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George Sand et ses amis

George Sand et ses amis

Titel: George Sand et ses amis
Autoren: Albert le Roy
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laquelle il a pu contracter mariage a porté différents noms ; celui que je crois le sien est Victoire Delaborde. Elle doit être un peu plus âgée que mon fils-(elle avait effectivement trente ans),-tous deux demeurent ensemble rue Meslay, n° 15... Cette fille ou cette femme, car je ne sais de quel nom l'appeler, avant de s'établir dans la rue Meslay, demeurait en nivôse dernier rue de la Monnaie, où elle tenait une boutique de modes.»
    Les lettres ni les démarches de madame Dupin ne purent aboutir à l'annulation du mariage. Elle recueillit seulement, comme pour attiser sa colère, des renseignements fort peu édifiants sur les origines de cette bru qui entrait subrepticement dans sa famille, sur le père, Claude Delaborde, oiselier au quai de la Mégisserie, sur le grand-père maternel, un certain Cloquart, qui portait encore, par delà la Révolution, un grand habit rouge et un chapeau à cornes, son costume de noces sous le règne de Louis XV.
    Cependant l'officier de l'état civil, un maire à l'âme patriarcale, tentait de calmer les inquiétudes de madame Dupin. Il chargeait, selon ses propres expressions, une personne intelligente et sûre de pénétrer, sous un prétexte quelconque, dans l'intérieur des jeunes époux, et voici le tableau qu'il en trace, d'après ce témoin fidèle : «On a trouvé un local extrêmement modeste, mais bien tenu, les deux jeunes gens ayant un extérieur de décence et même de distinction, la jeune mère au milieu de ses enfants, allaitant elle-même le dernier, et paraissant absorbée par ces soins maternels ; le jeune homme plein de politesse, de bienveillance et de sérénité... Enfin, quels qu'aient pu être les antécédents de la personne, antécédents que j'ignore entièrement, sa vie est actuellement des plus régulières et dénote même une habitude d'ordre et de décence qui n'aurait rien d'affecté. En outre, les deux époux avaient entre eux le ton d'intimité douce qui suppose la bonne harmonie, et, depuis des renseignements ultérieurs, je me suis convaincu que rien n'annonce que votre fils ait à se repentir de l'union contractée.»
    Le maire termine par quelques paroles de condoléance, en prévoyant qu'un jour ou l'autre le jeune homme se repentira d'avoir brisé le coeur de sa mère. Mais c'est sa première, sa seule faute. Elle est réparable, elle comporte le pardon, et, au demeurant, le ton qu'on a vu chez lui ne justifie nullement les douloureux présages que madame Dupin avait conçus. Comme beaucoup de belles-mères, elle espérait que son fils serait malheureux et lui reviendrait. Il n'en était rien. Maurice n'avait d'autre souci immédiat que de chercher les voies d'une réconciliation malaisée. Il finit par les découvrir, sous une forme assez romanesque qui fut couronnée de succès.
    Madame Dupin était venue secrètement à Paris, afin de consulter M. de Sèze et deux autres avocats célèbres sur la validité du mariage. Ils déclarèrent l'affaire neuve, comme toutes celles du même genre qui découlaient de la législation civile récemment mise en vigueur ; mais ils estimèrent que le mariage avait toutes chances d'être reconnu valable par les tribunaux, partant la naissance d'être proclamée légitime.
    Sur ces entrefaites, Maurice, informé du voyage de sa mère, prit la petite Aurore dans ses bras et chargea la portière de monter avec l'enfant chez madame Dupin, en lui disant : «Voyez donc, madame, la jolie petite fille dont je suis grand'mère ! Sa nourrice me l'a apportée aujourd'hui, et j'en suis si heureuse que je ne peux pas m'en séparer un instant.» Tout en bavardant, elle déposa le bébé sur les genoux de la vieille dame qui cherchait sa bonbonnière. Soudain un soupçon traversa l'esprit de madame Dupin. Elle s'écria : «Vous me trompez, cette enfant n'est pas à vous ; ce n'est pas à vous qu'elle ressemble... Je sais, je sais ce que c'est.» Et elle repoussait la petite Aurore qui, effrayée, se mit à verser des larmes. La portière s'apprêtait à reprendre et à emporter l'enfant. La grand'mère fut vaincue. Lorsqu'elle sut que son fils était en bas, elle le fit appeler. C'était le pardon. Quand ils se retirèrent, Aurore avait dans la main une bague de rubis que madame Dupin envoyait à sa belle-fille : George Sand a toujours porté cette bague. Quelques semaines plus tard, la réconciliation fut complète. La châtelaine de Nohant consentit à recevoir l'humble modiste qui s'était
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