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La guerre des rats(1999)

La guerre des rats(1999)

Titel: La guerre des rats(1999)
Autoren: David Robbins
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disparition de leur unité. Cet homme — Nikki ignorait son nom — avait battu en retraite depuis les confins extérieurs du Chaudron, dans la steppe. De son peloton de sapeurs, il était le seul survivant. Il avait erré en direction de l’est jusqu’au centre de la ville. Quand il n’avait plus supporté le froid, il avait cherché refuge dans un bâtiment. Il avait pénétré dans les Barricades sans savoir ce qu’il cherchait au juste, poussé seulement par la fatigue et la faim.
    Comme ils l’avaient fait pour Nikki, les hommes de l’escouade avaient invité le sapeur à partager leur repas du réveillon : tôt ce matin, ils avaient abattu et fait cuire leurs deux mascottes. Des dobermans. Les autres soldats de la compagnie — une cinquantaine d’hommes un mois plus tôt, quand ils avaient été affectés aux Barricades — n’étaient plus en vie pour pouvoir voter contre le festin. Le sapeur avait pris place dans le cercle de ses nouveaux camarades, avait accepté une cigarette puis relaté sans émotion le sort de son peloton. Tous les autres étaient morts quand leur véhicule avait été touché par un obus de char, au cours d’un des innombrables accrochages avec les rouges à la limite du Kessel. Lui, il avait eu de la chance : il était juché sur le marchepied du camion et l’explosion l’avait projeté à plusieurs mètres de distance. Il avait achevé son récit par un haussement d’épaules, répétant, avec un rire sombre, « la chance ».
    Depuis la mort de Thorvald, cinq semaines plus tôt, Nikki avait lui aussi erré sur le champ de bataille. Le lieutenant Ostarhild était présumé mort dans la steppe, mais comme l’affectation de Nikki à son unité des services de renseignements n’avait pas été annulée, il s’était senti libre de poursuivre ses expéditions dans la ville. Il était devenu un collecteur de contes tristes. Des ruines du centre aux usines, les hommes croyaient tous qu’on les avait abandonnés. Leur espoir qu’Hitler viendrait au secours de la Sixième Armée avant qu’ils soient anéantis s’était amenuisé d’heure en heure et agonisait à présent, exsangue.
    Malgré la faiblesse des troupes allemandes et la position dominante que les Russes occupaient dans la steppe, les communistes ne cessaient de harceler la ville même. Mond comprenait la tactique des rouges : S’ils parviennent à nous maintenir sur la défensive, ici dans la ville, nous ne pourrons pas contre-attaquer. Nous ne pouvons pas sortir du Kessel. Leur objectif est de liquider la Sixième Armée.
    Face à ces assauts constants, Nikki avait été témoin d’actes de courage et de détermination qui redéfinissaient ce qu’il savait de la volonté humaine. Epuisés, démoralisés, privés de vivres, de munitions et même d’espoir, les soldats allemands avaient continué à se battre dans l’ordre. Les Soviétiques ne leur laissaient pas un instant de repos, n’épargnant pas même leurs programmes de fête à la radio.
    Pourtant, si Mond avait dû faire son rapport ce soir, il n’aurait pas parlé de la force de caractère et de la discipline des unités allemandes. Il aurait décrit des scènes d’horreur. Il avait vu des hommes aux yeux noirs, des cannibales, attendant comme des vautours qu’un blessé meure pour emporter le cadavre encore chaud. Ces goules étaient pourchassées et abattues à vue ; des patrouilles spéciales avaient été organisées pour les débusquer. Malgré ces mesures, des bandes de mangeurs de chair humaine, plus gras, plus roses de joues que leurs camarades affamés, rôdaient dans les usines et les maisons. Leur nombre croissait en même temps que leur hardiesse et leur désespoir.
    Dans sa relation des derniers jours de Stalingrad, Nikki aurait aussi évoqué des actes d’une incroyable stupidité. Il avait vu des He-III, les rares appareils qui parvenaient à trouver une brèche par temps couvert pour survoler le Kessel, lâcher leur cargaison de vivres non sur les positions de la Sixième Armée, mais au-dessus des Russes, qui avaient appris à imiter les signaux allemands. Lorsque le parachutage s’effectuait bien au-dessus des lignes allemandes, des soldats affamés couraient pour être les premiers sous la grande toile de soie, se bousculaient comme des porcelets autour des caisses en pin. Il arrivait qu’ils y découvrent en les ouvrant non le jambon, le lait en poudre, les balles et les vêtements chauds qui les auraient maintenus en
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