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La gigue du pendu

La gigue du pendu

Titel: La gigue du pendu
Autoren: Ann Featherstone
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savions qu’il ne risquerait pas la vie de ses hommes pour récupérer des corps d’enfants morts. Pourtant, nous espérions que les monstres responsables de ces crimes seraient traduits devant la justice, et nous parcourions les journaux à la recherche d’un article rapportant une arrestation ou une présentation au tribunal. Mais après nous avoir entendus, le sergent Bliss n’a donné aucune nouvelle. Il avait d’autres soucis, plus urgents. Une jeune femme avait été tuée dans l’arrière-cour d’un cabaret de Whitechapel, et l’on craignait que l’assassin ne se livre à un massacre. De plus, a dit Will en se tapotant le nez, il y avait peut-être des gens qui voulaient étouffer l’affaire. Des messieurs qui avaient fréquenté Fish Lane et préféraient prendre leurs distances.
    Ainsi donc, nous avons attendu en espérant, mais les semaines ont passé et nous étions toujours aussi mal à l’aise. L’ombre du Grand Méchant continuait de s’étendre sur Londres.
    C’était la veille de Noël. Nous étions invités, Will Lovegrove, Trimmer et moi, à l’Aquarium pour « ouvrir la saison des fêtes ». Après nos récentes aventures et ces lugubres soirées passées à les ressasser, la perspective d’aller rendre un hommage saisonnier à la Princesse, Herr Swann et Moses Dann (s’il était, comme disait Will, « debout sur ses os ») n’était pas déplaisante. Nous étions un peu éméchés (nous avions déjà profité de l’hospitalité du Two Nuns et du Yorkshire Grey ) en allant par les rues verglacées, accompagnés par une version enlevée de The Mistletoe Bough , que Will chantait tout en s’interrompant à intervalles réguliers pour saluer une jeune beauté d’un « Joyeux Noël ! », voire, s’il y parvenait, l’embrasser sur la joue. Après avoir évité de justesse tout incident, nous nous sommes précipités à l’Aquarium, pénétrant dans le hall où Mr Abrahams avait absolument voulu dresser un sapin de Noël (bien qu’il soit israélite) orné de friandises et de chandelles dans des bougeoirs fantaisie. Je me suis empressé de tirer le verrou : chaque fois que cette porte s’ouvrait, un courant d’air venant de la rue allait éteindre les chandelles, et j’avais passé ma journée à les rallumer !
    Nous avons fait halte pour admirer l’arbre, et Trim n’a pu s’empêcher de voler un sucre d’orge rayé de rose sur une branche élevée, le croquant tout en grimpant les marches du grand escalier jusqu’au salon du premier étage. Voici la compagnie qui nous attendait : la Princesse sur son trône, Herr Swann d’un côté, Barney de l’autre, et Moses Dann enveloppé dans une couverture orientale pour se prémunir du froid. Il y avait également là des nouveaux, le Professeur Long et ses deux filles, qui faisaient des démonstrations de force, La Milano, une dame dont la profession consistait à imiter les statues grecques en restant immobile pendant des heures, et le Colonel Buxton, grand soldat habile à l’épée. Même Mrs Gifford était présente, le regard dur et la lèvre pincée. Conn, un verre à la main (le Nocturne était déjà au travail), a été rejoint par Alf Pikemartin, qui est arrivé quelques minutes après nous en titubant. Mr Abrahams présidait une table couverte de verres de punch, de gâteaux, de douceurs, dont chacun pouvait se régaler. Enfin, Em, radieuse, n’ayant d’yeux que pour Will, qui est allé droit vers elle, lui a pris le bras et a commencé à déambuler avec elle à travers le salon, comme par un dimanche après-midi à Hyde Park. La fête avait déjà commencé, Herr Swann jouait au piano l’une de ses nouvelles polkas, La Milano en enseignait les pas au Colonel Buxton, et tout le monde riait, applaudissait, de fort bonne humeur.
    Un étranger qui aurait ouvert la porte se serait sûrement émerveillé de cette incroyable scène. Partout, un brasier de lumière, même dans les alcôves d’habitude les plus sombres. Sur chaque meuble, des chandeliers, et sur chaque rebord de fenêtre, des lanternes. Certes, les curiosités exposées ainsi éclairées perdaient de leur éclat : la momie égyptienne dans sa vitrine apparaissait craquelée, écaillée, même le squelette d’oiseau géant acquis depuis peu, suspendu au plafond par des cordes et des câbles, semblait moins monstrueux. Quant à mes amis, soumis aux feux de cette lumière crue, ils se révélaient sous leur vrai jour, pour ainsi dire.
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