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La couronne de feu

La couronne de feu

Titel: La couronne de feu
Autoren: Michel Peyramaure
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promettre. Mes frères du Paradis supportent mal d’autres présences que la mienne. J’accéderai volontiers au souhait de Mme Boucher, mais à une condition : qu’elle ne ronfle pas.
    Le bonhomme éclata d’un rire cristallin, fit voltiger ses bagues dans un rayon de soleil.
    – Amusant... très drôle... Je tiens à vous rassurer : mon épouse a des sommeils de nourrisson. D’ailleurs je suis persuadé qu’elle tiendra à rester éveillée dans l’attente d’une visite céleste.
    Il n’y eut pas d’apparition la première nuit, pas plus que les suivantes : les acteurs du spectacle nocturne devaient être retenus ailleurs. En revanche, la dame tint le devant de la scène une partie de nuit : bavarde comme une pie elle jacassait, dévidait en monologue ses amours de jeunesse, son mariage, la naissance de ses douze enfants et, ce qui retint davantage l’attention de sa compagne de lit, la situation de la ville et de la contrée durant l’occupation par les Anglo-Bourguignons et qui fut un calvaire.
    – Pardonnez à mon bavardage, dit-elle, mais avec mon époux, trop pris par ses occupations, les entretiens sont rares et de peu d’intérêt pour ce qui me concerne.
    Elle creusa à coups de reins nerveux sa place dans le matelas, prit la main de Jeanne après avoir soufflé la chandelle et dit à voix haute son Credo.
    – Précautions indispensables, je suppose, dit-elle, pour favoriser l’apparition de vos frères du Paradis.
    Elle se croyait à un spectacle d’ombres.
     
    Après quatre jours passés à Compiègne, Jeanne eut la surprise, la veille du départ, de recevoir une lettre du comte Jean d’Armagnac. Après celui de Foix il était considéré comme le seigneur le plus puissant au sud de la Loire. Elle fit lire cette lettre à Jean d’Alençon.
    – Le comte d’Armagnac, dit-il, demande ton avis au sujet des querelles qui agitent le Saint-Siège. Selon toi, qui est le vrai pape ? Martin V qui réside à Rome, Clément VII qui s’est exilé à Peñiscola, en Espagne, dans le royaume de Valence ? Le cardinal de Saint-Étienne qui se fait appeler Benoît XIII ?
    Il lui relut la fin de la missive : Veuillez supplier Notre-Seigneur Jésus-Christ qu’il veuille dans sa miséricorde infinie déclarer par vous lequel des trois susdits papes est le vrai et auquel nous devons croire. Nous serons tout prêts de faire selon le vouloir et le plaisir de Notre-Seigneur.
    Il s’écria joyeusement :
    – Tu es tenue, toi, la petite bergère de Domrémy, de résoudre un problème qui embarrasse le concile ! C’est un grand honneur que te fait le comte d’Armagnac !
    Elle bredouilla :
    – Martin... Clément... Benoît... J’ignorais jusqu’à leur existence. Que pourrais-je répondre ? Mes voix ne me parlent que de la situation dans notre royaume. Ce qui se passe au-delà de nos frontières ne concerne pas ma mission. Et d’ailleurs, qui est ce comte d’Armagnac ?
    On lui avait parlé naguère de Bernard d’Armagnac, connétable de France, gouverneur de la maison du dauphin Charles, que les Bourguignons avaient capturé, martyrisé et tué.
    – Le comte Jean est son fils, dit Alençon. Un triste sire qui tient du renard et du loup : il n’a aucune sympathie pour Charles, il n’est ni du parti des Français ni de celui des Anglais et des Bourguignons. Quant à savoir ce qui l’incite à se mêler des affaires du concile...
    Comme Jeanne s’inquiétait de ce qu’elle allait bien pouvoir lui répondre, son compagnon lui conseilla de se mettre en oraison et d’attendre l’avis de son Conseil.
    – Au lieu de m’aider, protesta-t-elle, tu te moques de moi !
    Il se proposa de l’aider à rédiger une réponse qui ne la présentât pas sous un jour ridicule trahissant son ignorance, qui se cantonne dans le flou afin d’éviter que les événements à venir ne vinssent l’infirmer. Elle soupira :
    – Tout cela m’indiffère et m’importune. Je veux en finir au plus tôt.
    Elle fit appeler le frère Pasquerel, lui dicta, le pied à l’étrier, un message dans lequel elle promettait à ce très cher et bon ami de lui adresser une lettre plus explicite à tête reposée, après avoir pris conseil de ses voix, de son droiturier et souverain Seigneur, du roi et de tout le monde. Elle terminait par une formule toute simple : Je recommande à Dieu qu’il vous garde.
    – C’est ce que les anciens Grecs, dit Jean, appelaient un renvoi aux calendes...
     
    Quelques heures plus tard, alors
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