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La fête écarlate

La fête écarlate

Titel: La fête écarlate
Autoren: Pierre Naudin
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triomphants.
    – Père, il y a sur le bât de cette mule deux quartiers de bœuf et deux de mouton… ainsi qu’un tonnelet de vin d’Anjou… Ce soir nous fêterons les fiançailles d’Aude !… Mais avant, je vous porterai la santé…
    Les mains en porte-voix, il cria :
    – Joubert et Le Guevel, descendez de cheval… Raymond, emmène Joubert en haut de la tour de la Fée… Qu’il y fixe la bannière des Argouges… Bien droite, afin qu’on la voie !
    Il se tourna vers son père :
    – Demain, à Coutances, j’en ferai faire une de trois aunes !
    – As-tu, mon fils, tant d’écus que cela ?
    – En petite suffisance, Père, car le présent du roi a fondu !
    Il vit Raymond et Joubert disparaître dans la tour ; il entendit leurs pas sur les degrés de pierre, et la bannière apparut, plus bleue que le ciel. Ses lions à l’incitation du vent semblaient donner des coups de griffes aux nuages. Bientôt, elle fut fixée aux entrelacs de pierre.
    – Bien, les gars… Descendez.
    Ogier fut sensible au silence empli du frémissement des grands arbres, de l’autre côté des douves. Soutenant son ventre et le nez levé vers les fauves dorés, Guillemette dit :
    – C’est beau.
    Elle en pleurait. Ogier s’adressa à ses compagnons d’armes :
    – Saluez !… Cette bannière mérite le respect…
    Ils dégainèrent et brandirent leur épée tandis que les hommes du château criaient : « Noël ! » les uns en agitant leur main, les autres, leur chaperon.
    – C’est bien, mon fils…
    De sa dextre soudain vive, rageuse, Godefroy d’Argouges écrasa une larme.
    – Jourden… et toi, Lesaunier, quand vous aurez aidé vos nouveaux compagnons, prenez-en cinq ou six avec vous – armés – pour aller chercher du bois… Ce soir, nous ferons ronfler les cheminées !
    Puis, tourné vers sa sœur, Ogier sourit :
    – La Guillemette semble un petit baril. Qui l’a mise en cet état ?
    – Nul ne le sait… Isaure prétend que c’est Courteille… Tu vois, on la croyait sage…
    Le garçon entendit Thierry s’ébaudir. Mais il n’était plus question de Guillemette : Le Guevel venait de lui remettre sa bannière.
    – Hé oui, m’amie, dit-il à Aude, surprise, voilà les armes que les juges de Chauvigny m’avaient données… Je les ai faites miennes… En êtes-vous contrariée ?
    – Nullement, répondit Godefroy d’Argouges pour sa fille.
    – Oh ! je vous en suis reconnaissant, messire… J’avais grand-peur que vous les trouviez bien… rustiques… Ogier, pourtant, m’avait dit qu’il n’en serait rien…
    Thierry s’animait, se sentant pour toujours accepté par la famille, responsable d’une jouvencelle dont le bonheur dépendrait de lui seul, et qu’il désirait de toutes ses forces comprendre, aimer, rassurer en toute chose, et protéger au besoin. Ces mains qui avaient tant serré le marteau et les tenailles de la forge, et qui savaient si bien manier l’épée, ces mains pour l’instant prisonnières des gantelets sauraient être douces ; et c’était un sentiment vivifiant que de savoir Aude éprise de ce cœur vaillant autant qu’il l’était d’elle…
    Ogier se tourna vers son père :
    – Venez… Allons nous reposer dans le tinel… Je suis las mais, de grâce, appuyez-vous sur moi…
    Il adressa au Ciel une fervente et muette prière : il fallait que Godefroy d’Argouges conduisît Aude à l’autel ; il fallait qu’il vécût des semaines, des mois… oui, des mois, afin de voir un enfançon naître de ces amours-là ! Il méritait aussi cette joie…
    – Que vas-tu faire, Ogier, à présent… Ton cœur est-il épris autant que celui d’Aude ? Marcaillou et Raymond m’ont parlé d’une pucelle…
    – Blandine, père… Il me faudra me rendre à Poitiers avec six hommes d’armes… Je la ramènerai…
    Se détournant avant de franchir le seuil, il vit Thierry, tenant Aude par la taille, converser avec Raymond et Marcaillou. Derrière, Guillemette lui jeta un regard énamouré, mais fut vite arrachée à ses pensées par Asselin. Était-ce lui, le vieux, qui l’avait engrossée ?
    – Ta cousine est venue, dit Godefroy d’Argouges en s’asseyant dans sa cathèdre.
    Ogier croisa le regard de son père.
    – Ma cousine ?
    – Tancrède… La fille de Guillaume.
    Il y avait de quoi être ébahi.
    – Que voulait-elle ?
    – Je ne sais… Elle pensait te trouver… Elle venait de Bretagne… C’était il y a un
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