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La Papesse Jeanne

La Papesse Jeanne

Titel: La Papesse Jeanne
Autoren: Donna Cross
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divinités
festoyaient, Wotan méditait sur les vérités que lui soufflaient Pensée et
Mémoire au creux de l’oreille.
    Jeanne hocha
gaiement la tête. C’était sa partie préférée de l’histoire.
    — Parlez-moi
du Puits de Sagesse, supplia-t-elle.
    — Bien qu’il
fût déjà fort sage, Wotan recherchait sans cesse une sagesse plus grande
encore. Un jour, donc, il se rendit devant le Puits de Sagesse, gardé par Mimir
le Sage, et demanda la permission d’y boire. « Quel prix es-tu prêt à
payer ? » demanda Mimir. Wotan répondit que Mimir pouvait lui
demander ce qu’il désirait. « La sagesse ne s’acquiert que par la
souffrance, répondit celui-ci. Si tu veux boire de cette eau, il te faudra
sacrifier l’un de tes yeux. »
    — Et Wotan l’a
fait, n’est-ce pas, Mère ? Il l’a fait !
    Gudrun opina.
    — C’était un
choix très douloureux, mais Wotan consentit à perdre un œil. Il but l’eau.
Ensuite, il transmit à l’humanité la sagesse qu’il venait d’obtenir.
    Jeanne leva sur
sa mère un regard immense et grave.
    — Vous
auriez fait pareil, Mère ? Vous l’auriez fait pour être sage, pour tout
connaître ?
    — Seuls les
dieux font de tels choix.
    Puis, voyant que
sa fille continuait de la fixer d’un air interrogateur :
    — Je ne
crois pas. J’aurais eu bien trop peur.
    — Moi aussi,
fit Jeanne, songeuse. Mais j’aurais bien voulu être capable de le faire. J’aurais
tellement voulu savoir ce que le puits avait à m’apprendre !
    Gudrun sourit.
    — Peut-être
n’aurais-tu pas aimé ce que tu aurais appris là-bas. Mon peuple a un dicton qui
dit : « Le cœur d’un sage est rarement heureux. »
    Sans vraiment
comprendre, Jeanne hocha la tête.
    — Et
maintenant, parlez-moi de l’Arbre, murmura-t-elle en se blottissant de plus
belle contre sa mère.
    Et Gudrun
entreprit de lui décrire Irminsul, l’arbre de l’univers. Il se dressait jadis
au cœur du plus sacré des bois saxons, aux sources de la Lippe. Son peuple l’avait
vénéré jusqu’au jour où il avait été abattu par les armées de Charlemagne.
    — Il était
magnifique, expliqua-t-elle, et si haut que nul ne pouvait en voir la cime.
    Elle s’arrêta
net. Sentant tout à coup une présence, Jeanne leva les yeux. Son père se tenait
sur le seuil. Gudrun s’assit.
    — Mon mari ?
fit-elle. Je ne vous attendais pas avant la prochaine lune.
    Le chanoine ne
répondit pas. Il prit un cierge sur la table près de la porte, s’avança vers l’âtre,
et l’alluma.
    — La petite
a eu peur du tonnerre, expliqua Gudrun, anxieuse. J’essayais de la réconforter
en lui racontant une innocente légende.
    — Innocente !
s’écria le chanoine d’une voix tremblante de rage contenue. Comment peux-tu
voir de l’innocence dans un tel blasphème ?
    Il fut devant le
lit en deux foulées, posa son cierge et arracha la couverture, découvrant la
mère et la fille. Jeanne, à demi cachée par un rideau de cheveux d’or, avait
les bras serrés autour du cou de Gudrun.
    Pendant un long
moment, il contempla, stupéfait et incrédule, les cheveux dénoués de sa femme.
Tout à coup, sa furie l’emporta.
    — Sorcière
païenne, comment as-tu osé ? Alors que je te l’avais expressément interdit !
    Il empoigna
Gudrun et entreprit de la tirer hors du lit. Mais Jeanne s’accrocha à sa mère.
Une ombre inquiétante passa sur les traits du chanoine.
    — Disparais,
ma fille !
    Jeanne hésita,
écartelée entre la peur et un désir inconscient de protéger sa mère. Celle-ci
la repoussa.
    — Va-t’en,
lui souffla-t-elle. Va-t’en vite.
    Jeanne relâcha
son étreinte, se laissa glisser sur le sol et partit en courant. Parvenue à la
porte, elle se retourna juste à temps pour voir son père attraper sa mère par
les cheveux, lui renverser la tête en arrière et la forcer à se prosterner.
Jeanne revint sur ses pas. La terreur l’arrêta net quand elle vit son père
dégainer la dague de chasse à manche d’os attachée à sa ceinture de corde.
    — Forsachistu
diabolae ? demanda-t-il à Gudrun, en une sorte
de murmure.
    Comme elle ne
répondait pas, il appuya le tranchant du couteau contre sa gorge.
    — Dis les
mots, gronda-t-il, menaçant. Dis-les !
    — Ec forsacho
allum diaboles, répondit Gudrun, les yeux emplis de
larmes de défi. Wuercum and wuordum, thunaer
ende woden ende saxnotes ende allum...
    Paralysée de
peur, Jeanne vit son père soulever une lourde poignée
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