Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La Papesse Jeanne

La Papesse Jeanne

Titel: La Papesse Jeanne
Autoren: Donna Cross
Vom Netzwerk:
de la chevelure de sa
mère et la trancher de sa lame. Les mèches soyeuses tombèrent avec un
crissement étouffé. Un long serpent d’or glissa sur le sol.
    Jeanne plaqua une
main sur sa bouche pour retenir ses sanglots, fit demi-tour et détala.
    Dans l’obscurité,
elle percuta une forme, et cette forme l’étreignit. Prisonnière, elle poussa un
cri perçant. La monstrueuse main noire ! Elle l’avait oubliée. Elle se
débattit, frappant les ténèbres à l’aveuglette de ses petits poings, mais la
chose, trop forte pour elle, la maintenait fermement.
    — Jeanne !
Jeanne, rassure-toi. C’est moi !
    Malgré sa peur,
les mots portèrent. Elle reconnut Matthieu, son frère de dix ans. Il venait de
rentrer avec leur père.
    — Jeanne,
cesse de te débattre ! Tout va bien. C’est moi.
    La fillette
tendit le bras et sentit sous ses doigts la surface lisse de la croix de bois
que son frère portait toujours autour du cou. Poussant un soupir de
soulagement, elle se laissa aller contre lui.
    Tous deux s’assirent
dans l’ombre, écoutant le chuchotement de la lame qui s’acharnait sur les cheveux
de leur mère. À certain moment, elle cria de douleur. Matthieu jura à haute
voix. Un sanglot s’éleva en guise de réponse. Il venait du lit où Jean, son
cadet, âgé de sept ans, s’était réfugié sous les couvertures.
    Enfin, la dague
cessa de crisser. Après un silence, le chanoine se mit à psalmodier une
oraison. Jeanne sentit Matthieu se détendre. C’était fini. Elle noua les bras
autour de son cou et pleura. Il la berça tout doucement.
    Elle finit par
lever les yeux sur lui.
    — Père a
traité Mère de païenne.
    — Oui.
    — Elle ne l’est
pas, bredouilla Jeanne, hésitante. N’est-ce pas ?
    — Elle l’a
été. Il y a très longtemps. Plus maintenant. Mais elle était en train de te
conter une histoire païenne.
    Intéressée,
Jeanne cessa de pleurer.
    — Tu connais
le premier des Commandements, n’est-ce pas ? demanda Matthieu.
    — « Un
seul Dieu tu adoreras et aimeras parfaitement. »
    — Oui. Cela
veut dire que les dieux dont t’a parlé Mère sont des imposteurs. Parler d’eux
est un péché.
    — C’est pour
cela que Père... ?
    — Oui, coupa
Matthieu. Mère devait être punie pour le salut de son âme. En outre, elle a
désobéi à son mari, ce qui va aussi à l’encontre de la loi de Dieu.
    — Pourquoi ?
    — Parce que
c’est écrit dans le saint Livre. « Car l’époux prime l’épouse. Les femmes
doivent donc se soumettre à leurs maris en toute chose. »
    — Pourquoi ?
    — Pourquoi ?
répéta Matthieu, pris de court par une question que personne ne lui avait
jamais posée. Eh bien, je suppose que c’est... parce que les femmes, par
nature, sont inférieures aux hommes. Les hommes sont plus grands, plus forts,
et plus intelligents.
    — Mais...
    — Assez de
questions, petite sœur. Tu devrais être au lit. Viens donc.
    Il la porta jusqu’au
lit et la déposa près de Jean, déjà endormi. Matthieu s’était montré bon envers
elle. Par gratitude, Jeanne consentit à se glisser sous les couvertures et à
fermer les yeux, comme pour dormir.
    Mais elle était
bien trop agitée pour trouver le sommeil. Dans le noir, les yeux ouverts, elle
considéra Jean.
    Il a sept ans,
et il ne sait pas réciter le psautier. Bien qu’elle
n’en eût que quatre, elle connaissait les dix premiers psaumes par cœur.
    Jean n’était pas
si intelligent que cela. Et pourtant, c’était un garçon. Mais comment Matthieu
aurait-il pu se tromper ? Matthieu savait tout. Il allait devenir prêtre,
comme leur père.
    Étendue dans le
noir, elle retourna longuement le problème, dans tous les sens.
    Vers l’aube, elle
s’endormit d’un sommeil nerveux, peuplé de rêves de guerre entre dieux jaloux
et irascibles. L’ange Gabriel en personne descendait du ciel, armé de son
glaive de feu, afin d’affronter Thor et Freya. Au terme d’une furieuse
bataille, les imposteurs étaient défaits, et Gabriel se dressait, seul et
triomphant, devant les portes du paradis. Son glaive avait disparu. Dans sa
main brillait une dague de chasse à manche d’os.

2
    Le style de bois
courait avec agilité sur la cire jaune de la tablette, traçant des lettres, des
mots entiers. Jeanne, les yeux ronds, se tenait juste derrière l’épaule de
Matthieu pendant que celui-ci recopiait ses leçons du jour. De temps à autre,
il s’arrêtait et promenait la flamme d’une
Vom Netzwerk:

Weitere Kostenlose Bücher