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Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Titel: Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique
Autoren: Émile Bréhier
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apparaîtront au cours de la philosophie occidentale, ceux qui ont pu venir du lointain Orient. La tâche nous sera beaucoup plus facile pour p.8 l’époque voisine de nous, où les travaux des orientalistes, depuis le début du XIX e siècle, n’ont pas été sans influence sur la philosophie ; nous pourrons peut-être alors nous rendre compte de la nature d’une influence qui continue jusqu’à l’époque actuelle.
     
    II
     
    Notre second problème est celui du degré d’indépendance de l’histoire de la philosophie à l’égard de l’histoire des autres disciplines intellectuelles. Mais nous refusons de le poser dogmatiquement, comme s’il s’agissait de trancher la question des rapports de la philosophie, prise comme une chose en soi, avec la religion, la science ou la politique. Nous voulons le poser et le résoudre historiquement ; c’est dire qu’il ne peut admettre une solution simple et uniforme. L’histoire de la philosophie ne peut pas être, si elle veut être fidèle, l’histoire abstraite des idées et des systèmes, séparés des intentions de leurs auteurs, et de l’atmosphère morale et sociale où ils sont nés. Il est impossible de nier que, aux différentes époques, la philosophie a eu, dans ce que l’on pourrait appeler le régime intellectuel du temps, une place très différente. Au cours de l’histoire, nous rencontrons des philosophes qui sont surtout des savants ; d’autres sont avant tout des réformateurs sociaux, comme Auguste Comte, ou des maîtres de morale, comme les philosophes stoïciens, et des prédicateurs, comme les cyniques ; il y a, parmi eux, des méditatifs solitaires, des professionnels de la pensée spéculative, comme un Descartes ou un Kant, à côté d’hommes qui visent à une influence pratique immédiate, comme Voltaire. La méditation personnelle tantôt est la simple réflexion sur soi, et tantôt confine à l’extase.
    Et ce n’est pas seulement à cause de leur tempérament personnel qu’ils sont si différents, c’est à cause de ce que la société, p.9 à chaque époque, exige d’un philosophe. Le noble Romain, qui cherche un directeur de conscience, les papes du XIII e siècle qui voient dans l’enseignement philosophique de l’université de Paris un moyen d’affermir le christianisme, les encyclopédistes qui veulent mettre fin à l’oppression des forces du passé demandent à la philosophie des choses fort différentes ; elle se fait tour à tour missionnaire, critique, doctrinale.
    Ce sont là, dira-t-on, des accidents ; peu importe ce que la société veut faire de la philosophie ; ce qu’il y a d’important, c’est ce que celle-ci reste, au milieu des intentions différentes de ceux qui l’utilisent ; quelles que soient leurs divergences, il n’y a de philosophie que là où il y a une pensée rationnelle, c’est-à-dire une pensée capable de se critiquer et de faire effort pour se justifier par des raisons. Cette aspiration à une valeur rationnelle n’est-elle pas, peut-on penser, un trait assez caractéristique et permanent pour justifier cette histoire abstraite des doctrines, cette « histoire de la raison pure », comme dit Kant, qui en a esquissé l’idée [7] ? Suffisant pour distinguer la philosophie de la croyance religieuse, ce trait la distinguerait aussi des sciences positives ; car l’histoire des sciences positives est complètement inséparable de l’histoire des techniques d’où elles sont issues et qu’elles perfectionnent. Il n’y a pas de loi scientifique qui ne soit, sous un autre aspect, une règle d’action sur les choses ; la philosophie, elle, est pure spéculation, pur effort pour comprendre, sans autre préoccupation.
    Cette solution serait fort acceptable, si elle n’avait pour conséquence immédiate d’éliminer de l’histoire de la philosophie toutes les doctrines qui font une part à la croyance, à l’intuition, intellectuelle ou non, au sentiment, c’est-à-dire des doctrines maîtresses ; elle implique donc une opinion arrêtée sur la philosophie, bien plus qu’une vue exacte p.10 de son histoire. Isoler une doctrine du mouvement d’idées qui l’a amenée, du sentiment et de l’intention qui la guident, la considérer comme un théorème à prouver, c’est remplacer par une pensée morte une pensée vivante et significative. On ne peut comprendre une notion philosophique que par son rapport à l’ensemble dont elle est un aspect. Combien de
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