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Je suis né un jour bleu

Je suis né un jour bleu

Titel: Je suis né un jour bleu
Autoren: Daniel Tammet
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d’autres
lettres à l’initiale : at (à, au) est rouge, mais si on lui ajoute
un « h » pour faire hat (chapeau), il devient blanc. Si j’ajoute
un m pour faire « that » (ce), la couleur vire à l’orange. Tous les
mots ne correspondent pas à leur lettre initiale : les mots commençant par
la lettre A, par exemple, sont toujours rouges, et ceux qui commencent par un W
sont toujours d’un bleu profond.
    Certains mots correspondent parfaitement
à ce qu’ils décrivent. Une framboise  – raspberry  – est à la
fois un mot et un fruit rouge (red en anglais). Grass (l’herbe) et glass (le verre  – la matière) sont tous les deux des mots verts
désignant des choses vertes (green en anglais). Les mots commençant par
la lettre T sont tous orange comme une « tulipe » (tulip), un « tigre » (tiger) ou un « arbre » (tree) quand ses feuilles virent à
l’orange, l’automne.
    À l’inverse, pour moi, d’autres mots ne
correspondent pas à ce qu’ils désignent. Gées (oies, au pluriel) est un
mot vert mais désigne des oiseaux blancs (heese aurait été un meilleur
choix). Le mot white (blanc) est bleu, alors que orange est clair
et lumineux  – comme la glace. Four (quatre) est un mot bleu
mais aussi un nombre pointu, du moins à mes yeux. La couleur du vin est mieux
évoquée par le français vin, qui est violet, que par l’anglais wine (qui est bleu).
    Percevoir les couleurs et les textures de
chaque mot permet à ma mémoire de mieux retenir les faits et les noms. Je me
souviens par exemple que le leader du Tour de France porte un maillot jaune (pas
vert ou rouge ou bleu), parce que pour moi le mot jersey (maillot) est
un mot jaune. De la même manière, je me souviens de la croix bleue du drapeau
national finlandais (sur fond blanc) parce que le mot Finland (Finlande)
est un mot bleu (comme tous les mots qui commencent par un « f »). Quand
je rencontre quelqu’un pour la première fois, je me souviens souvent de son nom
d’après sa couleur : les Richard sont rouges, les John sont jaunes et les
Henry sont blancs.
    Grâce à cela, je suis également capable d’apprendre
des langues étrangères facilement et rapidement. Aujourd’hui, je maîtrise dix
langues : l’anglais (ma langue maternelle), le finnois, le français, l’allemand,
le lituanien, l’espéranto, l’espagnol, le roumain, l’islandais et le gallois. En
associant les différentes couleurs et émotions de chaque mot et de chaque
signification, les mots prennent vie. Par exemple, le mot finnois tuli est orange et signifie « feu ». Quand je lis ou quand je pense au mot,
je vois immédiatement sa couleur dans ma tête, qui évoque sa signification. De
la même manière, le mot gallois gweilgi (la mer) est le mélange d’un
vert et d’un bleu sombre. C’est un excellent mot pour dire la couleur de la mer.
Tout comme le mot islandais rôkkur qui désigne le crépuscule ou la nuit
qui tombe. C’est un mot pourpre dont la vision m’évoque un coucher de
soleil rouge sang.
    ~
    Je me souviens qu’enfant, j’allais très
souvent à la bibliothèque locale. Je passais des heures à regarder les livres
les uns après les autres, essayant en vain d’en trouver un avec mon nom écrit
dessus. Il y avait tant de livres dans cette bibliothèque, et tant de noms différents,
qu’il était impossible qu’il n’y en ait pas un avec mon nom. Je n’avais pas
compris à l’époque qu’il fallait écrire le livre pour avoir son nom dessus.
    En écrivant ce livre, j’ai pu prendre un
peu de recul, contempler tout le chemin parcouru, suivre la ligne de mon aventure
jusqu’à aujourd’hui. Si quelqu’un avait dit à mes parents, il y a dix ans, que
je vivrais de manière tout à fait autonome, que j’aurais une vie amoureuse et
un métier, je pense qu’ils ne l’auraient pas cru. Moi non plus, probablement. Ce
livre vous dira comment j’en suis arrivé là.
    On a récemment détecté chez mon frère
cadet, Steven, une forme d’autisme de haut niveau. Comme le mien. À 19 ans, beaucoup
de défis l’attendent, qui ont été aussi les miens, de l’angoisse et de la
solitude jusqu’aux incertitudes de l’avenir. Quand j’étais enfant, les médecins
ne savaient rien du syndrome d’Asperger (il n’a été identifié qu’en 1994) et
pendant plusieurs années, j’ai grandi sans comprendre pourquoi je me sentais si
différent des autres, en marge du monde. En écrivant ce qui a été mon
expérience
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