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La confession impériale

La confession impériale

Titel: La confession impériale
Autoren: Michel Peyramaure
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grave, m’annonça qu’il
avait décidé de me confier une mission d’importance : me porter avec une
escorte armée au-devant du pape Étienne, dont un quarteron d’officiers romains
étaient venus lui annoncer la visite. Comme je restais de marbre, il
ajouta :
    — Mon fils, il est temps de t’initier aux
affaires du royaume. Cette fois-ci, tu n’auras pas à combattre un ennemi. Cette
mission ne sera rien d’autre qu’une promenade. Tu auras à lutter seulement
contre le froid et la fatigue, mais tu n’en souffriras guère plus que dans ton
arbre. Tu trouveras le Saint-Père et les membres de sa curie sur la route de
Thionville et tu le guideras jusqu’à cette ville, où il passera Noël en notre
compagnie. Tu devras te montrer digne de ma confiance. Promets-moi de ne pas la
trahir.
    Au comble de la confusion, je marmonnai une
vague promesse. Dans les heures qui suivirent, je tentai de m’expliquer cette
décision. Pourquoi, si cette mission était d’une telle importance, m’avoir
désigné pour l’accomplir, alors que rien, ni sa santé ni ses soucis, n’en
exemptait mon père ? Cette question, je me la pose aujourd’hui encore,
sans entrevoir la moindre réponse.
    Je me réjouissais que mon père ne m’eût pas
imposé la traversée des Alpes. Il avait également pris la précaution de me
faire précéder, plusieurs jours avant mon départ, d’un détachement d’une
dizaine de soldats accompagnés de deux religieux du palais, pour aider Sa
Sainteté à trouver son chemin à travers un pays que ses pieds n’avaient jamais
foulé. Ils avaient mission de l’attendre au sortir des Alpes, à Saint-Maurice
en Valais, et de lui faire prendre quelque repos à l’abbatiale de Romainmôtier,
dans les monts du Jura.
    Dans les parages de Langres, alors que la
neige tombait dru sur les mornes étendues du plateau, j’allais éprouver la plus
forte émotion de ma jeune existence.
    Après avoir tourné en rond parmi des espaces
désolés, balayés par des vents âpres et mordants, nous avons dû renoncer à
trouver l’escorte du pape et celle que mon père avait chargée de le guider
jusqu’à nous. Nous avions célébré Noël depuis quelques jours dans une abbaye
dont j’ai oublié le nom, tassée au creux d’une vallée, sous un édredon de
brume. Ce fut le plus triste Noël que je connus jamais, même, plus tard, dans
les montagnes de la Bohême.
    Le matin du 6
janvier, nous nous apprêtions à partir chasser le loup pour tromper notre ennui
et dégourdir nos membres, quand deux cavaliers frappèrent à la porte du
monastère. Dans la demi-pénombre qui baignait la cour, je reconnus les chefs de
l’escorte envoyée par mon père pour guider le pape Étienne jusqu’à nous. Ils
m’annoncèrent qu’ils précédaient de peu le pontife.
    L’un d’eux, Rothard, m’invita à aller
au-devant de lui pour lui présenter mes civilités. Je revêtis ma grosse
houppelande à large ceinture de cuir et partis, accompagné de quelques hommes,
dans la bise aigre qui soufflait du mont des Fourches, et, juché sur une butte,
attendis que l’escorte papale se montrât.
    Lorsque je la vis déboucher à la corne d’un
bois, mon émotion fut à son comble. Les consignes de mon père se bousculaient
dans ma tête : descendre de cheval tête nue, m’agenouiller, baiser la main
que Sa Sainteté tendrait vers moi, prononcer les paroles rituelles de
bienvenue, le conduire par la bride…
    Je fis de mon mieux et, en dépit de mon
émotion, m’en tirai assez bien, si j’en crois ma suite.
    Au cours de la veillée qui suivit le repas
Spartiate des moines, Étienne nous narra son odyssée : au passage des
cols, il avait perdu un de ses religieux tombé avec sa mule dans un précipice,
un autre qui n’avait pas supporté le froid ; il avait passé des jours à
errer, malgré les guides de montagne dont il avait loué les services, mais, à
Saint-Maurice, le soleil l’avait accueilli comme un signe favorable à ses
démarches…
    C’est à Ponthion, et
non à Thionville, que je me suis retrouvé au terme de notre équipée, rompu mais
heureux d’avoir rempli ma mission, malgré quelques aléas dus à la rudesse du
temps.
    Le roi tint à se rendre au-devant de ses
visiteurs, comme je l’avais fait moi-même, mais sans risque de se perdre ou de
mourir de froid, car il attendit qu’Étienne fût en vue pour s’exécuter. Je le
vis descendre de cheval, se prosterner, prendre le mors de la monture du
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