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La Gloire Et Les Périls

La Gloire Et Les Périls

Titel: La Gloire Et Les Périls
Autoren: Robert Merle
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père, il en rit à gueule bec et me
dit : « Cela, mon fils, est son père tout craché ! Quelle jolie
rebuffade ! Le bon roi Henri n’aurait pas dit mieux ! »
    Lecteur, cette réponse, la voici :
    — Messieurs, Dieu veuille que ce soit du bon du cœur
que vous me tenez ce langage, et que la seule nécessité où vous êtes ne soit pas
la cause de votre gratitude. Vous vous êtes servis de toutes sortes
d’inventions et de malices pour vous soustraire à mon obéissance. Je vous
pardonne vos rébellions. Si vous m’êtes bons et fidèles sujets, je vous serai
bon prince. Et si vos actions sont conformes à vos protestations, je vous
tiendrai ce que je vous ai promis…
     
    *
    * *
     
    Le mardi trente et un octobre, je me levai à la pique du
jour, ainsi que Sir Francis, Nicolas, Hörner et la suite qu’il avait choisie
pour escorter ma carrosse. Nous devions tôt le matin évacuer les soldats
anglais de La Rochelle, avant que le premier contingent des nôtres pût pénétrer
dans la ville pour l’occuper. Comme ces pauvres Anglais étaient pour la plupart
trop faibles pour marcher, des charrettes furent mises à notre disposition pour
les conduire jusqu’à Chef de Baie où les chaloupes devaient venir les prendre
pour les amener aux vaisseaux de la flotte anglaise, Sir Francis ne voulant à
son tour monter à bord du navire amiral que lorsqu’ils seraient tous embarqués.
Il les compta à cette occasion : ils étaient soixante-quatre. Sir Francis
voulut à tout prix que je l’accompagnasse à bord, et m’y présenta comme
« My Lord Diouk d’Orbiou » à Lord Lindsey, par qui je fus incontinent
prié à déjeuner. À peine fûmes-nous à table qu’il demanda à Sir Francis de lui
faire un récit de ce qui s’était passé depuis que Buckingham l’avait installé à
La Rochelle avec ses hommes.
    — Il y a un an de cela, dit Sir Francis d’une voix
sourde, et comme mes hommes se sentirent heureux, après la désastreuse campagne
de l’île de Ré, de s’installer à La Rochelle, où ils furent merveilleusement
accueillis par des gens qui les considéraient comme les devant sauver. Et
quelle belle et prospère ville était alors La Rochelle, propre comme un sou neuf,
avec une population gaie et laborieuse, de nombreux enfants qui couraient de
tous côtés dans les rues et sur le port, et bien je me ramentois que j’étais
réveillé le matin par des Rochelaises, qui chantaient le matin en battant le
linge dans les lavoirs. My Lord, vous n’oyez plus, meshui, le moindre chant. Et
non plus ne voyez plus d’enfants. Ils sont morts les premiers. Et partout dans
les maisons déshabitées et dans les rues, vous n’apercevez plus, jonchant le
sol, que des cadavres squelettiques que personne n’a plus la force d’enlever
pour les porter au cimetière. Quant à mes hommes, ils étaient six cents à leur
advenue céans, mais la mort lente de la famine les ayant décimés, ils ne sont
plus que soixante-quatre et il est malheureusement à prévoir que d’aucuns
d’entre eux, nourris trop tard, trouveront dans l’océan leur dernière demeure.
    Dès que je le pus en toute courtoisie, je quittai Lord
Lindsey et Sir Francis, non sans qu’ils ne me fissent au départir des
merciements sobres et simples, mais dans leur sobriété même, émus et amicaux.
Je me hâtai de rejoindre Louis, lequel devait à neuf heures, devant le fort de
Beaulieu, passer en revue le premier contingent qui allait occuper La Rochelle.
Je ne le vis pas de prime, mais le maréchal de Schomberg m’aperçut, s’avança
vers moi à grands pas – et Dieu sait s’ils étaient grands ! – et
me donna à l’étouffade une forte brassée qui n’était pas de cour, mais de cœur.
    Peux-je vous ramentevoir, belle lectrice, que s’il y avait
un mot pour définir Schomberg, c’était bien le mot fidélité : il était en
effet adamantivement fidèle à son épouse, à son roi, à ses amis. Il me gardait
et me garderait toujours une infinie gratitude, pour avoir, comme vous savez,
intercédé auprès de Louis, afin qu’il le relevât d’une disgrâce où de faux
rapports l’avaient jeté. De mon côté, je le tenais en grandissime estime, et
j’aimais aussi qu’il eût gardé de ses origines bavaroises une fort plaisante
jovialité.
    — Mon ami, dit-il (parole qui dans sa bouche avait un
sens), si c’est Louis, comme je crois, que vous cherchez, vous ne le trouverez
mie. Il parcourt les rangs et envisage les
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