écria Maury exaspéré. Contente-toi de
le ligoter comme le despote déchu qu’il est, et quand tu auras fini je couperai
l’excédent de corde. Je sais que j’aurais dû vous fournir des instructions
écrites, à Monday et à toi, mais il ne sait pas lire et tu ne sais pas penser,
ce qui explique pourquoi cette tâche triviale et élémentaire prend deux fois
plus de temps qu’elle ne devrait. Allez, Liberty, active-toi. Tu sais, c’est
censé être une mutinerie.
    — Bien missié. » Docilement, il s’approcha d’un
pas traînant, puis pivota et, sans prévenir, déploya le bras et fouetta le
visage stupéfait de Maury avec le rouleau de cordage. Un coup de feu partit, la
balle siffla menaçante à l’oreille de Liberty qui, de conserve avec Wallace et
les deux matelots, se précipitait pour plaquer Maury au sol dans un craquement
écœurant, sur quoi le capitaine, vautré de tout son long sur le vieux planteur,
roua de coups sa tête vulnérable avec une sauvagerie inattendue. « Ne lui
faites pas de mal ! » supplia Liberty, tentant de libérer son
grand-père des corps convulsifs. S’emparant des revolvers, Wallace se releva en
criant : « Mon navire ! Comment ose-t-il prétendre s’emparer de
mon navire ? » Les matelots redressèrent Maury sans ménagement et,
entre eux deux, le maintinrent captif. Monday, qui s’était sagement abstenu de
jouer le moindre rôle dans ce raffut entre Blancs, étudiait le résultat, à
l’abri derrière la roue du gouvernail : ses yeux jaunis, tombant le masque
comme rarement, brûlaient d’une flamme révélant ce qu’il pensait de ces
créatures creuses et criardes parmi lesquelles il avait été condamné à passer son
existence.
    « Il y a encore quelques minutes, déclara Maury
essoufflé par l’effort, je persistais à nourrir de grands espoirs pour toi,
Liberty ; mais quand un Maury se met à frapper un Maury, quelle qu’en soit
la cause, c’est la nature qui est violée, nos vertus sabordées. C’est ton
infernal esprit de contradiction qui empoisonne systématiquement tous les
plats, et je ne peux pas le digérer.
    — Ça ne vous arrive donc jamais d’arrêter votre moulin
à paroles ? s’énerva le capitaine. Beau parleur comme vous êtes, vous
seriez capable
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