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La force du bien

La force du bien

Titel: La force du bien
Autoren: Marek Halter
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continuèrent, bien entendu, de fréquenter leurs nombreux amis juifs.
    « Depuis ce temps-là, précise Iréna Sendler, je me sentais débitrice envers la nation juive. »
     
    La nation juive… ces mots me vont droit au coeur. Car, enfin, la famille Sendler ainsi que toutes les amies infirmières d’Iréna sont catholiques. Dans les années trente, Iréna Sendler n’hésite pas à faire front, à braver, à contester l’atmosphère antisémite qui règne alors à l’université de Varsovie. Sur les cartes d’étudiant figure la mention Juif ou Polonais  : de rage, sur la sienne elle raye Polonaise . Suspendue de l’université, elle n’obtiendra que cinq ans plus tard, grâce à des professeurs libéraux, son diplôme de sociologie. Elle évoque tout cela avec le sourire, et je devine l’ardeur de la jeune fille, jadis, qui entraînait ses camarades à refuser l’injustice.
    « Mais le Ghetto ? Les enfants que vous avez sauvés ? La guerre ?
    — Oui… Il faut se représenter ce qu’était le Ghetto de Varsovie pour comprendre », dit-elle.
    Iréna Sendler a raison. Beaucoup l’ignoraient – beaucoup l’ignorent aujourd’hui encore. En septembre 1939, le jour du Grand Pardon, du Yom Kippour, la Pologne est envahie par les armées de Hitler. Un an plus tard, le 2 octobre 1940, le gouverneur nazi Ludwig Fisher décrète la création du Ghetto de Varsovie. Tous les Juifs de la ville, soit trois cent soixante-huit mille personnes, ainsi que ceux des faubourgs et des campagnes avoisinantes, c’est-à-dire six cent mille êtres en tout – l’équivalent de la population d’une ville comme Lyon –, sont regroupés et enfermés dans l’espace de quelques rues, sur un territoire de quatre cent huit hectares littéralement coupé du monde.
    « Ah, le Ghetto ! poursuit Iréna Sendler. Les Allemands l’ont verrouillé à l’automne 1940. Ma meilleure amie, Eva, était juive, et, soudain, elle se trouvait du mauvais côté du mur ! Tout est venu d’Eva. Il fallait que je la sauve, je ne pouvais pas la laisser là-bas ! Je lui ai demandé de venir se réfugier chez moi. Elle a refusé. Elle pensait qu’on avait besoin d’elle à l’intérieur du Ghetto. Elle n’a accepté ma proposition qu’à la fin, quelques jours avant l’insurrection, en avril 1943.
    — Que faisait-elle dans la vie, votre amie Eva ?
    — Elle était assistante sociale, comme moi. Avant, nous nous occupions des pauvres, Polonais et Juifs, et surtout des enfants. Les Allemands, en occupant Varsovie, ont coupé toute aide sociale aux Juifs. Et lorsque le Ghetto a été fermé, avec interdiction d’en sortir, leur situation a empiré. Alors je me suis organisée avec des amies pour les secourir. Et… »
    La voici, la chaîne des mille Polonais nécessaires pour sauver un Juif…
    « Qui étaient ces amies ?
    — Mes collègues. Comme nous avions un budget officiel, nous donnions de l’argent aux Juifs dont nous nous occupions auparavant. Il suffisait de leur inventer des noms polonais sur nos formulaires…
    — Vous entriez dans le Ghetto ?
    — Oui.
    — Je croyais qu’il fallait un laissez-passer.
    — Les Allemands redoutaient les épidémies et laissaient circuler les voitures de désinfection et les ambulances. Grâce au docteur Makowski, un médecin qui dirigeait le service sanitaire du côté “ non juif ” de la ville, nous avions des laissez-passer et nous pouvions parcourir le Ghetto dans ces voitures de santé. Nous apportions de l’argent, de la nourriture. Mais la famine s’aggravait, et les enfants étaient les plus touchés. J’ai décidé de les sauver à tout prix. Je connaissais des hospices prêts à les accueillir à l’extérieur du Ghetto : il s’agissait juste de les faire sortir. Il y avait plusieurs possibilités, et d’abord les ambulances. Je déclarais que je venais évacuer un malade contagieux. Quand nous ressortions avec des enfants cachés dans la voiture, les Allemands s’écartaient sans contrôler, par peur de la contamination. Nous pouvions aussi soudoyer certains gardes. Et puis le Ghetto n’était pas totalement hermétique. Certaines maisons donnaient sur deux rues différentes, l’une dans le Ghetto, l’autre dans le Varsovie “ normal ”. Il y avait plusieurs bâtiments publics dans ce cas : le tribunal, par exemple, ou le dépôt de tramways de la place Krasinski. Enfin, nous connaissions des passages par des caves et des
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