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La Dernière Année De Marie Dorval

La Dernière Année De Marie Dorval

Titel: La Dernière Année De Marie Dorval
Autoren: Alexandre Dumas
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pas mourir sans
vous revoir.
    Je jetai un cri : je ne savais même point
qu’elle fût malade.
    Je me précipitai par les escaliers ; je
me jetai dans une voiture en criant : Rue de Varennes. Dix
minutes après, je sonnais à la porte. Luguet vint m’ouvrir le
visage ruisselant de larmes.
    – Mon Dieu ! lui dis-je, n’est-il
plus temps ?
    – Si fait ; mais hâtez-vous, elle
vous attend.
    J’entrai dans la chambre ; elle fit un
effort pour me sourire et me tendre les bras.
    – Ah ! c’est toi ; me
dit-elle ; je savais bien que tu viendrais.
    Je me jetai devant son lit en pleurant, la
tête cachée dans les draps.
    – Mes enfants, dit-elle, laissez-moi un
instant seule avec lui, j’ai quelque chose à lui dire ; il
vous rappellera bientôt, et vous ramènerez Merle. Je veux que tout
le monde soit là quand je mourrai.
    On sortit, me laissant seul avec elle.
    – Quand tu mourras !
m’écriai-je ; mais tu vas donc mourir ?
    Elle posa sa main sur mes cheveux.
    – Eh ! mon Alexandre, me dit-elle,
tu sais bien que depuis la mort de mon pauvre petit Georges je
n’attendais qu’un prétexte. Le prétexte est venu, et, comme tu
vois, je ne l’ai pas laissé échapper.
    – Oh ! mon Dieu ! mon
Dieu ! es-tu bien sûre que tu vas mourir ?
    – Regarde-moi.
    – Je ne te trouve pas si changée que tu
le dis.
    Elle mit la main à sa ceinture.
    – Je suis déjà morte jusqu’ici, dit-elle,
et si je ne t’avais pas attendu, je crois que je serais morte tout
à fait.
    – Eh bien ! tu avais quelque chose à
me dire ? Parle, mon enfant.
    – J’ai à te dire, mon bon Alexandre, que
je veux bien mourir, mais que je ne veux pas être jetée dans la
fosse commune.
    Je me redressai sur mes genoux.
    – Comment ! dans la fosse
commune ?
    – Oui, mon pauvre ami, tout est vendu,
tout est engagé, vois-tu. S’il reste à la maison de quoi acheter un
cierge pour brûler près de mon corps, c’est tout ; et, tu
entends, je mourrai désespérée, si je meurs avec l’idée de ne pas
être réunie à mon petit Georges.
    – Mais combien cela coûte-t-il donc un
terrain ?
    – Oh ! cher, très-cher, cinq ou six
cents francs.
    – Cinq ou six cents francs, oh !
pauvre amie, calme ta chère âme et meurs tranquille.
    – Tu t’en charges ?
    Je fis un signe de la tête, je ne pouvais plus
parler.
    Elle fit un effort, je sentis sur mon front la
pression de deux lèvres déjà froides.
    – Appelle-les, dit-elle, appelle-les, il
est temps.
    Je me précipitai vers la porte, et
j’appelai.
    Luguet et Caroline rentrèrent, soutenant Merle
qui se traîna jusqu’à un fauteuil.
    Je me reculai contre la muraille, je devais
céder la place aux enfants.
    Elle me chercha des yeux et me fit un
signe.
    Luguet avait pris ma place et s’était jeté la
tête sur son lit.
    Caroline pleurait à genoux.
    – Merle, Merle dit-elle.
    Puis, cherchant de la main Luguet, elle porta
cette main sur sa tête, parut réunir toutes ses forces et prononça
ces deux mots :
    RENÉ SUBLIME !
    C’étaient les derniers, elle était
morte !
    On entendit alors, dans la chambre funèbre,
cette plainte éternelle qui se redit à chaque heure du jour sur la
terre !…

Chapitre 9
     
    À partir de ce moment je n’avais plus à
m’occuper que d’une chose, c’était de tenir la promesse que j’avais
faite à la morte.
    Je courus chez moi ; j’ouvris tous mes
tiroirs ; je réunis deux cents francs ; je retournai rue
de Varennes, je les mis sur une table en disant :
    – En attendant.
    Puis je remontai dans mon cabriolet.
    Où diable irai-je chercher les trois ou quatre
cents francs restant ?
    Jusqu’au moment où Millaud a fait fortune, je
n’ai jamais eu pour amis que des gueux.
    Pardieu si Millaud avait été riche à cette
époque, j’aurais été chez Millaud.
    Mais il ne l’était pas.
    Je ne connaissais aucun ministre ; je
n’en passai pas moins leurs noms en revue, et je m’arrêtai à celui
de M. Falloux.
    Pourquoi plutôt M. Falloux qu’un
autre ? Je n’en sais ma foi rien.
    Je crois cependant me rappeler qu’il avait
fait un assez beau discours la veille, et il me semblait qu’un
homme éloquent devait être un homme bon.
    Je me fis annoncer chez M. Falloux, qui
me reçut à l’instant même.
    Il s’avança vers moi évidemment fort étonné de
ma visite : nous étions loin d’être de la même opinion, et en
1849 l’opinion était encore pour quelque chose dans les
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