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La Marquise de Pompadour

Titel: La Marquise de Pompadour
Autoren: Michel Zévaco
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Jeanne… Ces toiles, ces marbres, ces bronzes, m’attristent… Cette profusion de menus meubles avec leurs porcelaines de Chine et leurs magots du Japon m’encombrent au lieu de me distraire… Cette Diane antique même…
    – Peste !… Et cette bibliothèque… un tant soit peu amoureuse… aux volumes reliés de précieux maroquins gaufrés d’or ?
    – Hélas ! j’ai trop à faire de lire au fond de mon cœur…
    – Diable ! diable ! Et ces bergers de mon admirable maître Watteau qui font pendant à ces vierges du sublime Raphaël ?… Et ces tentures de Chine où des oiseaux sacrés perchés sur une patte rêvent aux bords des lacs mystérieux que couvrent des fleurs inconnues ?… Et ces grands miroirs de Venise qui reflètent à l’infini les richesses entassées dans cet atelier par votre goût prodigue ?…
    – Tout cela, maître, me devient étranger… que dis-je ? hostile !… Tout cela me crie que je suis une pauvre créature dévoyée, jetée hors du milieu qu’elle eût chéri !… Tout cela m’emplit les yeux et me laisse l’âme vide…
    – Voyons… vous êtes trop nerveuse, dit le peintre ému.
    – Non, non !… Je sens que je n’étais pas née pour cette existence de clinquant. Ah ! maître, mon cœur veut vivre !… Vivre !… Aimer !… Et je devine, autour de moi, dans l’ombre de ces richesses, des mains qui me poussent vers de fatales destinées… J’adore les fleurs, l’air pur, les grands espaces… et je sens que je vais me noyer dans un océan de boue dorée… Le soleil brille, maître… et je m’ennuie… j’ai peur… Ah ! j’ai peur de la catastrophe sournoise et lâche qui, peut-être à la minute même où je parle, s’en vient sur moi !…
    Jeanne cacha son visage dans ses deux mains et des larmes perlèrent à travers ses doigts fuselés.
    Plus ému qu’il n’eût convenu à son scepticisme seigneurial, – les grands artistes sont grand seigneurs –, le peintre se leva et se dirigea, les deux mains tendues, vers la jeune fille.
    A ce moment, la porte s’ouvrit et un valet annonça :
    – M. Le Normant d’Etioles !…
    François Boucher demeura cloué sur place.
    Jeanne essuya vivement ses yeux et se souleva, les yeux fixés sur la porte, soudain affreusement pâle.
    – La catastrophe ! murmura-t-elle.
    Celui que, dans le vestibule, M me  Poisson avait arrêté au passage, l’homme petit, chétif et malingre, entra, le chapeau sous le bras, la main gauche appuyée sur la garde d’une épée outrageusement enrichie de gros diamants. Il entra en souriant, et s’inclinant devant Jeanne :
    – Vous m’attendiez ?… Parbleu ! Je suis impardonnable… Un maudit duel où j’ai dû servir de second à un de mes amis en fut l’unique cause… Daignez-vous agréer mes humbles excuses avec mes hommages ?…
    – Vous êtes tout excusé, monsieur, balbutia Jeanne.
    – Vous êtes adorable, dit M. d’Etioles en se redressant, et plus généreuse que Louis le Grand qui se fâchait pour avoir failli attendre… tandis que vous pardonnez, ayant attendu…
    Et il se tourna vers le peintre en le saluant froidement.
    – Fi ! la vilaine figure de mal-oiseau ! murmura François Boucher qui, baisant la main que lui tendait la jeune fille, répondit au salut de l’homme par un salut d’une grâce impertinente et se retira en fredonnant l’air de menuet que M me  du Hausset venait d’interrompre.
    – Laisse-nous, Louise ! fit Jeanne avec un effort visible.
    M me  du Hausset disparut, s’évapora comme le fantôme de la discrétion.
    Alors, celui qu’on appelait Le Normant d’Etioles s’assit en face de Jeanne et demanda :
    – M. de Tournehem n’est pas encore ici ?
    – Vous le voyez, monsieur, dit Jeanne en cherchant à dompter le tremblement nerveux qui l’agitait.
    – Ce cher oncle ! reprit M. d’Etioles sans paraître remarquer le trouble et la pâleur de la jeune fille. Je suis passé tout à l’heure en son hôtel du quai des Augustins pour lui dire qu’aujourd’hui même vous auriez une bonne nouvelle à lui annoncer…
    – Une bonne nouvelle !… Moi !… s’écria Jeanne qui, de pâle qu’elle était, devint très rouge.
    – Oui… celle que je vais vous annoncer moi-même, cousine.
    – Voyons, murmura faiblement la jeune fille.
    Le Normant d’Etioles se leva, la salua en souriant d’un sourire qui la glaça et dit :
    – Ma chère cousine, j’ai l’honneur de vous
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