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La Légion Des Damnés

La Légion Des Damnés

Titel: La Légion Des Damnés
Autoren: Sven Hassel
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d'un hangar et retomba non loin de nous. Deux hautes cheminées d'usine s'écroulèrent. L'une d'elles parut se briser simultanément en plusieurs endroits. L'autre bascula lentement, d'un bloc, et disparut dans un énorme nuage de fumée. De toutes les maisons sises dans un large rayon autour de la gare, il ne resta pas pierre sur pierre.
    Le silence qui suivit cette apocalypse avait quelque chose de macabre et d'invraisemblable. Je m'ébrouai, me secouai, sortis du fossé, regardai autour de moi.
    — On y va, Vieux ? Encore une bonne de passée, hein ?
    Pas de réponse.
    Les deux jambes fracassées, la hanche gauche en bouillie, l'épaule de même.
    Je m'assis par terre, posai sa tête sur mes genoux, lui essuyai le front à l'aide de mon écharpe. Puis chuchotai :
    — Vieux ! Eh ! Vieux ! Tu crois que tu pourras tenir jusqu'au centre médical si je te porte ?
    Il ouvrit les yeux.
    — Le Vieux est foutu, Sven. Restons ici et donne-moi la main. Ce sera pas long. Allume-moi une sèche, si t'en as une...
    J'allumai une cigarette, la lui glissai entre les lèvres. Chaque mot qu'il disait le faisait souffrir.
    — Quand ce sera fini, tu écriras à la femme et aux gosses, hein Sven ? Tu connais le boniment : un pruneau dans la tempe et il a pas souffert... C'est pas terrible d'ailleurs... Sauf que ça me tire dans le dos quand je parle.... Tu garderas ma vieille pipe et mon couteau... Le reste, tu l'enverras chez moi avec les deux lettres qui sont dans mon portefeuille...
    Il resta un instant silencieux, les yeux clos, le corps agité de longs soubresauts. Je portai mon bidon à ses lèvres.
    — Une gorgée de schnaps, Vieux. Essaie de boire un coup...
    Il parvint à boire un peu d'alcool et rouvrit les yeux, marmottant laborieusement :
    — Le plus dur, c'est de te laisser tout seul, comme ça. J'espère que tu pourras rentrer dans ce petit pays où tu te sens chez toi... Tu m'en as raconté... tant de jolies choses.
    Lorsque tout fut terminé, je l'emportai sur mes épaules, trébuchant et glissant dans la boue et serrant les dents et pleurant comme un gosse, tandis que la sueur ruisselait dans mon dos et que ma respiration sifflait et sanglotait au fond de ma gorge.
    Les Russes me regardèrent, stupéfaits, déposer mon camarade mort sur le lit. Je me détournai, m'approchai de Von Barring.
    — Lui aussi, maintenant ! gronda-t-il. Je ne peux pas en supporter davantage...
    Il m'empoigna par les épaules et vociféra :
    — Je deviens fou, Sven ! Je me fais l'effet d'un boucher, chaque fois que je dois transmettre un ordre d'attaque.
    Sanglotant convulsivement, il se jeta dans un fauteuil boiteux et laissa tomber sa tête sur ses bras étendus en travers de la table.
    — Oh ! Dieu du ciel, mais que ça finisse ! Que ça finisse bientôt...
    Ensuite, il remplit deux verres de vodka. Deux verres à eau. Jusqu'à ce que ça déborde. Il en prit un, me tendit l'autre, et nous les liquidâmes d'un trait. Il les remplit une seconde fois, mais j'arrêtai son bras à mi-chemin de sa bouche.
    — Erik, lui dis-je, lâchons ça jusqu'à ce qu'on ait enterré le Vieux. C'est nous qui devons le faire, parce qu'on le connaissait. Après ça, on boira tout ce qui nous tombera sous la main, mais après seulement.
    Nous arrachâmes la croix gammée du drapeau dans lequel nous l'enveloppâmes.
    Tout en serrant ma jugulaire et en ajustant mon casque, je promène mon regard sur la compagnie dont je suis à présent le commandant.
    Dans cet espace, juste devant moi, s'est tenu, jadis, le sergent-chef Edel. Mort d'une typhoïde contractée au front, en 1943.
    Derrière lui, se tenait alors le sergent Bielendorf, grand gaillard toujours de bon poil, enterré vif avec l'ensemble du peloton n° 4, lors des combats pour la tête de pont de Kouban.
    A droite du deuxième peloton, se tenait le Vieux, broyé avant-hier au cours du bombardement d'un convoi de munitions.
    Derrière lui, le Strabsgefreiter Joseph Porta, parti pour le repos éternel avec le ventre ouvert par un couteau russe.
    Près de lui, Tom Pouce disparu.
    Et Pluton, décapité par une bombe dans la forêt de Rogilev.
    Hugo Stege, sous-officier, brûlé et éventré dans son tank.
    Asmus Braun, le toujours gai ; deux jambes et un bras emportés par l'explosion d'un obus, en février 1942.
    Bernhard Fleischmann, disparu dans la région de Moscou après s'être évadé d'un camp de prisonniers de guerre.
    Hans Breuer, lieutenant de police dégradé pour avoir
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