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La nef des damnes

La nef des damnes

Titel: La nef des damnes
Autoren: Viviane Moore
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s’échapper.
    Hugues avait ordonné une battue et le pauvre bougre avait été retrouvé dans une grotte au sud de l’île, il ne reconnaissait plus personne et parlait avec effroi de la voix.
    — Tout d’abord, reprit Osmond, le chevalier du guet qu’il a exécuté devant nous pour nous faire comprendre qu’il ne plaisantait pas. Pauvre chevalier, seul contre tous, ils ont joué longtemps avec, se l’envoyant et le blessant jusqu’à ce qu’il soit recouvert de sang. Enfin, ils l’ont attaché à un arbre et l’ont étripé avec leurs crochets, comme une pièce de viande à l’étal du boucher. Et il n’est pas mort tout de suite...
    Blême, le chancelier s’était signé. À table, tout le monde s’était tu. Ceux qui avaient vécu l’horrible scène la revivaient encore.
    — Paix à son âme, c’était un homme valeureux, finit par ajouter Osmond.
    — Le Diable se jouait de notre peur, renchérit le cellérier Bernard. Il marchait dans le dortoir la nuit en prononçant nos noms. Il nous réveillait soudain en nous disant que nous allions mourir ou se mettait à hurler comme un loup au milieu de la cour. Cela a rendu fou l’un de nos novices, Roger, un innocent que sa voix terrifiait. Nous n’avons retrouvé que sa bêche, nous ne savons s’il s’est jeté du haut d’une falaise ou si l’un des pirates l’a assassiné sauvagement.
    — Comme frère Paul, remarqua Dreu avec tristesse.
    Il m’avait demandé mon aide pour s’enfuir et je n’ai pas compris que sa vie était en danger. Je ne l’ai pas aidé, mes frères.
    — Vous ne pouviez deviner ce qui se passait, le consola Hugues. Comment imaginer une telle machination ?
    — Le camérier, l’hôtelier, l’abbé, l’infirmier... Et ce pauvre Jean qui jamais ne reviendra à la raison. Il a tué tant des nôtres, reprit le chancelier.
    — Croyez bien qu’il en aurait tué davantage s’il l’avait pu, remarqua l’Oriental. Mais en même temps, il voulait garder un aspect de vraisemblance à votre communauté et peu de ses hommes étaient capables de se glisser comme lui ou son frère dans la robe des cisterciens et de lire les textes sacrés. Voyez frère Iñigo, et même celui qui remplaçait votre portier Jean.
    — Mais comment avez-vous su...
    — Oh, je me suis laissé prendre, moi aussi ! protesta l’Oriental. Pourtant, une chose que Rohard ne pouvait prévoir, c’est la connaissance qu’avait frère Dreu de cette île et de ses habitants. Et le fait qu’il nous en avait abondamment parlé pendant ce voyage. C’est grâce à cela que se sont éveillés mes premiers soupçons : quand ils ont tardé à venir nous accueillir, quand ceux que nous prenions pour Joce et Henri ont montré un intérêt trop vif pour le jarl et notre périple. Une foule de petits détails. Ce moine fou entraperçu par Tancrède près de la source. Ces tombes fraîches et la mise en terre brutale de frère Paul et du marin. Très vite, les choses se sont mises en place dans mon esprit, mais pas assez vite car le piège se refermait déjà. Le Diable tuait Jacques. L’abbé basculait dans la folie. Je devais mettre en place une chausse-trape. Vous connaissez la suite.
    Un murmure d’approbation parcourut la salle. Les verres de vin se remplirent à nouveau. Tous, même les marins, cherchaient réconfort et chaleur pour lutter contre la sensation d’horreur qui les envahissait. Tancrède se rappela les supplices décrits par le Diable. Que leur serait-il arrivé s’ils avaient été à la merci de la folie meurtrière de Rohard ? Il frissonna et vida son verre d’un trait.
    Hugues se rassit et se tourna vers Eleonor, assise à ses côtés. La jeune femme lui sourit. Le cellérier Bernard se racla la gorge et se leva à son tour, saluant l’assistance. Il avait posé devant lui deux parchemins cachetés dont l’un était un rouleau.
    — Si vous permettez, messire. Suite à la réunion de notre chapitre ce matin, nous aimerions vous demander deux faveurs. Tout d’abord, pouvoir vous confier le rouleau des morts à faire parvenir à nos frères sur le continent.
    Hugues hocha la tête et saisit le long rouleau où figuraient les noms et les titres des moines décédés à Cabo Ros, une liste qui circulerait pendant longtemps au sein de l’ordre et dont le texte s’allongerait au fur et à mesure, s’enrichissant de tous les commentaires écrits dans chacune des abbayes cisterciennes.
    — Bien sûr, mon frère.
    — Mais
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